2 août 2010

VL Beaulieu, Nabokov et Gowan

Je viens tout juste de compléter une commande en ligne chez Indigo : VLB, Nabokov et Gowan. L'eau, l'insecte et le sable.

Je lus avec beaucoup de plaisir la conversation entre Beaulieu et Atwood dans Deux Solicitudes. Dans ce duo, je retrouvai les deux très grands auteurs nationaux qui illustrent parfaitement le sentier littéraire de toute nation : se battre pour l'originalité et la vérité intime des valeurs intrinsèques du peuple auquel nous appartenons. Je veux lire La Grande Tribu. Ignorant s'il y a là un clin d'oeil à Richler ou à Lévi-Straus qui, tous deux allèguent que l'appartenance essentielle possède toujours le doute de la paranoïa, je retrouverai ce beau parleur déstructuré au verbe aussi tenace que la taïga nordique.
« Il avait déclaré avoir rêvé que la maison brûlait?
Oui. Des flammes jaillissaient de partout, et tout ce qu'on voyait apparaissait à travers des rubans de plastique écarlate et vitreux. Sa compagne de lit avait ouvert la fenêtre toute grande. Qui elle était? Elle venait du passé — une pierreuse qu'il avait racolée lors de son premier voyage en Europe quelque vingt ans plus tôt, une malheureuse née de parents de nationalités différentes, quoiqu’Américaine, en fait, et très gentille, qui s'appelait Giulia Romeo, le nom de famille signifie “pèlerin” en italien archaïque, mais nous sommes tous des pèlerins et tous les rêves sont des anagrammes de la réalité diurne [...] Penché sur elle, il regarda en bas, et là, très loin au-dessous, dans l'abime de la cour ou du jardin, des flammes toutes pareilles se tortillaient comme ces langues de papier rouge qu'un ventilateur dissimulé fait onduler autour de fausses buches de Noël dans les vitrines de fêtes d'enfances enneigées [...]  Il tâtonna pour trouver la lampe et l'alluma sans difficulté dan sa position insolite. Un instant, il se demanda ce que sa femme faisait là, couchée à plat ventre par terre, ses cheveux blonds étalés comme si elle volait dans les airs. Puis il regarda, ébahi, ses griffes confuses. » (Vladimir Nabokov, La transparence des choses, pages 121, 122 et 123)
Un peu les Grand-pères, vous ne trouvez pas. Nabokov enchevêtre la réalité de toiles d'araignée voluptueuse. Ce Russe-Américain joue au coléoptère. Un gymnaste à ruban fonçant dans la nuit toutes couleurs confondues. Il se bat pour Qui? pour Quoi? Au nom du libelle? Il a secoué les fondements du paradigme conservateur des bien pensants. Lolita mit du russe dans le pavillon des cancéreux; la Lolita de Nabokov accompagne les vedettes de Vadim : Brigitte Bardot et Jane Fonda en tête.

« He is wearing a checked sports shirt, with the sleeves turned back to his elbows. "Oh, I'm sorry." Of course. Her bare legs, crossed, show the blue dabs of varicose veins. Her face, when she sits, is not as young as at the door, Double chin when she relaxes, had tucked back. Smug little cookie, Firm little knockers, He asks, "Hew old is your child?" » (John Updike, Rabbit, Run, page 101)
Quel âge ton enfant a-t-il? Petit coquin... Quel âge a Mercedes Humbert? Le Person de Nabokov, quant à lui :
« Pour des raisons optiques et animales, l'amour sexuel est moins transparent que beaucoup d'autres choses nettement plus compliquées. On sait toute fois que Hugh avait courtisé dans sa ville natale une mère de trente-huit ans et sa fille de seize, mais avait été impuissant avec la première et pas assez hardi avec la seconde. Nous avons ici un banal cas de prurit érotique prolongé outre mesure, de pratiques solitaires aboutissant à l'habituel soulagement, et de rêves mémorables. » (Vladimir Nabokov, La transparence des choses, page 31)
L'érotisme débordant de Beaulieu trouve plusieurs compagnons; grand bien! Gowan demeure plus puritain; son animalerie ne change pas de règne. Nous restons dans la comparaison pas dans le fantasme. Le pastel beurre des pans admirables, à l'image de la solitude de la prairie sauvage; il ne passe jamais à la spatule d'huile tourmentée, toute en subtilité, pénétrant d'une cruauté à peine imaginable, des vies désarticulées et pourtant soumises totalement aux éléments. Karen Solie, dans le Globe and Mail du 30 janvier 2009, dit de Confession :
« Lee Gowan's third novel, Confession, sees the hubris of its young protagonist, Dwight Froese, collide with forces that have been gathering since before he was born, forces that have, in fact, helped to forge his tragic flaw. Dwight's fortysomething father, Jacob, who lost an arm in the Second World War, heads north from Denver with a 17-year-old stripper, Eva, whose own father "was not a kind man." [...] The larger questions it provokes are haunting, as are many of its images. As in Gowan's previous novels, questions of individuality and identity figure largely. As Dwight learns, identities made for us can be turned against us, and the past is a chronic condition. His final cathartic act recognizes one of tragic drama's lessons: that children inherit more than property from their parents. »
La nuit est humide. Dans quelques instants, je relirai Gilles et Jeanne de Michel Tournier : lecture scolaire, livre obligatoire pour ma session d'Automne. On va s'amuser...






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