31 janvier 2008

Mon ami Zola


Revoilà Zola dans ma vie. Pour le meilleur et pour le pire. Mes premières soirées avec le grand écrivain se déroulèrent dans l'autobus qui m'amenait et me ramenait régulièrement de Trois-Rivières à Saint-Jérôme où j'allais rejoindre ma jeune caissière. La Terre, Nana, l'Assomoir... page à page sous la lampe tubulaire, il m'accompagnait sur ce misérable trajet à travers un misérable paysage parmi une faune suante et nauséabonde.


"Mais, dans les grandes rues couvertes, la vie affluait. Le long des trottoirs, aux deux bords, des maraîchers étaient encore là, de petitscultivateurs, venus
des environs de Paris, étalant sur des paniersleur récolte de la veille au soir,
bottes de légumes, poignées defruits. Au milieu du va-et-vient incessant de la
foule, des voituresentraient sous les voûtes, en ralentissant le trot sonnant de
leurschevaux. Deux de ces voitures, laissées en travers, barraient la
rue.Florent, pour passer, dut s'appuyer contre un des sacs grisâtres,pareils à
des sacs de charbon, et dont l'énorme charge faisait plierles essieux; les sacs,
mouillés, avaient une odeur fraîche d'alguesmarines; un d'eux, crevé par un
bout, laissait couler un tas noir degrosses moules. À tous les pas, maintenant,
ils devaient s'arrêter. Lamarée arrivait, les camions se succédaient, charriant
les hautes cagesde bois pleines de bourriches, que les chemins de fer apportent
touteschargées de l'Océan. Et, pour se garer des camions de la marée de plusen
plus pressés et inquiétants, ils se jetaient sous les roues descamions du
beurre, des oeufs et des fromages, de grands chariotsjaunes, à quatre chevaux, à
lanternes de couleur; des forts enlevaientles caisses d'oeufs, les paniers de
fromages et de beurre, qu'ilsportaient dans le pavillon de la criée, où des
employés en casquetteécrivaient sur des calepins, à la lueur du gaz. Claude
était ravi dece tumulte; il s'oubliait à un effet de lumière, à un groupe
deblouses, au déchargement d'une voiture. Enfin, ils se dégagèrent.Comme ils
longeaient toujours la grande rue, ils marchèrent dans uneodeur exquise qui
traînait autour d'eux et semblait les suivre. Ilsétaient au milieu du marché des
fleurs coupées. Sur le carreau, àdroite et à gauche, des femmes assises avaient
devant elles descorbeilles carrées, pleines de bottes de roses, de violettes,
dedahlias, de marguerites. Les bottes s'assombrissaient, pareilles à destaches
de sang, pâlissaient doucement avec des gris argentés d'unegrande délicatesse.
Près d'une corbeille, une bougie allumée mettaitlà, sur tout le noir d'alentour,
une chanson aiguë de couleur, lespanachures vives des marguerites, le rouge
saignant des dahlias, lebleuissement des violettes, les chairs vivantes des
roses. Et rienn'était plus doux ni plus printanier que les tendresses de ce
parfumrencontrées sur un trottoir, au sortir des souffles âpres de la maréeet de
la senteur pestilentielle des beurres et des fromages."

Le Ventre de Paris, cette fois, qui digère l'histoire comme le dit si bien Guillemin qui signe l'édition Rencontre Lausanne.

Je ne devrais pas en cette session très chargée me laisser le luxe de cette lecture... Mais je ne peux pas vraiment résister. Retour en autobus...!

24 janvier 2008

La francofolie du Québec

Le plus décevant dans tout ce débat demeure le fait que les "parlants" français continuent de capituler. Malgré des législations, des restrictions, de la mauvaise presse, la langue anglaise progresse inexorablement; non, je devrais plutôt dire que le français régresse pathétiquement. De plus, il est bien naïf de croire qu'une éventuelle souveraineté, voire une recrudescence de la promotion du français législativement ou médiatiquement puisse y changer quoi que ce soit.
Une langue vit parce qu'on la parle, envers et contre tous. Une langue vit parce qu'on l'aime tellement qu'on la force systématiquement dans les oreilles de tous. Ma foi, les jeunes francos de Collège Glendon à Toronto ont plus de mérite à afficher leur beau français dans la ville reine que tous les heureux joualleux qui amochent quotidiennement notre "pourtant" si beau français à la grandeur du Québec.
J'aimerais bien que quelqu'un m'explique la progression fulgurante de l'espagnol partout aux États-Unis, même dans les lointains états du Nord-Ouest: Wyoming, Dakota, Idaho; la seconde langue présente sur les divers guichets destinés à la clientèle est l'espagnol. Voilà dix ans, c'était le français! Je sais, j'y étais. En Floride, tout est bilingue - à Miami-Sud, tout un quartier est unilingue; même dans les restaurants, il devient parfois plus difficile d'entendre un anglais un peu compréhensible. Une loi protège-t-il donc cette langue en péril? Mais non! Les hispanophones ont-ils alors une grammaire parfaite, un vocabulaire riche, une syntaxe respectueuse? J'en doute... Mais je ne suis pas en mesure de répondre à cette question, la qualité de mon espagnol ne me le permet pas. Finalement, je crois que c'est simplement parce qu'ils ont décidé de parler leur langue; que leur langue à eux, un méli-mélo de toutes sortes d'espagnols d'ailleurs provenant d'un peu partout dans le monde, ils en sont solidaires. Ils ne s'enfargent pas dans les fleurs du tapis; ils sont fiers de gueuler leur langue; le serveur, l'avocat, le professeur, le manoeuvre, les p'tits qui se chicanent dans la ruelle...
Alors pas de sympathie pour les pauvres québécois qui passent leur temps à parler des sondages, des enquêtes, des pronostics, de la démographie et autres bonbons subventionnaires. Pas de sympathie!

22 janvier 2008

Le théâtre populaire ou intellectuel?

Une texte intéressant sur le théâtre vient de paraître sur le site de la revue Idée: http://www.laviedesidees.fr/IMG/pdf/20080116_aristote.pdf

Cette critique du livre de Florence Dupont reprend une très vieille rengaine: celle qui raconte les nombreuses prises de bec entre les tenants du "porteur de message" et les artisans du "spectacle de divertissement".

Ce livre ne règle pas le dilemme, mais il apporte un éclairage nouveau. D'ailleurs, il faut regarder les nouveaux spectacles théâtraux, c'est du moins le nom qu'on leur donne, à New York, qui sont devenus des expériences multimédiatiques où les spectateurs demeurent debout durant tout le spectacle, pour calculer toute la pertinence de cette nouvelle entrée dans la dialectique de cette littérature qui n'a jamais pu nicher définitivement ni chez le populiste ni chez l'intello.

19 janvier 2008

Associations comportementales

Il me prend à rêver que je suis un éléphant. Bon, pas tellement physiquement, mais intérieurement; un id avec une énorme trompe et des sabot à confiturer des zèbres. Je rêve aussi de temps à autre à des reptiles qui se glissent ici et là.

Entre les deux espèces, on en voit venir une de très loin; pas l'autre! Les pachidermes sont condamnés à faire vrai et franc: pas le choix! Les reptiles vont loin sur leur ventre écaillé avant que quiconque puisse déceler là où ils s'en vont.