5 novembre 2008

Dernier droit (4)

Cardiologiste! 250, 000 $ par année pour faire boucherie. La dernière fois que j'ai fait du coeur de boeuf, il est resté dans les assiettes: caoutchouté. Au soin intensif, personne ne court; tout le monde remplit son rapport, classe des pillules, regarde la scédule pour la prochaine fin de semaine. Chiale...

J'ignore le nombre d'heures depuis la mer. De jours? Hum! Détaché vivant, viande rouge fraîche demandant sac de conservation. Ça sent bon: un peu vanillé parmi du camphre. Je voudrais pouvoir me border comme quand j'étais jeune dans la chambre en haute... je monte à la chambre; vers la gauche quelques pieds dans le corridor tiède; je croise le cadre de porte; le froid fouette mon corps recouvert d'un vieux pyjama en flanelle au motif lugubre. Il fait froid dans la chambre: problème de chauffage; économie de bout de chandelle! À la droite, mon lit; l'ancien lit d'Ernest, le grand-père, apparemment. Un lit de fer étroit qui grinche; mon lit; mon matelas; me douillette en coton rugueux carotté rouge et vert et fourré de quelque matériel louche qui sent. Je dégage l'oreiller; je plis parfaitement le drap blanc par-dessus la douillettee; je ramène les côtés en dessous du matelas, des deux côtés en séquence, fébrile de pénétrer dans mon cocon; les couvertures sont si serrées que le matelas en est incurvé. Je me glisse à l'intérieur... mon cocon! Et j'attends la sorcière. La quoi? On s'en reparle plus tard.

Les yeux me ferment. Pas de tonus musculaire! Le cerveau s'éteint.


Le pire et le meilleur


Barrack Obama est président des États-Unis.

Il succède à George W. Bush.

Ce pays juste au sud de chez nous, cette puissance impériale, en décadence selon plusieurs, vient de se donner un Christ. Il a même demandé à son public de l'aider à porter la croix vers le sommet de la montagne. Toutefois, au sommet de la montagne, ce n'est pas la crucifixion, c'est le nirvana.

J'envie tous les américains ce soir: ils ont un chef. Il les a fait pleurer d'affection; crier de joie; sauter d'impatience; écarquiller les yeux comme un nouveau né; rire avec un serrement dans la gorge. Je me souviens du dernier de chez nous qui m'a fait pleurer: René Lévesque! Lui, on lui a fait monter la montagne aussi, mais rendu en haut on l'a crucifié...

J'ai tellement le goût de déménager.

4 novembre 2008

Cultlure de l'immédiat


La semaine dernière, je rentrai dans la librairie Morin de Trois-Rivières pour acheter un livre. C'était l'anniversaire de naissance de ma fille qui demeure à Toronto et qui est une avide lectrice... et amatrice de film!

Ayant terminé le très beau « Sollicitudes » de Beaulieu et Atwood sur la littérature canadienne, j'avais le goût de lui acheter un Ducharme, un Beaulieu, un Aquin. Je me dirige vers la section littéraire du Québec; je cherche; je cherche; rien! RIEN! Aucun de ces auteurs ne se trouvait sur les tablettes. Parle d'un tablettage de filière treize! J'ai alors jeté mon dévolu sur les publications françaises; bien sûr elles pullulent. Et pas que les p'tits nouveaux au nombril humide comme les nombreuses publications romanesques des deux dernières années de la section Québec; mais non, du Moyen Âge jusqu'au XXIe siècle chez Folio, Livre de Poche, Flammarion, Points, Idées, La Pléiade et j'en passe... Et à bon prix encore. Je retourne dans la section P'tite Patrie : j'ai mal vu; recommençons! Je viens de voir, timbre rare, un ou deux Ducharme chez Folio et Aquin chez aussi, erreur de commande sans doute! Plusieurs Atwood, Richler, Lawrence, Munroe, Ondatje et d'autres avec l'imprimatur des grandes collections de France. Alors, c'est sûr, je trouverai quelques Boucher de Boucherville, Larkin, Lacombe, Rivard, Girard, Harvey, Germain, Godbout mon dieu, Carrier peut-être, enfin du Tremblay? Oui, oui, en voici un entre et parmi des tonnes d'insipidités subventionnées pour faire aller les presses, masturber les intellos et garnir les concours de l'UNEQ.

Je suis sorti avec un Ducharme de Folio et un Claudel (le jeune) en Livre de Poche.

En 1972, quand nous avons débuté, moi et une quinzaine d'hurluberlus, notre Bac spécialisé en littérature québécoise, on lisait la plupart des oeuvres romanesques et poétiques en photocopies pirate parce que les familles ne voulaient donner les droits de reproduction à un imprimeur. Quelle bande de minables pleutres! Le théâtre, Germain, Gauvreau entre autres ont totalement disparu de la sphère littéraire, publié dans des maisons d'édition aussi disparues. On leur préfère des Américains, des classiques ou des Européens ninjas... On n'écrit plus, on met en scène! Or donc, on avait la mission de mettre la littérature sur la carte. On était si fier de se montrer avec ces documents brochés à la vite, ou boudinés fragile, de trimbaler cet enfant qu'on voulait tellement élever vers la stratosphère des univers culturels. Je me souviens avoir lu Une de perdue, deux de retrouvés de Boucherville, dans la Revue canadienne à la bibliothèque municipale les soirs d'hiver, chapitre par chapitre sur ce vieux papier, comme on déshabille une fille la première fois.

Mais la balloune a pété. Aujourd'hui, il faut les commander pour les étudiants pour voir les arbres de notre passé littéraire apparaître sur les tablettes... S'ils sont réédités bien sûr! Que dis-je « passé ». Les arbres d'hier, même pas avant hier. On peut bien reprocher aux jeunes de ne pas avoir de perspective historique. J'ai pas soixante ans et j'ai déjà vu naître et mourir des auteurs, de puissants auteurs! J'ai pas soixante ans et j'ai vu naître et mourir ma culture...

Tant pis.

3 novembre 2008

Futilités


Demain la Terre arrêtera de tourner. Les Américains nommeront leur président.


La série mondiale: les Phillies de Philadelphie ont gagné battant Tampa Bay Rays.


Le Superbowl l'automne dernier? Les Giants de New York juste par trois points sur les Patriots de New England (Boston).


J'en bave. J'aime tellement parler de leurs exploits, de leur forces, de leurs faiblesses. Je suis à la lettre les indices de leur bourse. Je ris de leur choix. Ils n'ont pas de culture. Ils sont corrompus et impériaux.


Je suis à leur remorque. Je regarde leurs films. Je conduis leurs autos... ou les japonaises... ou les coréennes.


Je vis en procuration en attendant d'avoir le courage d'être quelqu'un.


Le cirque est en place. Les animaux attendent au sous-sol. Les gladiateurs grouillent dans leurs cages. Les spectateurs mangent et boivent dans les gradins. Les notables copulent sur les balcons. L'empereur boit. Le soleil!


Les satius, assis en périphérie, à l'écoute du prochain commandement, savoure la fierté de son maître.


L'empereur est mort! Vive l'empereur!

31 octobre 2008

Comment détruire la société!

Il suffit de la confier à des incompétents. Et aujourd'hui, nous y sommes! Oh! Je ne parle pas de la grande échelle hiérarchique où on se perd dans les théories et les titres ronflants. Je ne parle pas de nos politiciens, de nos dirigeants spirituels, des puissants de ce monde. Non! Je parle de moi. Je suis le grand destructeur de la société.


Je pense à Obama. Je reste froid face à ce personnage rongé par l'ambition. Oh! Horreur! J'ai trouvé McCain sympatique au Saturday Night Live. Noir ou blanc? Les démocrates, en panne sèche de candidat charismatique, court-circuité par l'ex-première-dame Clinton-je suis-corrompue-à-l'os, a jeté son dévolu sur une étude de marché qui définissait la couleur d'un preacher s'avérait le seul compétiteur valable pour remplacer le preacher blanc. Pauvre McCain, soldat de plomb, Top Gun de la plèbe, riche par alliance, qui ignore le nombre de ses maisons... de son épouse : cela dit assez l'importance qu'il accorde à ce détail. Et si on demandait à Barrack le total de ses placements...!?


Je pense à l'attention médiatique universelle sur l'élection présidentielle. Fugace! Une marée d'humains à la recherche d'une cause. Je pense que tout cela est vain : une horde de minus en orbite du soleil tentant de placer leur ombre pitoyable en relation avec l'Astre. Les Américains décideront et nous vivrons avec leur décision... une fois de plus... en bon conquis!


Je pense à la futilité de parler. Au manque de courage d'agir. Il vaut mieux faire le spectacle que marcher à l'affront. Mercredi matin, nous pleurerons notre dépendance, peu importe le résultat, car notre société se sera prouvée une fois de plus que notre colonialisme n'est pas seulement dans notre âme, il siège dans notre génétique.


Je pense à la destruction... Non! Je pense à mon prochain congé pour me baigner avec Bob de l'Ohio qui vit en Floride grâce à son ingénierie dans une multinationale pour discuter des vraies affaires : la culture générale d'un Américain intelligent!

28 octobre 2008

Instruments de torture


Ainsi va la vie. On meurt. On finit toujours par mourir. Et la plus belle mort est définitivement la dernière; la vraie; la tombe; la cendre; la disparition définitive!

La vie est fourbue de zombies : êtres plus ou moins moches, pourrissant mentalement et physiquement : tu périras par là où tu as péché : la gorge, le coeur, le cerveau, le cul...

En 81, une marche dans une nuit noire, avec un jeune étudiant à Argenta, Dylan. On n'avance que par l'instinct de reconnaître la route de terre et le son de nos bottes. Nous parlons de la vie. de la sienne et de la mienne; je suis en quelque sorte son tuteur; il termine sa douzième année; il vient de Upper New York près des Finger Lakes. Je crois encore aujourd'hui qu'il était très intelligent, mais surtout courageux : il est devenu prospecteur et s'aventure dans la jungle amazonienne. En arrivant à destination, quelque deux kilomètres plus loin, nous avons soudainement assisté au lever de la Lune : il faut avoir vécu en montagne pour avoir un sens de ce moment. La Lune peu à peu rayonne sur le faîte de la montagne, puis graduellement se dévoile et enfin la délaisse pour briller dans le ciel noir. Il fait clair. La forêt environnante, le sentier, les falaises s'enveloppent de poudre phosphorescente. Debout, en silence, happés par la féerie.

Ces moments de vie vont et viennent. Non! Pas vraiment! Il faut les chercher et les mériter. Il faut non pas accueillir l'aventure, mais trouver, prendre, le courage d'y pénétrer. La plupart des cons qui végètent à reporter à demain en attendant gaspillent leur temps et celui des autres. Ils torturent leur vie pour atteindre des instruments de silices. Je n'ai pas d'épaule pour les larves.


18 octobre 2008

Dernier droit (3)

Attention! Sur la civière à droite! Laisse le défibrillateur à gauche à la tête. Le cardio à droite, la pression ici, le régulateur, le dextrose là, la tente, appelle le neuro au cas. Vite Christ! Vous autres au rapport au poste.
Branche à l'encéphalogramme et au manomètre. Va me chercher de l'amphétamine et du Valium.
— Ah! Monsieur le docteur, il vient d'arriver des Îles par hélicoptère. Arrêt complet de toutes les fonctions moteur. Le pouls est normal, considérant. Le cerveau, on sait pas encore. On le branche?
— C'est Robert Plante.
— Qui? Lui? Comment...
— Robert Plante. Le conjoint de Diane.
—?!?!?
Manquait plus que lui... Le subir tout mon secondaire... École privée. À l'orée de la révolution tranquille. Le p'tit blond parfait de la banlieue cossue stationnant sa puissante moto de performance sous les yeux de tous. Assez curieusement, son regard rencontrait régulièrement le mien. Quartiers différents, histoire familiale aux antipodes, fréquentations irréconciliables, loisirs inabordables, l'univers de l'un représentait l'Olympe de l'autre.

Les leurres de la jeunesse. On avait été, tous les deux, témoins de la fornication d'un chien et de sa chienne, deux animaux sales d'environ trente centimètres de haut, maigres à frémir, laids à chier. Devant la porte d'entrée du séminaire, parmi les autres animaux à peine mieux dressés qui s'engouffraient dans l'humide sous-sol aux cases de tôle, ils tentaient, en hurlant, de se détacher. La nature ayant pourvu le Mâle canin d'un pénis avec des arêtes de retenu pour assurer non seulement une pénétration, mais un emprisonnement cadenassé de l'appareil dans le vagin de la Chienne, les deux goinfres se retrouvaient titubant maladroitement essayant de fuir la foule criarde. Cris bizarres : mélange de peur, d'urgence, de désespoir; de lui et d'elle, aigus à souhait, dents sorties, se tortillant comme des damnés aux enfers.... selon les gravures de l'Encyclopédie de la Jeunesse du moins... Lui et moi regardions un peu gênés, hébétés, alternativement l'emprise sexuelle et nos regards à la fois surpris, amusés et curieux! C'est la seule fois où nous assistions au même spectacle sauf la fois où, arrivant à la maison de Diane pour un samedi de petting, je les avais observés dans son salon en état de préparation avancée.

- Allez Éric! Sors-moi de là.

Un sage à entendre


Bof! J'arrête à la porte. Je cogne sur le cadre car la porte est ouverte. J'entre, demande une minute sachant bien, et lui aussi, qu'on en a pour plus. Je m'assieds, pousse un long soupir de dépis et pose ma question. Quelle est-elle? On s'en balance. Quand je viens le voir, c'est simplement pour entendre un peu de salubrité humaine, ce qui est rare!

Il est un repère. Pas une bouée. Pas un guide. Juste un cerveau qui parle bien, et juste. Je m'en sers de temps à autres pour défragmenter mon disque. Les individus indépendants ne court pas les rues; chez nous, oasis parmi mille mirages. À l'entrée, comme le casse-tête chinois, les blocs de bois, sphériques, cubiques, coniques ou élicoïdales s'étalent pêle-mêle sur le plancher. Je les jette là presque comme un défi que je nous donne. Vas-y! Essaie donc un peu de voir un ordre là-d'dans! Un certain nombre de phrases entrecoupées de quelques uns de mes grongnements s'écoulent. Je regarde plus que je n'écoute; ici les paroles comptent moins que leur association. Curieux à dire, peut-être plus encore à comprendre, c'est la logique qui est fascinante à élucider dans le propos, pas sa signification. Un peu comme l'ordre (pas dans le sens de classifier, mais dans le sens de commander): il sécurise; il clarifie. Le faible plie; le fort affronte. Les tergiversations parlent de bois; les décisions parlent. Lui, sa logique ordonne; elle n'est pas inquisitoire; elle se contente d'être déchiffrable, évolutive et solidaire. Déchiffrable, elle est limpide dans sa démonstration. Évolutive, elle monte graduellement ou descend inéluctablement vers le finalité à atteindre. Solidaire, elle n'est pas infaillible, mais englobante de tout l'univers concerné par l'objet de discussion.

Quelques minutes après mon arrivée, les pièces reposent toujours sur le plancher, mais ils font du sens. Je les ramasse; sors; hoche un peu de la tête; déambule calmement vers mon bureau: bon intermède.

16 octobre 2008

MoMA - Pollock

I have a dream! But who has an answer for me? The bridge crosses a river no longer existing. It dried up. It was damed! The water holds, stuck up for production. People on both sides now walk across dry foot. Plants and trees have started to grow up there where mice, crows and rats commutes from downton to suburb.


Je suis Pollock. J'ai bu. Une immense toile assiège mes yeux. Mes mains sont fébriles. Mon cerveau fige. Peu à peu, je suis envahi par une épilepsie cérébrale. Dans le gris, mes neurones s'énervent, se choquent. Elles se rebellent. Elles électocutent ma paroi crânienne. Le sang s'échauffe. Le pression monte. Tout mon corps commence à trembler. Je vais peindre bientôt. Je vais mouiller mes mains, mes doigts; mes ongles égratigneront le canevas entre la pression crevassante et la déchirure.



Outside in. Old words with no meannig. Remember Bill when we wanted to decontruct the words to build poetry instead of writing it. Join the sound to the feeling instead of the traditional highway of the words. Too late. You don't write and neither do I...


Pollock promena son américanité toute sa vie dans sa carcasse de blanc. L'indien du Wyoming lui colla tous les jours à la peau. Au fond de la bouteille, il trouva les gestes de son "addiction".

J'aime Pollock.
Pour Ève...

9 octobre 2008

Ne jamais baisser les bras!

Je ne connais jamais le présent du prochain coin de rue... de la prochaine station...


Il y a des rats que j'ai vus hier soir galoppant sur une croûte d'immondices brunâtres. De jeunes rats fouillant la crasse pour survivre dans leur bonheur communal et souterrain, leur longue et effilée queue noire cliquetant contre l'acier de la voie ferrée.

Même au détriment du hasard et des pires tragédies...

Ne jamais baisser les bras!

Jamais, même dans la pire noirceur.
Il y a toujours un trou dans le tunnel... quelque part!

8 octobre 2008

Fébrilité!

Frétillement! Agitation! Trépidation! Effervescence! Émoi...

Cinq cents milliards de petits martiens Et moi, et moi, et moi
Comme un con de parisien
J'attends mon chèque de fin de mois
J'y pense et puis j'oublie
C'est la vie, c'est la vie

Selon Jacques Dutronc.

Mon chèque de paie, il ne vient pas depuis assez longtemps pour me faire oublier les années de vaches maigres. Je pensais hier à un certain nombre de personnes qui ne connaîtront jamais ce calme de l'esprit. J'avais quarante ans passés lorsqu'un employeur me mentionna que « tu sais, c'est plutôt symbolique cette permanence ». Il ne réalisait pas jusqu'à quel point elle me soulageait cette satanée symbolique.

Les poètes du grand siècle pouvaient bien se gargariser avec leur retraite familiale. Je lisais justement aujourd'hui le destin de Baudelaire qui dépensa frivolement une grande partie de l'héritage de son père avant qu'il ne soit ralenti par sa famille avant qu'il ne dilapide tout le reste. Alors seulement, il se mit à l'écriture sérieusement... Pour embellir une maigre pension. Je ne connais pas de poètes riches; tout au plus certains romanciers qui vivent et certains essayistes et dramaturges qui complètent un pécule intéressant en complétant par d'autres médias. Nous ne sommes pas aux États-Unis! Là-bas, ils ne sont pas rares ceux qui font fortune, mais ils ne sont pas légion non plus. Chez nous, la littérature payante, elle s'enseigne, elle ne se publie pas.

Les millions de martiens sont outre frontière. Les quelques héros meurent après quelques années et sont rarement ressuscités. J'ai lu dernièrement que c'est Raymond Queneau qui aurait permis à Réjean Ducharme d'entrer chez Gallimard par la porte d'en avant. Aquin ne s'était pas encore suicidé dans la cour des Soeurs de l'Assomption à Montréal. C'était l'époque où le Refus global se mariait avec l'universalité et où des poètes, Miron, Grandbois, Lapointe, canevassaient sur un Riopel ou un Mousseau. Effervescence! Disparue! Éteinte! Sous une grande tente de kermesse où de petits écriveurs de parade se lancent et nagent jusqu'à la prochaine strophe. Il n'y a pas de vie sur Mars. Il n'y a pas de Martiens! Ils ont foutu l'camp!

J'ai reçu mon chèque aujourd'hui. Je vais tenter de croire en mon indépendance intellectuelle. Je vais déplacer mon cavalier vers la tour pour assiéger le destin. Échec au roi! Bouffer par la reine! Échec et mat par le fou... Je vais relire Stendhal. Et Robertson Davies. Je me dois bien une trilogie.

7 octobre 2008

Le soleil


Une journée ensoleillé, en plein milieu d'octobre... J'ai la chance de pouvoir travailler de mon bureau à la maison et voici ce que je vois à gauche puis à droite. Je bois une bière avant d'aller chercher ma p'tite dernière à la garderie. Je veux quand même prendre ma retraite le plutôt possible, mais ma vie roule tout de même assez bien.


Dernier droit (2)


Une sirène brise le silence. On aura téléphoné. Les gens s'affairent autour de cadavre vivant. Catalepsie. La marée a à peine eu le temps de se rendre aux genoux. Tant pis pour la peur! On l'a glissé sur la civière avec l'attention requise. Un cadavre. Il ballotte sous les sangles.

— Comment faire pour faire signe à ces gens?

— On le branche?

— Je ne vois pas pourquoi; pouls normal; pupilles dilatées, mais bon...

— Soluté?

— Oui, vas-y. On va l'hydrater...

C'est le départ vers l'hôpital. Diane est assise; les yeux rouges. Elle n'a pas pleuré. Elle est hébétée, abasourdie.

— Qu'est-ce qui arrive à mes vacances? Pourquoi aux Îles? L'air frais, le calme, la mer...

Soixante ans! Bel anniversaire! Troisième semaine de retraite après une vie de fou à gravir les échelons méthodiquement, avec abnégation et ambition. Des responsabilités envahissantes, mais des défis surmontables.

— J'étais tellement plus en contrôle au bureau.

Une fille, deux garçons : Natacha, Patrick, Frédéric : trente, vingt-huit, vingt-six. Réglés à l'horloge. Coordonnatrice de section, directrice de secteur, superviseure pour l'Est du pays. Quand Fréderic est entré à la maternelle, ce fut Forest Hill la cossue avec la direction nationale. Cinq pieds onze, tailleur haute couture, verres d'appoint et mallette marquée.

— Merde, Robert, qu'est-ce qui se passe?

Il l'avait croisée aux HÉC. Elle l'avait remarqué. Un intello un peu perdu en commerce international. Plus philosophe que comptable, il se promenait d'un cours à l'autre avec des A et des B. Toujours en broussailles, sentant la veille et soufflant l'oignon. Gentil, sans naïveté : un futur prof pourvu que le coup de pouce pour le doc y soit.

Le soleil avait complété l'arc. Le froid et le frimas étaient revenus sur l'île. Le médecin du village avait recommandé le Centre hospitalier régional à Campelton. L'hélicoptère pendant deux heures. Robert s'en est allé en ville. Diane est restée seule. Elle n'a jamais apprécié l'hélico : trop bruyant... et les vibrations! Bof!

— Je dois aller chercher les choses à l'Auberge de toute façon. Allez-y! Il semble stable. Je vous rejoindrai dès que possible. Voici mon numéro de portable : 674-188-5151. Je l'ai toujours avec moi.

Les ambulanciers se sont regardés en esquissant une moue.

— Bon, c'est bon! On dira de vous tenir au courant.

Un bruit d'enfer enlève le cadavre.

— Foutu bourbier! Je suis Johnny got his gun. Lui avait tous ses membres à la Première Guerre mondiale; il ne lui restait qu'une seule articulation : le cou. Le morse deviendra sa seule voie de communication. Mais moi? Je suis mort...


(à suivre)

3 octobre 2008

Dernier droit

Un homme et son épouse marchent sur la plage des Îles de la Madeleine. Ils se rappellent leur voyage de camping voilà plusieurs années, avant les enfants et le traintrain de la vie professionnelle. Ils ne se tiennent pas la main, tout de même pas une publicité de Liberté 55, mais ils ont une belle connivence. Elle a le vent dans les cheveux. Doucement, ses rides, ses lèvres plus minces, ses cheveux plus empaillés se marient aux vagues. L'air salin plisse ses yeux; il s'imagine à l'aventure : premier matelot à débarquer sur l'île pour la posséder. La plage est longue et blonde, ponctuée de lichens et de rocaille sablée; des coquillages, tout fracassés, jonchent la ligne d'eau. Le ciel promène quelques nuages. Le soleil pointe à 45 degrés sur l'Atlantique.

— Bon déjeuner!

— Juste ce qu'il faut.

— T'as pensé à Natacha?

— Ouais! Un peu...

— J'espère que tout va.... s'arranger.

— À son âge! Faut l'espérer. Arrête... Reste ici....

— Pas facile de faire le vide.

— T'as vu la nageoire là-bas!

— Où?

— Là, à gauche.

— J'vois pas.

— Ben oui, là, juste là, suis mon doigt...

— Vraiment, je n'vois rien...

—...

— Robert! Robert...

Robert est muet. Sa bouche a cessé d'obéir. Il fronce les sourcils. Des mots dans sa bouche refoulent dans sa gorge. Il fronce les sourcils plusieurs fois devant Jocelyne qui se demande à quoi il joue.

— Robert.

Il continue. Puis, il secoue son bras gauche. Son bras droit. Il sent un peu d'engourdissement; c'est le froid. Non...

Robert tombe à la renverse. Pas de convulsion, pas de mouvement, pas de plainte.... Dans son cerveau, ça tourne à mille milles à l'heure. Je m'en vais. Communiquer avec l'extérieur à tout prix. Ne criez pas si fort. J'entends! Le vague... Bougez; donnez un signe. Pas pouvoir transmettre quoi que ce soit. La lumière est trop forte; peut pas fermer mes paupières. Le vent... je sens le vent. Ma peau est sensible. Je forme des mots; je crie en moi; je bouge de toutes mes forces. Regardez-moi quelqu'un!

Seul. Plus personne. Le silence sauf la mer qui bruisse et le vent qui cille. Pas un ACV, je n'ai pas mal à la tête; mon coeur bat normalement. Bon, je ne suis pas médecin, mais pas un ACV comme j'en ai entendu parler. Qu'est-ce que c'est cet arrêt total? Est-ce que j'ai uriné? Est-ce que mon pantalon est mouillé? Je crois toujours avoir ce contrôle. Mais, oui oui, mon pantalon est humide. Le sable! C'est le sable qui est trempé qui humecte mon pantalon. Ouf! Cette fonction-là, je ne veux pas la perdre. Le bruit des vagues a changé. Il est plus fort; le vent se lève et augmente le volume des vagues. Ma cheville est très froide. Je sens mon pied qui bouge. C'est moi qui actionne mon pied? Je pourrais bouger l'autre aussi alors! Non, seulement le droit. Bizarre. Ça continue. Mon pied droit vit. Mon mollet vit aussi.... Ah merde! C'est mouillé, c'est vraiment mouillé! C'est la foutue marée. Elle monte la vache. Et moi alors.... Hé! quelqu'un! Je crie sans m'entendre. Hé! Diane? Où es-tu?
(à suivre)

2 octobre 2008

Le principe Oreo




Il n'est guère surprenant qu'un Noir aboutisse finalement à la course à la présidence des États-Unis. Enfin noir comme il y a les beurres et les blancs et les rouges ; les seuls vrais sont les jaunes et, si les insectes hériteront de la Terre, les jaunes ramasseront la civilisation. Les couleurs ne représentent plus que le périmètre social de leur origines biologiques. Nous avons un bagage génétique ; nous avons un bagage générationnel; nous n'avons plus de couleur... et nous aimons à renier les locales!
Hier soir, au débat francophone des chefs canadiens en route vers l'élection du 14 octobre, on a vu attablé à une grande table ovoïde cinq pantins colorés au teint du jour sous la direction d'un non moins clownesque d'un animateur tout aussi peinturluré recevant une réflexion éclatante sur la figure d'un réflecteur luminescent dont la position n'était pas la trouvaille du siècle.

Alors nous obsevâmes cinq noirs pâles, tels cinq spermatozoïdes avides et ambitieux, freluquant allègrement pour traverser la coquille où nichait sur un azur de plexiglace la rouge feuille d'érable, ovule précieux, objet de convoitise. Et on viendra dire que je manque d'imagination...

Et le principe Oreo, vous connaissez ? Il s'agit d'une expression qui définit, aux États-Unis, un Noir riche qui vit comme un Blanc : noir à l'extérieur, blanc à l'intérieur. Dans le prochain débat vice-présidentiel, nous aurons un homme et une femme : parfaits candidats, typique image d'une certaine stupidité naïve propre à tout vice-président; qui, "in the world" veut se battre pour être second sauf un ambitieux plutôt niais ou un gaffeur insécure? Par la suite, la table sera mise pour le vrai débat, celui que tout le monde attend : Obama et McCain. Le Noir contre le Blanc ; mais leur couleur épidermique sera très similaire. On pourra reconnaître le noir par sa physionomie et le blanc de même. Les couleurs se marieront ; bon, je sais, on n'ira pas dans l'étude de la pigmentation, je connais les variations épidermiques et soucutanées des deux peaux négroïde et caucasienne; ici, je parle de couleur. Pour la première fois de leur histoire, les Américains voteront en partie pour une couleur, inexistante, et en partie pour une idéologie tout aussi inexistante. Mais, tout de même, le 4 novembre, ils voteront pour la différence la plus marquante de leur jeune démocratie.

C'est la même chose de ce côté-ci de la frontière. Ils sont tous pareils ; ils disent et se dédisent ; se lancent de la boue plus ou moins poliment et s'essuie délicatement du bout des lèvres. Une fois l'exercice terminé, ils nous regardent tout charme en cherchant dans nos votes la récompense de leur performance. Je ne nie pas leur pouvoir, le réel et le potentiel, mais un pays, comme ces immenses réservoirs flottants que sont les cargos pétroliers, représente une masse beaucoup lourde, avec beaucoup trop de poids mort, pour effectuer rapidement une bifurcation importante. Je n'ai rien vu hier soir pour m'encourager à changer mon vote. Mon vote sera un message sur le futur dans mon pays. J'exercerai mon droit en mon âme et conscience en soupesant plusieurs facteurs : le parti, le chef, le candidat. Avec ce trio, je réfléchirai au futur à court, à moyen et à long terme. Finalement, je reconsidérerai mes convictions personnelles. Au bureau de vote, je placerai mon X intelligemment. Le débat d'hier n'aura, quant à moi, que prouvé l'importance du cirque médiatique que sont devenues les élections canadiennes. Il est de plus en plus difficile d'en apercevoir le bien-fondé, parce que la fabrication d'image prédomine de façon inexorable sur la substance. J'ai connu assez personnellement assez de politiciens provinciaux, fédéraux, et même à l'extérieur du pays, jusqu'en Pologne, pour être convaincu que, s'ils portent un soin vigilant à leur apparence, ils font aussi partie, les vrais, d'une catégorie tout à fait particulière d'individus à l'intérieur desquels on retrouve bien sûr une grande ambition, mais aussi des qualités humaines qui vont au-delà du simple aspect de la fonction publique. Le courage de faire de la politique à son plus haut niveau, celui de la représentation du peuple, relève vraiment de la mission peu importe l'avenue choisie pour dérouler le futur. Aujourd'hui, on a tué cette humanité par nos exigences de rectitude non pas politique, mais médiatique ; la preuve étant que dès qu'un candidat devient naturel et candide, un terrible tollé s'empare du personnage public en l'affligeant des pires calomnies.

La politique, c'est dur. Il faudrait sans doute, la ramener vers son premier mandat, celui de définir notre conduite nationale, et cesser de cancaner sur des dossiers dont on ne connaît à peu près rien et dont personne n'a pris la peine de vérifier l'exactitude, laissant ce soin à des médias qui vivent de ce type déficient et vicieux de dérapages dont ils sont la source, qu'ils cultivent allègrement... et qui fait vendre du papier. Faire confiance aux médias, c'est vouloir croire à l'innocence de sa conjointe aperçu sortant d'une hôtel avec un mec quand elle nous affirme: Tu n'es pas cocu chéri! Quel être un peu intelligent peut encore accorder quelque crédibilité fodamentale à ces articles, dépêches, dossiers et autres écritures, très souvent guère plus élevés que les commentaires du citoyens moyens. Se fier aux médias qui recueillent nos politiciens et les manipulent avec la complicité de ces spécialistes de l'image qui font leur choux gras des artifices, prouve la profonde noirceur informationnelle dans laquelle nous sommes tombés. Nous ne discutons plus sur des textes sources mais sur deux répliques.

Le débat d'hier nous fit voir un spectacle d'Oreo ; de qui est-ce la faute ? Éduquons-nous!




1 octobre 2008

Une évidence obsurcie : l'éclipse cérebrale


À observer l'élection canadienne, on ne peut certainement pas douter de la paresse intellectuelle du pays entier. Je fais le tour régulièrement des médias d'un océan à l'autre; l'absence de débat de fond est sidérante. Pas surprenant que plusieurs regardent et suivent avec plus d'attention au sud de la frontière.

À l'Ouest, dans les sables bitumineux, au centre, à l'Est et au coeur avec les deux valves, la rouge et la bleu, tous les médias confondus s'arrachent les imbécilités, les rumeurs et les futilités. La putain vient de dire la vérité : vite une enquête publique! Les gens n'en demandent pas davantage, bienheureux fossiles ancrés dans une médiocrité tranquille qu'ils voient comme salutaire. Sur cyberpresse aujourd'hui, un éditorialiste mentionne le vide économique de Harper sur lequel Dion ne peut riposter se trouvant dans le chaos; May n'a pas de passé très lourd, comme néophyte pas difficile de se tenir loin des scandales. Layton a beau jeu de lancer des solutions sociales-démocrates à la sauce déficitaire, il veut Stornoway. En cerise sur la sunday, monsieur Duceppe caresse la balance du pouvoir en flattant la xénophobie et le vocabulaire du terroir convaincant que l'antichambre veut bien mieux que le ring. Et pour une fois que le vert est comme le gazon frais où il est défendu de marche...

Nous sommes tous béats. J'ai accepté de participer à un débat sur l'élection américaine le 4 novembre. C'était avant le déclenchement des nôtres. Cette situation, bien qu'elle me rende un peu mal à l'aise, me soulage dans la mesure où je ne saurais sans doute pas rendre aussi intéressante celle de mon pays. Mais j'ai honte tout de même, car cela signale un terrible esprit de colonisé : faire tout un plat d'une élection dans un pays étranger et même pas un hors-d'oeuvre pour celle de mon pays... Hum! Je fais partie des cons qui ne voient rien d'intéressant chez nous. Il faut dire que c'est plus facile de parler des autres que de soi-même! Tout de même.

On parle du débat des chefs demain...

30 septembre 2008

L'identité


Canal Académie présente cette semaine une critique du dernier volume de Michel Serres: Le mal propre : polluer pour s'approprier (http://www.canalacademie.com/Le-mal-propre-Polluer-pour-s.html). Étrange, mais logique, ce principe de l'impossibilité de posséder parce que nous ne pouvons vraiment détacher le bien de son créateur. Il parle entre autres des autos qui ne nous identifient pas, mais qui portent toujours la marque et donc rappelle que ce véhicule appartient encore à la compagnie d'où ils proviennent. Nous ne possédons pas plus les personnes; tout se situe au niveau de la location, du temporaire. La pollution dès lors provient du désir de posséder qui n'est jamais satisfait. On veut s'approprier sans jamais atteindre l'appropriation.

D'ailleurs, Michel Serres offrait en avril dernier, sur ce même canal Académie, un commentaire sur le sens de l'identité reliée à nos appartenances (http://www.canalacademie.com/Corps-et-identite-qui-sommes-nous.html). L'identité est la somme de nos appartenances et nos appartenances sont la somme de toutes nos activités et de nos liens avec les autres, passés et présents. Sa parole est complexe. Je vous invite à l'écouter. Il touche aux ethnies et à la culture. Il mentionne aussi le fait que la langue est l'élément essentiel qui maintient la culture. Il parle ainsi des Gaulois qui se sont latinisés sous le despotisme des Romains et non par leur effort de communiquer avec les conquérants. Il ne s'agit pas nécessairement d'un processus innocent.


Le crachat souille la soupe, le logo l’objet, la signature la page. La
propriété se marque, comme on laisse des traces. D’où le théorème du philosophe
Michel Serres de l’Académie française dans son livre Le mal propre : « le propre
(la propriété) s’acquiert et se conserve par le sale. Mieux : le propre, c’est
le sale ».


Pour Michel Serres, « l’acte de s’approprier est issu d’une origine
animale, éthologique, corporelle, physiologique, organique, vitale… et non d’une
convention ou de quelque droit positif ».

J'ignore si le lien est valable, mais cela me fait penser au matérialisme. Alors, le lien entre notre phobie de la pollution qui nous fait ramasser tous les déchets que nous trouvons, toutes les bouteilles que nous vidons, tous les bouts de papier que nous griffons, et ce mal propre conduirait directement vers le principe de la simplicité volontaire. Plus tu récupères, plus tu gaspilles. Plus tu tentes de purifier l'univers, plus tu la pollues. Intéressant dilemme non?


29 septembre 2008

Little baby don't you cry

Je lis Truman Capote, Breakfast at Tiphany's. Une jolie fille, de toute apparence blonde juste qu'au tréfonds de son âme et de son corps, un écrivain dans sa tête et pas encore ailleurs et un tenancier de petit bar de « neighbourhood » dont les grandes métropoles ont le secret bien gardé : pour initiés seulement. Que quelques pages de lues; on attend pour le verdict final. Je tente pour l'instant de connecter l'auteur de cette nouvelle avec le visage du film. Pour moi, Capote est l'acteur à la voix famélique. J'ai lu quelque part qu'il est absolument admiré par certains grands auteurs contemporains pour son rythme syntaxique; ce rythme ressemble à une musique. Il est très accentué. Des phrases incomplètes qui épousent l'humeur du moment. Capote possède une simplicité d'écriture qui côtoie le parler, suit efficacement les méandres psychologiques en présence. On s'en reparlera quand j'aurai terminé...


Il faut une montagne de courage pour s'enfouir dans New York seul, sans le sou et tenter de survivre en attendant de devenir un écrivain assez lu pour gagner sa vie. Il y a un carpe diem chronique dans cette attitude. Je mentionnais à un ami voilà quelque temps que nous sommes toujours le Père Goriot de quelqu'un. On est aussi sans doute le Frankenstein d'une société. Le monstre ou le docteur, ça revient au même. Capote dans sa chambre miteuse d'un hôtel malfamé de New York décrivant son fictif écrivain vivant dans une miteuse chambre de la East Side observant une femme débonnaire vivant juste au dessus qui pourrait devenir sa nymphe. Tout est sordide comme ces appartements de pauvres dans les films de centre-ville, tout est beau comme les personnages de ces mêmes films qui sourient en écrasant quelque coquerelle qui se promène sur la table. Je me souviens d'une nuit passée sur un de ces vieux sofas en velours noir enveloppé dans une vieille couverture qui sentait les années; je m'étais soudainement réveillé et entendu des cliquetis sur la table de cuisine à quelques pas de moi; m'étirant la tête, je vis dans un rayon de lune traversant la fenêtre, quelques souris piqueniquant les restes du souper. De fatigue, mais aussi d'acceptation, je rentrai ma tête dans le coussin, tirai la couverture jusqu'à mon menton, souris et me rendormis : vivre et laisser vivre! Le bonheur n'est jamais au même endroit; et il n'est définitivement jamais là où l'autre nous dit qu'il est. Capote avait compris ça. Seul dans son trou, il a vécu sa vie et les autres ont fini par le voir et le suivre. À l'inverse, les monnayables ne sont que des feuilles de papier à recycler.


Alors little baby don't cry!

Argenta


Un long voyage seul dans la Honda Civic. Parti tôt le matin, laissant femme et enfant qui viendrait plus tard en avion. Le premier arrêt prévu est Pembroke, une centaine de milles passé Ottawa. Une journée sans histoire. Le Civic est neuve; quelques centaines de kilomètres tout au plus. La journée est ensoleillée. On est fin juin; trente ans et sans emploi. Je viens de terminer un contrat d'assistant de recherche; je termine la rédaction d'un mémoire de maîtrise; j'ai une fille de deux et demi... Important les demis à deux ans! Ma conjointe et moi avons décidé, en coup de tête, d'accepter un poste d'enseignant à Argenta Friend School, à Argenta, en Colombie britannique. Argenta est une petite communauté d'une centaine de personnes pour la plupart des Quakers, des membres de la Society of Friends. Ils sont venus de l'Ouest, de Californie, les Stevenson, les Pollards, les Vallentine, les Farleys, pour établir une communauté de survivance dans la nature et éviter aussi la participation à la guerre de Corée: 1951. Ils avaient choisi ce site à cause de la vieille route de prospection; il y avait déjà eu une explotiation minière restée très rudimentaire à cet endroit. Ils avaient aussi aimé la présence du lac Kootenay; idylique les Rocheuses, le lac, les "flats", le profond ravin du Suicide Trail, et les deux autres communautés à quelques dizaines de milles, les Doukhabors à l'est et les hillbillies à l'ouest.

Le confort: auto neuve; seul à bord; quelques snacks à droite comme passger; mes cassettes rock progressif nettement rangées. Pink Floyd, Dark side of the moon. Hum! Sourire. En fin d'après-midi, j'entre dans le parc provincial Algonquin. Il vente sec sur le bord de Coon Lake. Je plante ma tente. Je soupe d'un morceau de miche acheté en route, de vieux cheddar et de ma bière. Le lac est devant moi; le soleil se couche à ma gauche; je m'appuie sur mon havresac de surplus d'armée. À côté, les voisins s'émoustillent un peu; des enfants courrent sur la plage. Je lis Ducharme, l'Océantume. Comme un satellite en espace, je regarde, j'orbite autour des gens. L'étrangeté d'être parti, c'est la distance qui s'établit entre soi et les autres. Une sorte de déresponsabilisation.

21 h 00. Je plie bagages. Je ferme le mollusque. Tout mon univers sur 4 mètres carrés. J'étends mon sac de couchage. Baisse la fermeture à glissière. Clos la tente! Relève les pans des fenêtres pour voir le lac. Je coule dans le coton brossé. Je sais bien que je ne dormirai pas. les mains sous la tête, je souris. Les autres s'en vont se doucher, se brosser, évacuer et torcher les mômes. Puer à peu, on n'entend que la nature: vagues qui lèchent la grève, huard qui chante, vent dans les branches. Iode Ssouvie... Il faut lire Ducharme au moins une fois dans sa vie. Il fait partie de la littérature psychédélique qui suivit de près la cassure du Refus global.

Dans ma tente, un grand soupir froid. Je serre les jambes dans mon sac. Le nylon froisse. Je fixe le toit, puis le lac. Dans une bulle, comme un foetus, couvert de toile à entendre, à chercher du son. Pas de cordon, pas de liquide amiotique; un canevas pour dessiner du passé; une humidité pour demain.
J'ai raté mon entrée sur le marché du travail. Je suis en train de parcourir le purgatoire. À la recherche du futur. Pour aujourd'hui. Seul. Comme d'habitude. Volà quelques mois, je me suis barricadé comme un enfant dans le bureau à la maison. Je ne sors jamais du placenta. Le nylon crisse. Je n'ose jamais. Toujours la sécurité. Dehors, c'est le silence. Il n'y a que dans ma tête que ça crie. Que ça crie fort. Conversation imaginaire que j'entretiens pour éviter l'absence. J'attends patiemment et calmement le matin, le lever du soleil, les oiseaux... et la replacotage des tentes voisines.

Vers Argenta, le paradis de 1981.

26 septembre 2008

Le goût de vivre ... par l'écriture

La vie goûte bon. Cette fin de semaine chaude de septembre apporte beaucoup de sourires. La chaleur n'est pas qu'à l'extérieur. Je connais bien le besoin de parler. Je l'éprouve souvent; remarquez que comme professeur, excellente chose! Mais écrire...

On écrit dans le malheur, dans l'agressivité, dans le négatif. Facile de débourrer les frustrations. Je lisais dernièrement le livre de Noah Richler, Here my Canada, what's yours. Bon livre dans l'ensemble; encensé par les critiques comme s'ils devaient un vingt à Mordicai... Certains passages sont excellents. Toute la thématique, qui va et revient comme le vent des Îles à travers tout le livre, sur les peuples autochtones et beaucoup ceux du Grand Nord est majestueuse. Le livre y prend sa vraie mesure. Il sort aussi la Prairie des boules à mites. Toujours est-il qu'il relate les paroles d'un groupe d'auteurs de Terre-Neuve dans lequel les auteurs s'entendent pour dire qu'un écrivain doit accepter la possibilité de créer le chaos dans son entourage immédiat, même dans sa famille, car ses personnages en sont issus et cela cause des frictions. Qui dit écriture publique dit confrontation. Vraiment!

Cet après-midi, j'écris comme je parlerais si j'avais un interlocuteur marchant sur un sentier dans la forêt, ma sempiternelle caméra à mon épaule. Il écoute patiemment mes cascades. Ce jour-là, sans emploi, j'avais dévalé la route jusqu'au parc national de la Mauricie. J'avais pris un sentier et traînais mes bottes de marche dans le suc boisé de l'haleine du bois. Il faisait gris. Un tas d'eau en suspension. Je me suis arrêté au pied d'un arbre, n'importe lequel, peu importe; je l'ai enlacé; appuyé ma joue contre son écorce et j'ai parlé à mon défunt grand-père. Quelques instants seulement... J'ai repris ma route un peu soulagé. Il écoute encore. Il me suit. Quelques grognements, quelques syllabes, une phrase ou deux de temps à autre. Suffit!

Le bien des paroles de bois sans témoin ou avec un alter ego, c'est la discrétion assurée. Tout le contraire du blogue. Là, on est dans un bouillon. Remarquez qu'il est facile d'ignorer l'auditoire. C'est la bouteille à la mer. Les filles dorment en bas. À leur réveil, je cesserai cette conversation. Je vais me servir du temps. On the rock! Je vais me payer le luxe de quelques phrases encore. Je ne me demanderai ni quoi dire ni comment le faire. Au va! Comme si je voulais commencer à vraiment écrire un long texte. Comme si j'avais la discipline. Comme si j'avais le courage de tout reprendre pas le commencement : « Il était une fois... » Trois points de suspension qui disent tout. Je devrais faire un conte qui commence par « Il fut une fois... » un petit garçon naïf à qui on refusa de servir la messe parce qu'il n'y avait pas de soutanes assez petites pour lui. Et au retour à la maison, dépité par ce refus, sans doute d'avoir été repoussé là où ses amis avaient été acceptés, possiblement aussi parce que cela décevait son père catholique de voir son fils rejeter par l'Église. Il n'en a pas parlé, bien sûr! Mais la rasion du refus n'était autre que lui, ce père, collé sur cette Église pédophile comme Jésus à sa croix. Jamais ni le curé ni les vicaires n'oseraient accepter dans leur environnement comme petits serviteurs de messe le fils de l'acolyte.


Fiction; friction; faction. Tous les faits et les personnages présentés dans ce texte sont « fictionnels » et inventés. Les plus grands fantasmes voient le jour dans la solitude. Les plus grandes solitudes se réservent des secrets... ceux de la confession et de la culpabilité. Avec l'âge, le regard sur les choses devient comme le vol des guêpes à l'automne : ralenti, engourdi et moins efficace. Toutefois, si on réussit à retourner au nid, il devient plus efficace. En fin de saison, même les ouvrières sortent pour participer à la récolte. Foire et poids du nombre juste avant l'hibernation!

J'entends des voix en bas... À la prochaine!





Vendredi saint


Le seul vendredi saint du calendrier se situe juste avant Pâques dans la religion catholique. Saint, à l'origine, et encore aujourd'hui habituellement, signifie bénie, pur, parfait, consacré. Bien curieux que l'Église ait nommé ces quelques jours précédant ses Pâques, saint; pourtant, ce sont à coup sûr, les plus sanglants et les plus pénibles journées de son Dieu. Comme le faisait remarquer un musulman, comment les catholiques peuvent-ils adorer et adopter comme modèle de vie un dieu souvent représenté en sang, l'air contrit, quand ce n'est pas sur la croix en train d'expirer ; le nôtre est souriant... voire débonnaire. Vive la passion. Encore une fois, l'Église qui nous vole un autre mot. Vous connaissez un mot plus élégiaque et plus savoureux que passion? Ah non ! Souffrance, sang, injustice... Pauvres catholiques !


Je vous annonce que la vaste majorité de mes vendredis sont saints. Ils sont merveilleusement la porte sur quelques journées de bonheur et de paix. Ils sont aussi l'orée de beaucoup de passion : les miennes, ma famille, mes projets, mes lectures, mes vins, tous mes bonheurs ! Vive la sainteté ! Vive la passion !

25 septembre 2008

Des sourires


Je sors de classe. Je viens de soumettre mes étudiants de commercialisation de la mode, d'Intervention en loisirs, de Gestion hôtelière et d'Éducation spécialisée à deux contrôles sur le XVIe siècle : un sur l'histoire et un autre sur la littérature de ce siècle merveilleux. Le livre que j'utilise pour mon cours est l'oeuvre de Miclel Laurin. J'admire le livre, le connaître, j'admirerais sans doute le personnage aussi... La masse d'information à transmettre défie toujours le professeur; comment maintenir le rythme et l'intérêt? Pas évident! Toutefois, j'aime à faire mentir les détracteurs. Mes jeunes sont curieux; ils sont studieux; ils sont alertes; ils sont capables de mémoire et de raisonnement dans la mesure où la matière est bien cernée.

Depuis deux semaines, nous avons épluché cette Renaissance. Fouillis incroyable de découvertes scientifiques, technologiques, culturelles, philosophiques, littéraires, artistiques et religieuses. Des illuminés, il en faut bien, ont suivi la filière italienne des savants de Byzance qui ont fui Constantinople pour se réfugier à Rome. Continuant son cheminement vers le nord, vers la France entre autres, cette masse de connaissances des livres de l'Antiquité a fait apparaître un merveilleux raccourci vers de nouvelles connaissances. À la suite des trouvailles mécaniques du Moyen Âge, ces informations allaient donner un essor fabuleux à la toute jeune France. C'est sur ce chemin que j'ai entraîné mes étudiants. Et ils ont suivi. Pas gratuitement, bien sûr! Le bénévolat du savoir a disparu pour cette génération. Je paie et, d'autant plus que mon collège est privé, j'exige. Mais contrairement à la mythique approche client, je crois que les étudiants veulent avoir la certitude d'un gain; ils ne désirent pas nécessairement être seuls juges des savoirs, ils exigent une clarté des acquis et de ses vérifications. Mes étudiants avaient une excellente raison de demeurer attentifs : un contrôle vérifierait leur attention. Cette situation m'a toutefois permis de leur expliquer des dynamiques très contemporaines qui s'accrochaient aux siècles passés. Ils riaient avec moi de lire les incongruités de Rabelais; ils sourcillaient devant les gauloiseries de Marot ou les invitations très directes de Louise Labbé à ses amants.

Le plaisir d'apprendre n'a pas disparu chez les jeunes. C'est l'attitude qui a changé. Si la formation est devenue désormais un partenariat, elle est aussi devenue une avenue de rentabilité. Dans la société contemporaine, les rétractions sont devenues rapides; on privilégie d'ailleurs la rapidité à l'exactitude : erreur oui, doute non! L'inconfort se trouve devant l'inconnu. Les pourquoi trouvent leur source dans l'inutilité. Nous voyons parfois dans ce jugement d'inutilité un manque de curiosité; nous avons peut-être tort; il s'agit peut-être de recherche de pertinence. Si nous parvenons à ce niveau de relation où la pertinence rencontre les événements du passé, alors les sourires et les yeux s'allument. Tout n'est pas réglé avec l'établissement de ce rapport immédiaté - pertinence -histoire -culture, mais nous pouvons y voir percer une solution.

Tant que je pourrai faire rire mes étudiants avec mes histoires des siècles passés, tant qu'ils verront en moi un trait d'union entre les fantômes des grands esprits de la culture et leur quotidienneté, il y aura aussi un sourire sur mes lèvres à la sortie de ma classe.

À la sortie de leurs deux contrôles, ce matin et cet après-midi, ils sont sortis en souriant. Non, bon, pas tous! Mais une large majorité d’entre eux. Ils étaient fiers d’eux; fiers aussi sans doute d’avoir relevé le défi de deux questionnaires sur la Renaissance. J’ai presque terminé la correction; la moyenne est bien au-delà de 80 %. Ils ont raison d’être fiers! On a raison d’avoir du plaisir ensemble.

Pour les intéressés, je laisse ici les deux questionnaires en question.

Bonne lecture!

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XVIe historique
1) Nommez les deux villes où la Renaissance débute.
a) Paris
b) Rome
c) Madrid
d) Venise
e) Florence
2) Quel événement marque la fin de l'espoir d'hégémonie du monde chrétien?
a) La chute de Constantinople
b) La victoire des Croisés
c) La découverte des Amériques
3) Associez l'événement et le personnage et le pays d'origine:
a) Découverte de Cuba
b) Invention de l'imprimerie en Europe
c) Voyage à Cathay (Chine)
d) Voyage aux Indes
e) Conquête du Mexique
f) Prise de possession du territoire de la Nouvelle-Angleterre
i) Cortès
ii) Vasco de Gama
iii) Jean Cabot
iv) Christophe Colomb
v) Gutenberg
vi) Marco Polo
(1) Angleterre
(2) Italie
(3) Espagne
(4) Allemagne
(5) Portugal
4) Le XVIe siècle se démarque donc par une véritable boulimie du savoir. Complétez le texte à l'aide de la liste de mots:
L'homme de la _________________ veut faire reculer les _________________ de la connaissance et se libérer des ______________ et des servitudes du Moyen Âge, des ______ qui l'empêchaient d'être maître de son destin. Il croit même que l'homme parviendra éventuellement au _______________, d'où une volonté très marquée de __________, de classifier et de noter tout ce que l'Univers offre à observer et à ________. S'ensuit un explosion technique et scientifique – point de départ des sciences modernes – basée non plus sur le principe d'autorité mais sur l'___________. Outre les nouvelles techniques de ___________ qui rendent possibles les voyages de découverte, les progrès de l'___________ révolutionnent la diffusion du savoir, et la _____________ progresse à pas de géant: Léonard de Vinci étudie l'
_____________ sous tous ses angles; Gabriel Fallope découvre les __________ qui portent maintenant son nom; Girolamo Fracastoro se penche sur le _______ et émet l'hypothèse selon laquelle les maladies ________ se transmettent par l'intermédiaire de ____________ invisibles. En astronomie, Copernic, contredisant les enseignements de l'________, avance sa théorie de l'_____________: ce n'est pas la Terre qui occupe le centre de l'univers, mais le ________ autour duquel elle tourne. Le « __________ » exigeant que toute théorie soit conforme à celle du __________, l'hypothèse de Bernard Palissy, selon laquelle la présence de _________ d'animaux marins à des kilomètres du rivage indique le ___________ des océans, vaudra à son auteur d'être emprisonné à la ___________. L'Église soutient en effet que tous ces fossiles sont en fait des ___________ jugés indignes par _______ au moment du Déluge et abandonnés à leur triste sort.
a) Navigation
b) Bastille
c) savoir absolu
d) micro-organismes
e) fossiles
f) superstitions
g) Soleil
h) typhus
i) Renaissance
j) trompes
k) Déluge
l) anatomie
m) animaux
n) imprimerie
o) analyser
p) contagieuses
q) limites
r) héliocentrisme
s) frayeurs
t) bon sens
u) médecine
v) Dieu
w) répertorier
x) déplacement
y) expérimentation
z) Église
5) Entre le début du XVIe siècle et la fin du XVIIe siècle, combien de personnes, surtout des femmes, ont été accusées de sorcellerie et brûlées vives?
a) 10 000
b) 8 000
c) 30 000
d) 40 000
6) Quel est l'ancêtre de la chimie moderne; cette pseudoscience voulait entre autres fabriquer de l'or à l'aide de la pierre philosophale.
a) La magie noire
b) Le spiritisme
c) L'alchimie
d) La chimie
7) La mise à feu et à sang des deux civilisations Aztèque et Maya par les espagnols entraîne une autre abomination humaine; quelle est-elle?
a) La famine
b) L'esclavage
c) La corruption religieuse
d) La destruction de la forêt amazonienne
8) Durant le XVIe siècle, la noblesse d'argent supplante la noblesse de sang.
a) Vrai
b) Faux
9) La concentration des pouvoirs autour du roi entraîne inexorablement vers quelle forme d'autorité?
a) L'absolutisme royal
b) La démocratie
c) L'anarchie
10) Quel pays s'engage le premier dans le mouvement de la Renaissance grâce à plusieurs savants byzantins qui vont s'y installer?
a) La France
b) L'Italie
c) L'Espagne
d) L'Angleterre
11) Les Médicis, les Sforza et les Este sont des familles fabuleusement riches qui s'entourent des plus célèbres créateurs artistiques de l'époque. Quel est le secteur d'activité de ces grandes familles bourgeoises?
a) L'industrie culturelle
b) L'industrie manufacturière
c) Les chantiers navals
d) Le système bancaire
12) Quel est le nom de la philosophie mise de l'avant par l'homme de la Renaissance grâce à laquelle on redécouvre le sens du plaisir, le besoin de jouir et de faire appel à chacun de ses sens?
a) Le stoïcisme
b) Le carpe diem
c) L'ergo sum
d) L'habeas corpus
13) Qui sont les responsables de l'affaire des placards?
a) Les protestants
b) Les catholiques
c) Les sorcières
d) Les nobles
14) De 1562 à 1598, quelle tuerie innommable remplit les cimetières et déchire les familles?
a) La guerre de Cent Ans
b) La guerre de Sécession
c) La bataille de Trafalgar
d) Les guerres de Religion
15) À la Renaissance, deux conceptions de la langue française s'affrontent: l'approche de l'orthographe et l'approche de la prononciation. Laquelle a gagné?
a) L'orthographe
b) La prononciation
16) Associez l'auteur, l'œuvre et son pays d'origine:
a) Shakespeare
b) Don Quichotte
c) Dante
i) Roméo et Juliette
ii) La Divine Comédie
iii) Cervantès
(1) Espagne
(2) Italie
(3) Angleterre

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Le XVIe littéraire
1. Quel système de subvention aux arts François I a-t-il instauré?
a. Le mécénat
b. Le Conseil des Arts
c. Le manifeste de la culture
2. Ce nouveau genre littéraire est héritier du développement et de l’engouement pour la philosophie.
a. Le théâtre
b. La poésie
c. L’essai
d. Le roman d’aventure
3. Le théâtre français n’a pas vraiment de personnalité propre. Quel mouvement demeure très populaire entre autres grâce à des personnages typés comme Polichinelle et Arlequin?
a. Le vaudeville
b. La commedia dell’arte
c. La comédie humaine
d. La farce médiévale
4. Quel est le nom de la première école littéraire?
a. Le Carpe diem
b. Les romantiques
c. La Pléiade
d. Le surréalisme
5. Quelle est le titre du livre qui représente le manifeste de ce courant littéraire?
a. Défense de la liberté d’expression
b. Candide
c. Gargantua
d. Défense et Illustration de la langue française
6. Identifiez les cinq principes consignés dans le manifeste de Joachim du Bellay :
a. Les poètes doivent s’établir à Rome pour mieux décrire les Trésors de l’Antiquité.
b. On souligne l’aspect élitiste de la poésie.
c. Le poète ne doit pas hésiter à imiter les anciens.
d. Les philosophes sont encouragés à écrire en latin.
e. On abandonne les genres littéraires associés au Moyen Âge au profit du sonnet qui devient la forme poétique dominante.
f. L’alexandrin renaît et la poésie recourt de plus en plus aux figures de style pour bien se distinguer de la prose.
g. Il faut convaincre le roi de cesser d’aider les artistes.
h. Le Pléiade s’engage à défendre la langue française contre l’influence des textes anciens et la résurgence du latin.
7. Quelle phrase ne cadre pas avec l’auteure Louise Labbé?
a. Installée à Marseille, elle prend soin de sa famille et écrit secrètement des vers pour son amant.
b. Belle et forte de caractère, passionnée d’escrime et d’équitation, elle n’hésite pas à se mettre en scène pour exprimer les élans de sa passion.
c. Sur le ton de la confidence, elle recrée des épisodes de sa vie amoureuse où l’homme aimé est toujours subordonné à l’amour qu’elle lui porte.
d. Cette représentation d’un homme objet lui attirera les malveillances de certains poètes masculins.
e. Dans des sonnets d’une grande sensualité, teintée parfois d’érotisme, elle dit l’allégresse de ses amours.
8. Quel poète de la Renaissance est souvent menacé en raison de ses mœurs et suspecté d’hérésie?
a. Clément de la Rose
b. Rabelais
c. Rutebeuf
d. Marot
e. Chrétien de Troyes
9. Qui a écrit le poème le Beau Voyage qui commence par le célèbre vers suivant : « Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage »?
a. Ronsard
b. Du Bellay
c. Villon
d. Marot
e. De Pizan
10. Qui a écrit ce vers du poème À Hélène… : « Quand vous serez bien vieille, au soir à la chandelle »?
a. Ronsard
b. Baudelaire
c. Verlaine
d. Nelligan
11. Marguerite de Navarre, sœur de François I et épouse du roi de Navarre, est devenue célèbre grâce à son livre :
a. Le Décameron
b. L’Heptaméron
c. Le quinquaméron
d. L’Octaméron
12. François Rabelais, reconnu comme un des plus grands médecins du royaume, fut moine, professeur d’anatomie et grand voyageur. Quels sont les trois personnages qui l’ont rendu célèbre?
a. Gargantua
b. Candide
c. Grandgousier
d. Pantagruel
e. Grandmaison
f. Renard
g. Arlequin
13. Quelle phrase définit le mieux l’Essai?
a. Le véhicule de la raison et du cœur.
b. Le véhicule des lois et de l’étiquette.
c. Le véhicule de la pensée humaniste.
d. Le véhicule du romanesque.
e. Le véhicule des arts.
14. Qui est le plus grand essayiste du XVIe siècle?
a. Montaigne
b. Villon
c. Rousseau
d. Voltaire
e. Montesquieu


23 septembre 2008

Quelques mots pour fêter l'automne...

Trois longues journées! Longues? Longues au cadran pas dans la tête. Elles passèrent relativement vite tout compte fait. Alors courtes parce que plaisantes; longues parce que peu de sommeil pour les enrober. Voilà l'automne, non? Longue à cause de ses nuits qui déteignent sur le jour, de ses nuages non plus passagers, mais ambiants, de son humidité froide givrée comme le boc du congélateur qui reçoit la bière, puis humide collant quand la soleil s'invite pour terminer le jour, le temps de faire monter la rosée vaporeuse quelques dizaines de pieds avant que son coucher ne la fasse retomber brutalement pour le brunante.

Cette année, changement de scénario. Un voyage "pédagogique" à Toronto et à Niagara Falls avec les étudiants en Tourisme et en Gestion hôtelière du collège m'a éloigné de ce scénario automnal grisâtre. Quatre professeurs et une cinquantaine d'étudiants à l'intérieur d'un autobus pour plus de 16 heures en tout représente un défi en soi. Il faut bien oublier certains privilèges comme le sommeil paisible et les pensées solitaires. Le rire et les discussions les remplacent avantageusement. Quelques heures ici, quelques arrêts là, certains événements s'ancrent plus profondément que d'autres.

Une pizza à 1 h 30 du matin avec une bière en cannette sur le bord du trottoir peuplé de quelques résidus étyliques des last calls. Facile de reculer dans le temps avec un tel scénario. On se fout pas mal du goût de la bouffe ou de la fraîcheur de la bière: des calories et du liquide! Ça suffit!

Un lever de soleil à l'aube parce que tu as dormi sur le pépéroni et que tu n'es pas dans ton lit.... Un se rase, l'autre s'étire, j'en profite pour regarder dehors et voilà le résultat: hallucination et carnaval! Les couleurs explosent. la ville ne dort pas, elle est soumise par le feu du jour. Ce n'est plus l'automne, c'est la fin du monde. Et juste entre la tour et la roue, la majesté qui s'imisce, avec une rapidité incroyable: en deux minutes le voilà sorti; le voilà qui brûle tout, jaunit tout, bleuira tantôt, à nouveau, d'un drabe normal notre azur quotidien. Je vivrais bien avec ces jets et ces strates. C'est, je ne sais pourquoi, Mars!


Puis, le jour amène le vin. On frôle la rivière Niagara pendant quelques minutes. Au pied de ses falaises, encastrées entre elle et lui, la rivière sauvage et le lac massif, des vignes; des milliers, des dizaines de milliers, des porteur de baies à vin. Entre les doigts leurs raisins sont des billes chaudes. Ils sont tendres sous la pression du pouce et de l'index; ils suent du sucre collant même sans crever leur peau tendue et ferme. Ils font penser à des bulles de bain qui collent; plus volumineux, des oeufs de saumon cueillis chez la mère qui vient de rendre la vie. Ce petit fruit est bien mystérieux. Parmi les plus vieux aliments comestibles, il pousse seul serré sur une collectivité. Il ira vers l'osmose délirante avec des centaines de milliers de ses congénères. Il mijotera quelques années, quelques mois, puis renaîtra pour s'accomplir sous une personnalité totalement transformée. Le papillon est végétal cette fois; la nymphe aussi!







Après le feu céleste, le feu bacchéen, le feu nautique. L'oeil est dérangé par l'immensité du phénomène. Et naturellement, il faut faire abstraction de tout l'appareillage imbécile avec lequel on l'accouple. La chute ne peut être qu'elle-même. D'où que l'on se place pour l'observer, elle fascine. Son ampleur est difficile à calibrer. Son empire est tellement gigantesque, qu'il englobe toute notre imagination.

Elle coule. Elle se brise. Elle ne se calme que plusieurs kilomètres plus loin. Elle est la relation publique des mers intérieures avec la civilisation: indomptable, insoumise, impalpable. Elle est une présence incontournable qui menace d'absence. Elle inocule chaque esprit de sa destruction.

J'aime mon automne cette année.

17 septembre 2008

L'enseignement sans écran

L'enseignement ne rivalise avec aucune autre profession : elle règne en maître absolu et... éclairé! La publicité au poteau! La réalité à l'affiche! L'acte d'enseigner demeure le geste humanisant le plus posé de par le monde. Jour après jour, tout le long des mois année après année, des professeurs de tous les niveaux travaillent d'arrache-pied à faire comprendre le monde et ses merveilles. De mille façons, à des milliers de cerveaux différents quelque part et semblable dans leur intimité biologique. Aucune profession ne détient de pouvoir comparable et personne n'a le droit de mettre en doute la volonté des artisans qui ont le courage de retourner à la lutte contre l'ignorance.

Les journalistes, appuyés par certains professeurs et des sondages au financement tordu et aux interprétations sensationnalistes, ne cessent de pourfendre les qualités et compétences de nos étudiants. C'est la mode! Rien n'est bon... La santé fout le camp; les politiciens sont véreux; l'économie défaille; les familles s'émiettent; les assistés sociaux végètent... La liste pourrait s'allonger. Je vais danser à un autre archet, car selon moi, ces malaises dont les médias font des choux gras ne valent pas plus que la valeur de récupération du papier sur lesquels ils sont imprimés.

Mon abandon des instruments informatiques cette année, rend encore plus évident cette relation humaine essentielle au progrès humain. Il faut chercher toujours à l'améliorer; il faut aussi cesser d'en critiquer aléatoirement les résultats de façon étroite.

Mon opinion ne compte pas statistiquement. J'en suis bien aise! Elle n'en reflète pas moins ma réalité. Elle est donc, à défaut d'être représentative, véridique.

Cette session d'automne 2008 : quatre groupes; 112 étudiants; deux du secteur professionnel et un de Science nature; un dernier mixte secteur professionnel et préuniversitaire. Nous entamons présentement la cinquième semaine. Comme je le mentionnais dans l'article précédent, je n'utilise plus l'informatique, je rencontre mes étudiants quatre heures par semaine par groupe en vue de l'atteinte de la compétence finale du cours de français 601-101: la rédaction d'une analyse littéraire de 700 mots.

Je divisais, les années précédentes, les quatre en deux blocs : deux heures en classe traditionnelle et deux heures dans le laboratoire informatique. Les heures en classe servaient habituellement à la présentation de la théorie littéraire sur l'analyse littéraire et à des ateliers; j'utilisais le laboratoire pour du travail en ligne sur l'histoire littéraire et les extraits de diverses époques. Cette session-ci, tout se fait en classe.

Ce retour au magistral confirme mon glissement depuis dix ans vers une presque obsession des instruments d'enseignement. Je me souviens d'une conversation à un congrès sur les technologies de l'information avec un futur ingénieur pédagogique. Je découvrais que l'atteinte des compétences dont me parlait mon directeur des Études, celle-là même qui m'obligeait à revoir de fond en comble mes méthodes de transmission du savoir, s'appuyait sur une science exacte dans le secteur de l'ingénierie. Moi, le roi des cancres en cartésianisme, je me mis à scruter avec ce futur maître du savoir savoir les fondements de cette grotte. Je m'aperçus rapidement que si les stalactites pullulaient, les stalagmites peinaient; en effet, les théories fusaient de partout, humectaient la moindre crevasse, dégouttaient sur tout en bas sans réserve, sans discrimination; si la projection de son application se vendait assez bien chez les programmeurs, rien n'existait pour le travailleur en classe. Ce fut, toutefois, un encouragement extraordinaire pour poursuivre le chemin que je traçais pour mon enseignement littéraire. J'y entrevoyais mille et une avenues fertiles pour mes activités de formation. Dix ans plus tard, après avoir entendu les sirènes, combattu le Minotaure, traversé le Charron, je n'ai jamais pu séduire Pénélope. Elle jouait allègrement à Warcraft en ligne avec les Olympiens.

Je revins donc tout penaud dans mon petit Lyré. En classe, devant de bonnes vingtaines d'individus, je ressasse les notions historiques et littéraires des siècles passés. Je joue à la vedette. Mon public captif ne se trouve pas en communication grâce à un écran. Le contact est direct et immédiat; pour reprendre la terminologie informatique, nous sommes en synchrone; nous sommes aussi in vivo. À la fin de mes cours, je me souris souvent intérieurement. J'ai aimé ma performance. Je crois qu'ils ont appris quelque chose; ils ont posé des questions; nous avons communiqué à l'aide de la bonne vieille méthode : la voix et les oreilles. On n’a pas construit Rome en quelques jours, mais tout y mène. Reviendrai-je un jour au virtuel? J'y suis toujours, vous en êtes la preuve. Pour mon enseignement? Je crois qu'il reste du chemin à faire avant trouver la solution idéale entre la personne et la machine. Je ne retournerai sûrement pas sur le même sentier. La solution est ailleurs. Le virtuel n'est pas fait pour les notions traditionnelles. Il faut l'utiliser pour des acquisitions différentes, concurrentes, réactionnelles. On verra...

16 septembre 2008

Le luxe relativisé


Il fait soleil. Ce matin, je me suis arrêté au Parc portuaire pour prendre quelques photos. Un luxe : mardi matin, sur un des bancs, un vieillard assis au soleil; un plus jeune promenant son chien. Presque personne! Et moi avec mon appareil photo à faire quelques clichés sans prétention. Je n'ai pas de cours le mardi; j'en profite pour corriger et préparer des cours et lire.

Au début de la session d'automne, j'ai totalement délaissé l'informatique, mon compagnon, plutôt drogue, que j'utilisais de plus en plus systématiquement depuis dix ans. Je me sens en vacances. Ne plus travailler dans le sous-sol avec le ronronnement des trente ordinateurs me soulage déjà; ne plus avoir à répondre à des dizaines de courriels de mes étudiants me libère; ne plus me préoccuper de suivre le cheminement individuellement de chacun me redonne mes soirées; toutes les mises en ligne de tous les documents et la programmation de tous les contrôles et examens en plus de leur mise en ligne, la cerise sur le gâteau. D'esclave, je deviens maître de mon horaire. Quelques photos sur le quai un mardi matin, hum! Une promenade au Luxembourg sous la bise de fin septembre. Quel luxe!

Je rêve de gagner une somme mirobolante à la loterie. Je place mes richesses imaginaires. Je jalouse les bourgeois qui déroulent leurs vacances en devises étrangères et en îles du Pacifique. Je n'ai pas accès à ce genre de luxe. J'y aspire, je n'en fais pas une affaire de survie. L'argent que je gagne ne me suffit pas; j'en veux plus pour profiter plus; toutefois, je ne veux pas plus de responsabilités, ni plus de temps consacré au travail — consacré, terme intéressant faisant penser à la sacralisation de la vie qui passe. Si j'avais une fortune, j'écrirais plus et je me promènerais plus souvent; et, bien sûr, je voyagerais plus souvent. Ma vie n'est pas mal pour autant. J'en ai déjà plus que beaucoup, plus que plusieurs, pas plus que j'en voudrais...

Mes voyages m'amèneraient aux confins de mon imagination. Trois-Rivières fut le berceau de plusieurs explorateurs intrépides. Mon préféré est Radisson; à cheval entre le nomadisme et la finance. Très beau personnage Radisson. Il ne s'est pas rendu aux Rocheuses comme son concitoyen Lavérendrye, mais le sud des Grands Lacs n'avait plus de secrets pour lui. Je relirais On the road de Kerouac et L'Oeuvre au noir de Yourcenar. Le premier pour un itinéraire et le deuxième pour le rêve. Puis je mettrais Ivanhoe et Les trois mousquetaires, pour le héros et pour la quête. Mais dans ma besace, dans la poche de façade, une version usée en Livre de Poche de L'Homme sans qualité de Musil pour les longues nuits en solitaire dans les campements de fortune. Dieu que la lecture est bonne!

Je suis riche! Je suis en vacances puisque j'aime ma profession; j'aime la vie parce que j'aime ma conjointe; j'aime mon futur dans le regard de mes enfants. Ma vie n'est pas faite que d'espoir, il y a plein de tout de suite.

J'imagine Radisson à la fin de sa journée. Aussi difficile qu'elle ait pu être, il dormait bien. Sur la rocaille ou le lit de sapinage, dans une caverne ou un tipi, toujours entouré de son canot et de son ravitaillement, la nuit l'envahissait jusqu'à l'aurore. Son lendemain ne se révélait jamais avant l'heure. Pourtant, le doute ne faisait pas partie de ses questionnements : quelle direction? quel rapide? quel portage? quelle bourgade? quel animal? quel gain? Pas de peut-être! En avant, en aval ou en amont, vers le lointain ou vers la maison, en avant, toujours, à se prouver face à cette nature où il trouvait une formidable compréhension mutuelle.


Il fait soleil. Ce matin, je me suis arrêté au Parc portuaire pour prendre quelques photos. Un luxe: mardi matin, sur un des bancs, un vieillards assis au soleil; un plus jeune promenant son chien. Presque personne! Et moi avec mon appareil photo à faire quelques clichés sans prétention. Je n'ai pas de cours le mardi; j'en profite pour corriger et préparer des cours et lire.


Au début de la session d'automne, j'ai totalement délaissé l'informatique, mon compagnon, plutôt drogue, que j'utilisais de plus en plus systématiquement depuis dix ans. Je me sens en vacances. Ne plus travailler dans le sous-sol avec le ronronnement des trente ordinateurs me soulage déjà; ne plus avoir à répondre à des dizaines de courriels de mes étudiants me libère; ne plus me préoccuper de suivre le cheminement individuellement de chacun me redonne mes soirées; toutes les mises en ligne de tous les documents et la programmation de tous les contrôles et examens en plus de leur mise en ligne, la cerise sur le gâteau. D'esclave, je deviens maître de mon horaire. Quelques photos sur le quai un mardi matin, hum! Une promenade au Luxembourg sous la bise de fin septembre. Quel luxe!

Je rêve de gagner une somme mirobolante à la loterie. Je place mes richesses imaginaires. Je jalouse les bourgeois qui déroulent leurs vacances en devises étrangères et en îles du Pacifique. Je n'ai pas accès à ce genre de luxe. J'y aspire, je n'en fais pas une affaire de suvie. L'argent que je gagne ne me suffit pas; j'en veux plus pour profiter plus; toutefois, je ne veux pas plus de responsabilité, ni plus de temps consacré au travail - consacré, terme intéressant faisant penser à la sacralisation de la vie qui passe. Si j'avais une fortune, j'écrirais plus et je me promènerais plus souvent; et, bien sûr, je voyagerais plus souvent. Ma vie n'est pas mal pour autant. J'en ai déjà plus que beaucoup, plus que plusieurs, pas plus que j'en voudrais....


Mes voyages m'amèneraient aux confins de mon imagination. Trois-Rivières fut le berceau de plusieurs explorateurs intépides. Mon préfére est Radisson; à cheval entre le nomadisme et la finance. Très beau personnage Radisson. Il ne s'est pas rendu aux Rocheuses comme son concitoyen Lavérendrye, mais le Sud des Grands Lacs n'avaient plus de secret pour lui. Je relirais On the road de Kerouac et L'Oeuvre au noir de Yourcenar. Le premier pour un itinéraire et le deuxième pour le rêve. Puis je mettrais Ivanhoe et Les trois mousquetaires, pour le héros et pour la quête. Mais dans ma besasse, dans la poche de façade, une version usée en Livre de Poche de L'Homme sans qualité de Musil pour les longues nuits en solitaire dans les campement de fortune. Dieu que la lecture est bonne!

Je suis riche! Je suis en vacances puisque j'aime ma profession; j'aime la vie parce que j'aime ma conjointe; j'aime mon futur dans le regard de mes enfants. Ma vie n'est pas faite que d'espoir, il y a plein de tout de suite.

J'imagine Radisson à la fin de sa journée. Aussi difficile qu'elle ait pu être, il dormait bien. Sur la rocaille ou le lit de sapinage, dans une caverne ou un tipi, toujours entouré de son canot et de son ravitaillement, la nuit l'envahissait jusqu'à l'aurore. Son lendemain ne se révélait jamais avant l'heure. Pourtant, le doute ne faisait pas partie de ses questionnements: quelle direction? quel rapide? quel portage? quelle bourgade? quel animal? quel gain? Pas de peut-être! En avant, en aval ou en amont, vers le lointain ou vers la maison, en avant, toujours, à se prouver face à cette nature où il trouvait une formidable compréhension mutuelle.
Prendre le large n'est pas nécessairement une question d'espace ou de moyen. ne s'agit-il pas simplement de trouver le courage de prendre le temps à notre disposition pour vivre. Le luxe n'est pas une cage dorée. C'est s'offrir l'horizon pour admirer le miroitement de notre futur.

15 septembre 2008

La solidarité

Les premières pages de nos quotidiens ces jours-ci débordent de thèmes électoraux. À leurs côtés, nous trouvons quelques autres nouvelles qui, de plus ou moins prêt, y sont reliées. De nos jours, tout est politique. Notre société est devenue l'esclave de l'État. Encore ce midi où trois ex-politiciens ergotaient sur le futur lointain encore du Centre hospitalier universitaire de Montréal comparant sa situation à celui du Centre universitaire de santé McGill, lui, à quelques jours de sa première levée de terre, nous ne pouvions entendre que Premier ministre par ci, ministre par là, alliés de l'opposition en dessous, choix du ministre par dessus... Taratata! On n'en finit plus. C'est maladif. Ah! C'est sûr, les anglos, ils se serrent les coudes quand ils veulent quelque chose, pas comme nous: des mariolles dans une comedia de'll arte!

Les anglos sont bicaméraux : ils aiment leur reine pour le symbole d'une puissance inatteignable et impériale; ils ont inventé la démocratie, tué leur roi, pour le remplacer et le placer en chapelle ardente sous le feu d'un parlement. Ils sont bizarres ces engins. Mais ils s'enfargent rarement dans les fleurs du tapis. Ils fabriquent, font de l'argent, partagent peu et donnent beaucoup... Allez comprendre! McGill est un des plus grands propriétaires immobiliers du Canada... grâce à qui? À des anciens qui leur lèguent continuellement des immeubles ou des droits en usufruits. Ils sont solidaires ces brits.

Les germanos carburent à la spirale. C'est ce que m'avait mentionné Margaret Krall, une Allemande d'environ 35 ans à l'époque, qui avait épousé le riche propriétaire de la maison où elle était femme de ménage; imaginez, elle avait 24 ans au mariage et lui 64. Pour elle et sa famille, sauvées in extremis du razzia de Hitler, traversant les Alpes à dos d'âne pour aboutir en France d'où ils s’embarquèrent pour l'Amérique, le riche, ça signifiait le salut. Alors, elle a pris la vie comme on achète un char usagé qu'on ne pourrait jamais se procurer neuf. Et bien sûr, quand il est mort, sa vie a commencé. Alors la spirale, c'est qu'il n'y a jamais vraiment ni commencement ni fin. Peu importe le moment où tu décides d'embarquer dans le cycle, ce n'est qu'à ce moment-là que tu peux faire, créer, bâtir quelque chose. Madame de Staël n'a pas dit autre chose dans De l'Allemagne, oeuvre majestueuse sur le romantisme. Wagner monte et monte, descend encore et encore; il envoûte comme les anneaux du serpent... sans queue ni tête. Hitler n'est rien d'autre que cette image d'un slinky qui descend, qui s'affaisse et qui attend paisiblement qu'une autre poussée vienne repartir le bal. Le mur : cette séparation, qui comme le foetus a créé deux puissances. Sa chute, qui a fait renaître l'empire en devenir qui gravit silencieusement toutes les sphères du pouvoir international dans un stoïcisme mystérieux.

Les francos? Ils pleurent de voir leur roi déguisé, leur président faire trop people. Ils se trompent : Sarkozy, c'est Louis XVI, et Carla, Marie-Antoinette. La révolution? Non non! Ils sont trop nounours et endormis. Ils sont comme nous, les cousins francos de l'Amérique : en attente de l'État pour qu'il les prenne un peu plus en charge. Déçu par les socialistes de ne pas les avoir bordés, ils tuent le compagnonnage et cherchent à droite comment refaire la monarchie démocratique qui les déculpabiliserait et les protégerait. Sarkozy les rend malades, mais ils l'aiment. Ils ne font plus rien. Comme me mentionnait mon prof de socio au collège dans le temps, les Français vivent avec Napoléon dans la tête depuis qu'ils l'ont perdu. Si je pouvais voyager dans le temps, j'irais faire un tour dans le gouvernement de Vichy. Je chercherais à me faire repérer par les résistants, avec un peu de chance je croiserais Malraux, et quelques autres poilus. Ils ont tous dû fuir dans les campagnes à siroter leur cassis. On n’a rien à leur envier : les francos d'ici rongent du liège au lieu de moucheter de la poudre.

Alors, continuons à nous chicaner, à se fendre mutuellement, à n'aller nulle part. On devrait jouer au roi du silence. Les gueulards des médias sentent le poisson. À force de fouiller les poubelles, j'espère qu'ils attraperont quelque virus mortel. Si la solidarité pouvait prendre racine, ils pourraient tenter de lui donner un peu de terre au lieu de continuellement lancer du sable et de la vase. Un consensus se bâtit, ce n'est pas un phénomène de génération spontanée. Les anglos se serrent les coudes? Ils ont peut-être tout simplement compris que l'évolution ce n'est pas seulement la division cellulaire; c'est aussi la parthénogenèse.

Et les germanos? Le rapport? Sont comme les vendeurs de diamants : ils possèdent ce que tu désires le plus, et quand tu peux l'avoir, c'est encore eux qui ramassent le total... ;-))

Bonne vie!