31 août 2010

fin août


Septembre se pointe. Nous terminons le plus beau mois de l'année. Pas seulement à Paris:

«Balayé par septembre
Notre amour d'un été
Tristement se démembre
Et se meurt au passé
J'avais beau m'y attendre
Mon cœur vide de tout
Ressemble à s'y méprendre
A Paris au mois d'août

De larmes et de rires
Etait fait notre amour
Qui redoutant le pire
Vivait au jour le jour
Chaque rue, chaque pierre
Semblaient n'être qu'à nous
Nous étions seuls sur terre
A Paris au mois d'août

Pour te dire je t'aime
Aussi loin que tu sois
Une part de moi-même
Reste accrochée à toi
Et l'autre solitaire
Recherche de partout
L'aveuglante lumière
De Paris au mois d'août

Dieu fasse que mon rêve
De retrouver un peu
Du mois d'août sur tes lèvres
De Paris dans tes yeux
Prenne forme et relance
Notre amour un peu fou
Pour que tout recommence
A Paris au mois d'août»
(Charles Aznavour)

Pas surprenant, le mot août trouve son origine dans auguste : digne de respect, qui inspire la vénération. Quelle majesté! J'ai vraiment choisi le bon mois pour naître. Augustus en latin signifiait « consacré par les augures ». Ma mère tirait aux cartes, don dont mon neveu a hérité d'ailleurs; moi, je tire aux augures... sous de bons auspices. Dieu que les nuits d'août caracolent, enjôlent et cajolent. Leur fraîcheur, après la lourde humidité de son soleil médian et les brumeuses vapeurs de ses après-midis, séduit et apaise l'âme comme nul autre fantasme. Août ouvre les lourdes portes de cumulus au coucher du soleil pour révéler doucement une noirceur tombée comme l'encre sur le parchemin de coton en vaguant des ombres puis en fixant les jaunes scintillants d'étoiles, architecture du firmament pivotant sur les constellations.

 Et Verlaine d'imaginer le divin dialogue dans La nuit d'août :

LA MUSE

Depuis que le soleil, dans l'horizon immense,
A franchi le Cancer sur son axe enflammé,
Le bonheur m'a quittée, et j'attends en silence
L'heure où m'appellera mon ami bien-aimé.
Hélas ! depuis longtemps sa demeure est déserte ;
Des beaux jours d'autrefois rien n'y semble vivant.
Seule, je viens encor, de mon voile couverte,
Poser mon front brûlant sur sa porte entr'ouverte,
Comme une veuve en pleurs au tombeau d'un enfant.

LE POÈTE

Salut à ma fidèle amie !
Salut, ma gloire et mon amour !
La meilleure et la plus chérie
Est celle qu'on trouve au retour.
L'opinion et l'avarice
Viennent un temps de m'emporter.
Salut, ma mère et ma nourrice !
Salut, salut consolatrice !
Ouvre tes bras, je viens chanter.

LA MUSE

Pourquoi, coeur altéré, coeur lassé d'espérance,
T'enfuis-tu si souvent pour revenir si tard ?
Que t'en vas-tu chercher, sinon quelque hasard ?
Et que rapportes-tu, sinon quelque souffrance ?
Que fais-tu loin de moi, quand j'attends jusqu'au jour ?
Tu suis un pâle éclair dans une nuit profonde.
Il ne te restera de tes plaisirs du monde
Qu'un impuissant mépris pour notre honnête amour.
Ton cabinet d'étude est vide quand j'arrive ;
Tandis qu'à ce balcon, inquiète et pensive,
Je regarde en rêvant les murs de ton jardin,
Tu te livres dans l'ombre à ton mauvais destin.
Quelque fière beauté te retient dans sa chaîne,
Et tu laisses mourir cette pauvre verveine
Dont les derniers rameaux, en des temps plus heureux,
Devaient être arrosés des larmes de tes yeux.
Cette triste verdure est mon vivant symbole ;
Ami, de ton oubli nous mourrons toutes deux,
Et son parfum léger, comme l'oiseau qui vole,
Avec mon souvenir s'enfuira dans les cieux.

LE POÈTE

Quand j'ai passé par la prairie,
J'ai vu, ce soir, dans le sentier,
Une fleur tremblante et flétrie,
Une pâle fleur d'églantier.
Un bourgeon vert à côté d'elle
Se balançait sur l'arbrisseau ;
Je vis poindre une fleur nouvelle ;
La plus jeune était la plus belle :
L'homme est ainsi, toujours nouveau.

LA MUSE

Hélas ! toujours un homme, hélas ! toujours des larmes !
Toujours les pieds poudreux et la sueur au front !
Toujours d'affreux combats et de sanglantes armes ;
Le coeur a beau mentir, la blessure est au fond.
Hélas ! par tous pays, toujours la même vie :
Convoiter, regretter, prendre et tendre la main ;
Toujours mêmes acteurs et même comédie,
Et, quoi qu'ait inventé l'humaine hypocrisie,
Rien de vrai là-dessous que le squelette humain.
Hélas ! mon bien-aimé, vous n'êtes plus poète.
Rien ne réveille plus votre lyre muette ;
Vous vous noyez le coeur dans un rêve inconstant ;
Et vous ne savez pas que l'amour de la femme
Change et dissipe en pleurs les trésors de votre âme,
Et que Dieu compte plus les larmes que le sang.

LE POÈTE

Quand j'ai traversé la vallée,
Un oiseau chantait sur son nid.
Ses petits, sa chère couvée,
Venaient de mourir dans la nuit.
Cependant il chantait l'aurore ;
Ô ma Muse, ne pleurez pas !
À qui perd tout, Dieu reste encore,
Dieu là-haut, l'espoir ici-bas.

LA MUSE

Et que trouveras-tu, le jour où la misère
Te ramènera seul au paternel foyer ?
Quand tes tremblantes mains essuieront la poussière
De ce pauvre réduit que tu crois oublier,
De quel front viendras-tu, dans ta propre demeure,
Chercher un peu de calme et d'hospitalité ?
Une voix sera là pour crier à toute heure :
Qu'as-tu fait de ta vie et de ta liberté ?
Crois-tu donc qu'on oublie autant qu'on le souhaite ?
Crois-tu qu'en te cherchant tu te retrouveras ?
De ton coeur ou de toi lequel est le poète ?
C'est ton coeur, et ton coeur ne te répondra pas.
L'amour l'aura brisé ; les passions funestes
L'auront rendu de pierre au contact des méchants ;
Tu n'en sentiras plus que d'effroyables restes,
Qui remueront encor, comme ceux des serpents.
Ô ciel ! qui t'aidera ? que ferai-je moi-même,
Quand celui qui peut tout défendra que je t'aime,
Et quand mes ailes d'or, frémissant malgré moi,
M'emporteront à lui pour me sauver de toi ?
Pauvre enfant ! nos amours n'étaient pas menacées,
Quand dans les bois d'Auteuil, perdu dans tes pensées,
Sous les verts marronniers et les peupliers blancs,
Je t'agaçais le soir en détours nonchalants.
Ah ! j'étais jeune alors et nymphe, et les dryades
Entr'ouvraient pour me voir l'écorce des bouleaux,
Et les pleurs qui coulaient durant nos promenades
Tombaient, purs comme l'or, dans le cristal des eaux.
Qu'as-tu fait, mon amant, des jours de ta jeunesse ?
Qui m'a cueilli mon fruit sur mon arbre enchanté ?
Hélas ! ta joue en fleur plaisait à la déesse
Qui porte dans ses mains la force et la santé.
De tes yeux insensés les larmes l'ont pâlie ;
Ainsi que ta beauté, tu perdras ta vertu.
Et moi qui t'aimerai comme une unique amie,
Quand les dieux irrités m'ôteront ton génie,
Si je tombe des cieux, que me répondras-tu ?

LE POÈTE

Puisque l'oiseau des bois voltige et chante encore
Sur la branche où ses oeufs sont brisés dans le nid ;
Puisque la fleur des champs entr'ouverte à l'aurore,
Voyant sur la pelouse une autre fleur éclore,
S'incline sans murmure et tombe avec la nuit,

Puisqu'au fond des forêts, sous les toits de verdure,
On entend le bois mort craquer dans le sentier,
Et puisqu'en traversant l'immortelle nature,
L'homme n'a su trouver de science qui dure,
Que de marcher toujours et toujours oublier ;

Puisque, jusqu'aux rochers tout se change en poussière ;
Puisque tout meurt ce soir pour revivre demain ;
Puisque c'est un engrais que le meurtre et la guerre ;
Puisque sur une tombe on voit sortir de terre
Le brin d'herbe sacré qui nous donne le pain ;

Ô Muse ! que m'importe ou la mort ou la vie ?
J'aime, et je veux pâlir ; j'aime et je veux souffrir ;
J'aime, et pour un baiser je donne mon génie ;
J'aime, et je veux sentir sur ma joue amaigrie
Ruisseler une source impossible à tarir.

J'aime, et je veux chanter la joie et la paresse,
Ma folle expérience et mes soucis d'un jour,
Et je veux raconter et répéter sans cesse
Qu'après avoir juré de vivre sans maîtresse,
J'ai fait serment de vivre et de mourir d'amour.

Dépouille devant tous l'orgueil qui te dévore,
Coeur gonflé d'amertume et qui t'es cru fermé.
Aime, et tu renaîtras ; fais-toi fleur pour éclore.
Après avoir souffert, il faut souffrir encore ;
Il faut aimer sans cesse, après avoir aimé.


À la nuit, le matin saluera sa solitude. Quand la lune fraîche, s'accrochant aux masses infernales que l'aube annonce, se soumet à l'armistice du jour, le rêve sommeille aux quadrilles du manège; elle patiente sachant sa victoire éphémère à quelques heures à peine.

Septembre est là; presque; quelques minutes; la vierge fait déjà des cabrioles. Le lion retourne à sa savane. Plus rien... Il n'y a plus rien, Ferré. On la sait. Mais ça revient; ça s'en va, puis ça revient.

...
Elle était belle comme la révolte


Nous l'avions dans les yeux,
Dans les bras dans nos futals
Elle s'appelait l'imagination

Elle dormait comme une morte, elle était comme morte
Elle sommeillait
On l'enterra de mémoire
...

Je veux dormir. Jusqu'à plus savoir, jusqu'à plus s'éveiller; jusqu'à août prochain. Juste pour recommencer à m'imaginer que je vis au XVIIe dans la peau du vagabond qui se couche sous le ciel... auguste avant la froidure hivernale.



30 août 2010

Le doute...


Le magazine littéraire de juillet-août publie un dossier sur le doute en littérature. Dans le très bel article frontispice, Laurent Numez place les pièces :
« Les vrais écrivains ne sont pas ceux qui disent ce qu'ils veulent, mais ceux qui n'y parviennent pas, et qui se battent avec la langue — entendons : avec un système plein de scories et d'approximations, usé par d'autres bouches. Certains échouent, et c'est alors la fuite de Rimbaud, le suicide de Pavese, la déchéance de Fitzgerald — le doute n'est pas le propre de la littérature française. Mais parfois aussi, une oeuvre surgit de ce désarroi, et c'est l'Illusion comique, L'Homme sans qualité, ou le Discours de la méthode. Telle est l'image qui hante ce dossier : d'un côté le silence, de l'autre l'écrivance, l'utilisation instrumentale et peu dangereuse des mots; l'écrivain serait ce funambule qui manque de tomber à chaque instant, mais qui avance tout de même, sur le fil de sa plume, au fil des pages, vers ce qu'il sait constituer l'au-delà du doute — la saveur sombre de l'écriture. » (Laurent Numez, Le Magazine littéraire, juillet-août, page 48)
Certaines phrases laissent bouche bée. Les mots suivent un tracé en arabesque qui s'enroule, se croise, redémarre, s'appuie puis se lance en spirale vers son ultime départ. Numez est justifié de parler de Musil. Entre tous les auteurs contemporains, s'il en est un qui ne cesse de hanter les pages de cet Ulric qui vit sa vie au gré des vides de sa vie. Jamais terminé, puisque la fin de l'un représente la fin de l'autre, l'écrivant. La longue marche ne se termine que dans la mort. Les fragments colligés ne changent en rien la certitude de l'illusion de la finalité. Mais n'est-ce pas précisément la passion de lire, et par extension d'écrire : prolonger aussi profondément, avec une persévérance maladive, le doute pour en finir. Comme Sisyphe.

Courrez chez votre libraire acheter cet exemplaire. Puis dégustez-le lentement. Donnez-vous la permission de douter...




29 août 2010

Un dimanche tout en littérature



 Louise Labbé, poétesse médiévale, vit et meurt.

Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;


J'ai chaud extrême en endurant froidure :


La vie m'est et trop molle et trop dure.


J'ai grands ennuis entremêlés de joie.





Tout à un coup je ris et je larmoie,


Et en plaisir maint grief tourment j'endure ;


Mon bien s'en va, et à jamais il dure ;


Tout en un coup je sèche et je verdoie.





Ainsi Amour inconstamment me mène ;


Et, quand je pense avoir plus de douleur,


Sans y penser je me trouve hors de peine.





Puis, quand je crois ma joie être certaine,


Et être au haut de mon désiré heur,


Il me remet en mon premier malheur.

28 août 2010

Écrire


D'aussi loin que je me souvienne, j'écris. Pas pour l'école; pour moi surtout. Rien de précis. La plupart du temps des brouillons, des billets enfouis dans des tiroirs qui se retrouvent périodiquement dans les poubelles. Depuis plus de vingt ans, ils vont à peu près tous sur des fichiers, de disquettes 5 1/4, maintenant illisibles, de disquettes 3 1/2, très bientôt illisibles, sur le serveur de mon collège et sur mon disque dur à la maison, et sur ce blogue. Un grand fouillis qui prouve que, finalement, j'écris parce que j'en ai besoin plus que pour communiquer.
L'écriture me soulage. Elle m'accompagne toujours quelque part où j'hésite à aller. Elle me donne la liberté de vivre à un rythme hors du temps et de l'espace. Elle me coule lentement vers l'intérieur, dans ces zones secrètes que les mots libèrent. C'est le seul jeu à l'intérieur duquel je me sens en confiance. J'aime ce jeu. Je possède un assez vaste vocabulaire, mais je possède surtout le goût de surprendre la structure. La sémantique traditionnelle des mots m'agace. Je ne la vois que dans la réverbération de la tornade qui agite mes doigts sur le clavier. Si le mot vit, il doit parler par lui-même; en la plaçant dans un contexte inhabituel, je lui donne une autonomie nouvelle. Mon compagnon d'édition, Antidote, s'y perd souvent. Commence alors un dialogue fascinant entre sa réaction négative envers une tournure phrastique et ma réflexion qui cherche à justifier le déhanchement de sens. Dans ma tête, l'arrangement parle; mieux, par une évidente anacoluthe, ou une désobéissance flagrante de la syntaxe, ou, encore, par l'irrespect d'une définition normée, je crée un casse-tête où toutes les pièces s'imbriquent sans se tenir seul jusqu'à l'insertion de la clé qui soude la pièce. Tant que les morceaux n'ont pas été placés dans le bon ordre, avec la bonne interprétation, la clé ne fait aucun sens, on ne peut la placer; mais dès que tout concorde, et que l'on glisse cette dernière pièce, tout se tient, le propos émerge. Il me fait sourire lors de ma relecture. La première lecture demeure banale; elle raconte. Puis, au retour, des images surgissent; les mots s'entrechoquent comme des billes dans le cône vacillant. Ils se dirigent tous vers le centre inexorablement; mais tout aussi inexorablement, ils circulent à des vitesses différentes, à des altitudes différentes, selon des courbes uniques. Leur vélocité ronronne la lutte contre la gravité et leur finalité, leur mort, leur disparition, chacun sur un vecteur d'unité finale : la chute.

Ce soir, alors que j'attendais ma commande appuyée sur le cadre de porte de la rôtisserie, je lisais un article sur la stylistique sur l'écran de mon iPod. La langue et ses outils me fascinent. Je suis un fouineur invétéré; je voudrais gober toutes les informations imaginables sur tous les sujets. Il s'agit sans doute de la recherche de l'emploi des mots dans le plus large contexte pour découvrir encore d'autres arrangements. Les mots, comme Jacquard le dit pour les gènes de l'être humain, accouchent d'une infinité de combinaisons sans jamais tarir la source.

Écrire me ravit (mot du fonds primitif issu du latin populaire rapire‘emporter violemment’ ; du latin classique raptus signifiant ‘emporté violemment’, participe passé de rapere‘emporter violemment’)


27 août 2010

Oh Carol... a last dance!



Friday's treat my friends!

Put back on your earphones and make a fool of yourself...



Thank's Carol!

S'been worth every cent!!

I para los amigos...


Bonne nuit bons rêves!

26 août 2010

Le mirage des mots

La crèche où va ma dernière fille Emma accueille quotidiennement une petite aveugle. Elle est belle de cette beauté que l'on oublie jamais; la beauté fragile de celle qui ne voit qu'avec ses délicats petits doigts. Hier, j'attendis Emma qui dévorait son déjeuner. À la tête de la table, Élise promenait sur son napperon le bout de ses doigts pour atteindre les bâtonnets de légumes que l'éducatrice avait placés devant elle. Debout à proximité, elle sentit ma présence; elle tendit sa main dans le vide... Tellement bizarre de regarder cette petite main naviguer dans le noir absolu vers une chaleur, un son, un bruissement, pour savoir, toucher, pour résoudre. Elle savait, je crois que c'était moi; elle avait entendu sûrement les autres enfants murmurés: c'est le papa de Emma! Et Emma éclatée d'un léger rire à bouche pleine de carottes. En haut, vers le bas, en arrêt lentement pour attendre une réponse; un appel; un «aide-moi un peu». Je reste figé avec un sourire d'émerveillement. Je la regarde. Elle tourne sa main du dos à la verticale en bougeant ses vers l'intérieur sans les plier: un salut de la reine. Elle veut me que je me penche; elle veut me toucher la figure. Je me penche vers elle; je penche ma tête et sa main atteint ma joue. Si délicatement, je me demande si elle touche: oh! c'est rugueux! Les poils piquants! Puis elle retourne à son déjeuner.


Élise me fascine. Sa lumière vient d'ailleurs. Elle voit sans yeux. Elle voit lentement, progressivement, toujours du noir absolu vers une forme que son cerveau lui fournit. J'aimerais pouvoir lire un texte avec mes mains; lire en braille serait déjà bien; mais plus encore, lire comme on découvrirait un Goya au moment même où il plaque ses ombres découpées de lumière diaphane. Au petit matin, je plongeai dans mon roman de l'heure et, dans le silence de l'aurore, mes yeux qui couraient sur la page devaient revenir et revenir, la connexion se faisait mal. Une image ne parvenait pas à se décrocher; elle m'a obligé à la digérer, puis je pus reprendre ma lecture. Mes yeux voyaient, c'était mon cerveau qui refusait.«Malheureusement, avant la fin du jour, les choses se gâtèrent. Des nègres qui portaient les bagages, l'un fut pris d'atroces coliques pour avoir mangé le sparadrap de la pharmacie. Un autre tomba sur le bord de la route ivre mort d'eau-de-vie camphrée. Le troisième, celui qui portait l'album de voyage, séduit pas les dorures des fermoirs, et persuadé qu'il enlevait les trésors de La Mecque, se sauve dans le Zaccar à toutes jambes... Il fallut aviser... La caravane fit halte, et tint conseil dans l'ombre trouée d'un vieux figuier.

«Mahheureusment, avant la fin du jour, les choses se gâtèrent. Des nègres qui portaient les bagages, l'un fut pris d'atroces coliques pour avoir mangé le sparadrap de la pharmacie, Un autre tomba sur le bord de la route ivre mort d'eau-de-vie camphrée. Le troisième, celui qui portait l'album de voyage, séduit par les dorures des fermoirs, et persuagé qu'il enlevait les trésors de La Mecque, se sauva dans le Zaccar à toutes jambes... Il fallut aviser... La caravane fit halte, et tint conseil dans l'ombre trouée d'un vieux figuier.

- Je serais d'avis, dit le prince, en essayant, mais sans succès, de délayer une tablette de pemmican dans une casserole perfectionnée à triple fond, je serais d'avis que, ce soir, nous renoncions aux porteurs nègres... Il y a précisément un marché arabe tout près d'ici. Le mieux est de nous y arrêter, et de faire emplette de quelques bourriquots...
- Non!... non!... pas de bourriquots!... Interrompit vivement le grand Tartarin, que le souvenir de Noioraud avait fait devenir tout rouge.

Et il ajouta, l'hypocrite:
- Comment voulez-vous que de si petites bêtes puissent porter tout notre attirail?
Le prince sourit.

- C'est ce qui vous trompe, mon illustre ami. Si maigre et si chétif qu'il vous paraisse, le bourriquot algérien a les reins solides... Il le faut bien pour supporter tout ce qu'il supporte... Demandez plutôt aux Arabes. Voici comment ils expliquent notre organisation coloniale... En haut, disent-ils, i y a mouci le gouverneur, avec une grande trique, qui tape sur l'état-major; l'état-major, pour se venger, tape sur le soldat; le soldat tape sur le colon, le colon tape sur l'Arabe, l'Arabe tape sur le nègre, le nègre tape sur le juif, le juif à son tour tape sur le bourriquot; et le pauvre petit bourriquot n'ayant personne sur qui taper, tend l'échine et porte tout. Vous voyez bien qu'il peut porter vos caisses.

- C'est égal, reprit Tartarin de Tarascon, je trouve qui, pour le coup d'oeil de notre caravane, des ânes ne feraient pas très bien... Je voudrais quelque chose de plus oriental... Ainsi, par exemple, si nous pouvions avoir un chameau...
- Tant que vous en voudrez, fit l'Altesse.
Et l'on se mit en route pour la marche arabe.

Le marché se tenait à quelques kilomètres, sur les bords de Chéliff... Il y avait là cinq ou six mille Arabes en guenilles, grouillant au soleil, et trafiquant bruyamment au milieu des jarres d'olives noires, des pots de miel, des sacs d'épices et de cigares en gros tas; de grands feux où rôtissaient de moutons entiers, ruisselants de beurre, des boucheries en plein air, où des nègres tout nus, les pieds dans le sang, les bras rouges, dépeçaient, avec de petits couteaux, de chevreaux à une perche.

Dans un coin, sous une tente rapetassée de mille couleurs, un greffier maure, avec un grand livre et des lunettes. Ici, un groupe, des cris de rage: c'est un jeu de roulette, installé sur une masure à blé, et des Kabiles qui s'éventrent autour... Là-bas des trépignements, une joie, des rires: c'est un marchand juif avec sa mule, qu'on regarde se noyer dans le Chéliff... Puis des scorpions, des chiens, des corbeaux; et des mouches!... des mouches!...

Par exemple, les chameaux manquaient.»

(Alphonse Daudet, Tartarin de Tarascon, pages 98-99)
Vous voyez l'image de ce marché dans lequel le prince et Tartarin se promène. En braille, Élise risque de voir la même chose que moi. Nous interpréterons sans doute des détails de façon différente. Les images crées revêtiront des textures en relation avec nos expériences. Naturellement, les visions diffèrent d'autant plus que notre différence d'âge est très importante. Toutefois, nous aurons édifié, comme un casse-tête, la mise en scène du fier et orgueilleux Tartarin en promenade avec le prince. S'il fallait perdre le loisir de lire, nous tomberions dans l'esclavage de placage. Je place parfois sur ce blogue des fichiers MP3 sur lesquels se trouvent des conférences ou des entrevues. Elles durent 15 minutes, 30 minutes, 1 heure quelques fois; ne nous sentons-nous pas coupables - je l'ai déjà mentionné - de nous arrêter pour écouter? Nous sommes tout à coup hors du contrôle que nous avons sur tout; la vitesse de la parole gère la durée, la vitesse de transmission; nous n'avons même pas l'image en support pour nous signaler un extrait que l'on pourrait facilement sauter. L'an dernier, je soumis mes étudiants à l'écoute d'un tel fichier audio: 7 minutes à peine. Certains n'en pouvaient plus d'attendre. Attendre? N'attendez pas! L'écoute est une activité! Comme le mentionnait un de mes confrères, les jeunes adultes qui fréquentent notre collège, et tous les autres forcément, ont vécu au rythme effréné d'une télévision programmée pour les maintenir à l'attention à coup de chocs cérébraux toutes les 7 ou 8 secondes. Des études scientifiques poussées menées par des chercheurs chevronnés ont dirigé cette attaque à l'aide de chiffres et de brainscans. Leurs films et leurs jeux empruntent exactement la même dynamique. Ils sont survoltés. Oublierait-on que l'humain n'est pas une machine? Que si sa conduite s'apparente à une machine, aussi performante soit-elle, l'humain ne la rattrapera-t-il pas tôt ou tard? Si on parvient à programmer la réflexion, comment définirons-nous le mot responsabilité?


J'espère que Tartarin ne disparaîtra jamais; ni dans le livre ni dans ma tête. Retournez lire l’extrait avant de vous coucher et jouez au prince qui accompagne Tartarin. Mieux allez-y seul fureter vous-même dans ce casbah.

25 août 2010

Gimmie, gimmie.... money money.... n'oublie pas mon reçu... et mon juge!

Entendu dernièrement à l'Assemblée nationale:



J'aurais dû faire mon droit...

J'ai la peste... et vous?


Médecin de la peste dans son attirail de travail


Dites, vous croyez en la translation. Je rencontrai cette magnifique propriété bien jeune, mais je ne l'ai nommé que beaucoup plus tard. Elle est revenue en force lors des devoirs de mes filles quand elles étaient au primaire. La translation est la transformation dans laquelle à tout point on fait correspondre un autre point par un vecteur fixe - merci Antidote, je t'adore. Pour les visuels et le commun des mortels dont je suis, c'est :

Vu? Reprendre la même forme dans une position spatiale différente: l'effet miroir.

Je vous amène aujourd'hui hors de votre aquarium pour illustrer jusqu'à quel point un grand auteur français a habillement parlé de la commission Bastarache; et allons-y, de tout le falbala pathétique qui auréole notre classe politique. Oui, je sais Daniel me c,onseillera de prendre une approche positive. Dis-toi seulement, che,r ami que je ne suis qu'un chroniqueur; un photographe; à peine un caricaturiste, je ne suis pas à moitié aussi Satire que Chapleau. Ce grand chroniqueur de la société algérienne de 1947, pas d'hier, comme ma chemise préférée, se nomme Tarrou; il décrit, en observateur étranger, la progression d'un terrible fléau. Il lutte aussi contre ce fléau et contre la douce, et subversive, pénétration des horreurs qui envahit la quotidienneté de la population. L'extrait reproduit ici reflète assez bien la situation de notre société contemporaine. Elle sonne une alarme sourde face à laquelle l'individu est en bute à un immobilisme chronique. C'est un peu long, je vous l'accorde; mais quelques minutes de votre vie pour réfléchir, est-ce trop demander?

«Le lendemain, grâce à une insistance jugée déplacée, Rieux obtenait la convocation à la préfecture d'une commission sanitaire.

- Il est vrai que la population s'inquiète, avait reconnu Richard. Et puis les bavardages exagèrent tout. Le préfet m'a dit : « Faisons vite si vous voulez, mais en silence. » Il est d'ailleurs persuadé qu'il s'agit d'une fausse alerte.

Bernard Rieux prit Castel dans sa voiture pour gagner lapréfecturee.

- Savez-vous, lui dit ce dernier, que le département n'a pas desérumm ?

- Je sais. J'ai téléphoné au dépôt. Le directeur est tombé des nues. Il faut faire venir ça de Paris.

- J'espère que ce ne sera pas long.

- J'ai déjà télégraphié, répondit Rieux.

Le préfet était aimable, mais nerveux.

- Commençons, Messieurs, disait-il. Dois-je résumer la situation ?

Richard pensait que c'était inutile. Les médecins connaissaient la situation. La question était seulement de savoir quelles mesures il convenait de prendre.

- La question, dit brutalement le vieux Castel, est de savoir s'il s'agit de la peste ou non.

Deux ou trois médecins s'exclamèrent. Les autres semblaient hésiter. Quant au préfet, il sursauta et se retourna machinalement vers la porte, comme pour vérifier qu'elle avait bien empêché cette énormité de se répandre dans les couloirs. Richard déclara qu'à son avis, il ne fallait pas céder à l'affolement : il s'agissait d'une fièvre à complications inguinales, c'était tout ce qu'on pouvait dire, leshypothèsess, en science comme dans la vie, étant toujours dangereuses. Le vieux Castel, qui mâchonnait tranquillement sa moustache jaunie, leva des yeux clairs sur Rieux. Puis il tourna un regard bienveillant vers l'assistance et fit remarquer qu'il savait très bien que c'était la peste, mais que, bien entendu, le reconnaître officiellement obligerait à prendre des mesures impitoyables. Il savait que c'était, au fond, ce qui faisait reculer ses confrères et, partant, il voulait bien admettre pour leur tranquillité que ce ne fût pas la peste. Le préfet s'agita et déclara que, dans tous les cas, ce n'était pas une bonne façon de raisonner.

- L'important, dit Castel, n'est pas que cette façon de raisonner soit bonne, mais qu'elle fasse réfléchir.

Comme Rieux se taisait, on lui demanda son avis :

- Il s'agit d'une fièvre à caractère typhoïde, mais accompagnée de bubons et de vomissements. J'ai pratiqué l'incision des bubons. J'ai pu ainsi provoquer des analyses où le laboratoire croit reconnaître le bacille trapu de la peste. Pour être complet, il faut dire cependant que certaines modifications spécifiques du microbe ne coïncident pas avec la description classique.

Richard souligna que cela autorisait des hésitations et qu'ilfaudraitt attendre au moins le résultat statistique de la série d'analyses, commencée depuis quelques jours.

- Quand un microbe, dit Rieux, après un court silence, estcapablee en trois jours de temps de quadrupler le volume de la rate, de donner aux ganglions mésentériques le volume d'une orange et la consistance de la bouillie, il n'autorise justement pas d'hésitations. Les foyers d'infection sont en extension croissante. À l'allure où la maladie se répand, si elle n'est pas stoppée, elle risque de tuer lamoitiéé de lavillee avant deux mois. Par conséquent, il importe peu que vous l'appeliez peste ou fièvre de croissance. Il importe seulement que vous l'empêchiez de tuer la moitié de la ville.

Richard trouvait qu'il ne fallait rien pousser au noir et que la contagion d'ailleurs n'était pas prouvée puisque les parents de ses malades étaient encore indemnes.

- Mais d'autres sont morts, fit remarquer Rieux. Et, bien entendu, la contagion n'est jamais absolue, sans quoi on obtiendrait unecroissantee mathématique infinie et un dépeuplement foudroyant. Il ne s'agit pas de rien pousser au noir. Il s'agit de prendre desprécautionss.

Richard, cependant, pensait résumer la situation en rappelant que pour arrêter cette maladie, si elle ne s'arrêtait pas d'elle-même, il fallait appliquer les graves mesures de prophylaxie prévues par la loi ; que, pour ce faire, il fallait reconnaître officiellement qu'il s'agissait de la peste ; que la certitude n'était pas absolue à cet égard et qu'en conséquence, cela demandait réflexion.

- La question, insista Rieux, n'est pas de savoir si les mesuresprévuess par la loi sontgraves,s mais si elles sont nécessaires pourempêcherr la moitié de la ville d'être tuée. Le reste est affaire dadministrationn et, justement, nos institutions ont prévu un préfet pour régler ces questions.

- Sans doute, dit le préfet, mais j'ai besoin que vousreconnaissiezz officiellement qu'il s'agit d'une épidémie de peste.

- Si nous ne le reconnaissons pas, dit Rieux, elle risque quand même de tuer la moitié de la ville.

Richard intervint avec quelque nervosité.

- La vérité est que notre confrère croit à la peste. Sa description du syndrome le prouve.

Rieux répondit qu'il n'avait pas décrit un syndrome, il avait décrit ce qu'il avait vu. Et ce qu'il avait vu, c'étaient des bubons, des taches, des fièvres délirantes, fatales en quarante-huit heures. Est-ce que M. Richard pouvait prendre la responsabilité d'affirmer que l'épidémie s'arrêterait sans mesures de prophylaxie rigoureuses ?

Richard hésita et regarda Rieux :

- Sincèrement, dites-moi votre pensée, avez-vous la certitude qu'il s'agit de la peste ?

- Vous posez mal le problème. Ce n'est pas une question devocabulairee, c'est une question de temps.

- Votre pensée, dit le préfet, serait que, même s'il ne s'agissait pas de la peste, les mesures prophylactiques indiquées en temps de peste devraient cependant être appliquées.

- S'il faut absolument que j'aie une pensée, c'est en effet celle-ci.

Les médecins se consultèrent et Richard finit par dire :

- Il faut donc que nous prenions la responsabilité d'agir comme si la maladie était une peste.

La formule fut chaleureusement approuvée

- C'est aussi votre avis, mon cher confrère ? demanda Richard.

- La formule m'est indifférente, dit Rieux. Disons seulement que nous ne devons pas agir comme si la moitié de la ville ne risquait pas d'être tuée, car alors elle le serait.

Au milieu de l'agacement général, Rieux partit. Quelques moments après, dans le faubourg qui sentait la friture et l'urine, une femme qui hurlait à la mort, les aines ensanglantées, se tournait vers lui.» (Albert Camus, La Peste, pages 50 à 55)
Là où il y a de l'homme, il y a de l'hommerie, dit-on. Là où il y a des singes, il y a de la singerie. Je te pose une question ami philosophe: peut-on conclure que là où il y a de l'hommerie, il y a de la singerie?



24 août 2010

Nostalgie

Le cirque de la commission Bastarache me donne la nausée. J'avoue, c'est une exercice de droit superbe où les avocats se pavanent grossièrement en dépensant des millions. Les argumentaires s'articulent comme de superbes gammes de dialectique légale. Mais, la justice est-elle servie?

Honni soit qui mal y pense.



Les couleuvres sont de tous les temps.

23 août 2010

L'orthographisme compulsif



Un nouvel organisme vient de voir le jour au Québec. Il vient en aide aux fauteurs compulsifs. Sous la pression de l'Association des orthographistes anonymes, les instances officielles ont plié. Ils ont, en effet, décrété qu'il existait dans la population un nombre assez important de fauteurs pour officialiser et subventionner une aide concertée pour accompagner ces malades de la langue. C'est notre futur qui en dépend. Dyslexie, dysphasie, dysorthographie, dystortionnistes et dansàdix vont dorénavant pouvoir compter sur le soutien de l'État.

L'Association de grammairiens syntaxiques adverbiaux et l'organisation mondaine des syntaxistes ponctués ont exprimé leur soulagement : « enfin, l'orthographe prendra la place qui lui revient dans les grands maux de notre société. Notre langue de bois pourra enfin se pourvoir de planches neuves; nous pourrons fièrement porter bien équarries ces marches lexicales, fondement de notre bouche bée.

Le seul son discordant, et il fallait s'y attendre, nous vint de notre maman partie sous la volette de François De Closets. Ce journaliste et écrivain d'une vingtaine de livres à peine, s'envola sur sa perche en haute voltige devant ce grand pas de l'humanité :

«La maîtrise d'une telle écriture repose sur un intense et complexe travail de mémorisation, et nous ne sommes pas tous égaux devant la mémoire. Au laboratoire de psychologie et neurcognition du CNRS, à Grenoble, l'équipe de Sulviane Valdois a soumis de jeunes enfants è des tests d'attention visuelle au cours desquels une série de consonnes apparaît très brièvement. Les résultats sont très variables selon les sujets : certains retiennent les cinq lettres, d'autres, deux seulement. Or, a constaté Sylviane Valdois, les performances des jeunes enfants sur ces épreuves permettent de prédire leur score en orthographe des mots isolés deux ans plus tard,
C'est donc, pour une large part, la mémoire visuelle qui fait la différence en matière d'orthographe. Elle permet à celui qui voit les mots de les enregistrer lettre à lettre. À partir de cette image précise, l'écriture ne peut qu'être correcte, et, à l'inverse, toute graphie fautive saute aux yeux comme le nez rouge plaqué sur le visage du clown blanc. Ces facultés de mémorisation jouent un rôle clé dans l'apprentissage de l'orthographe.
On voudrait croire que la pratique de la lecture suffit à développer et à entretenir le lexique mental, base d'une bonne orthgraphe d'usage. C'est compter sans les inégalités mnésiques. Les travaux de Michel Fayol montrent qu'il existe des élèves bons en lecture et faibles en orthographe. Ceux-là lisent sans orthographier — j'en connais un de très près!
Depuis mon plus jeune âge, je suis un lecteur compulsif. Je ne supporte pas de rester plus de cinq minutes dans le métro ou dans une salle d'attente sans me plonger dans un journal ou dans un livre. J'en ai le plus souvent un dans mes poches. Je ne lis pas les lettres, mais les mots, dans leur globalité. J’en enregistre la forme, pas le détail, juste ce qu'il faut pour les reconnaître à la prochaine lecture, J'ai l'orthographe purement passive. À ce jeu, je peux lire un roman et n'être pas sûr, à la fin, du nom de l'héroïne! Je ne fais manifestement pas partie de ces chanceux qui ont la lecture orthographiante et qui fixent les graphies en les voyant écrites. Je dois préciser que la méthode globale n'est en rien responsable de mes ennuis, car, bien évidemment, on ne l'utilisait pas de mon temps.» (François De Closets, Zéro faute, pages 117 et 118)

Merci monsieur De Closets! Votre témoignage est touchant. Mais nous savons tous que le français en France... on repassera. Nous saurons le sauver!

Je m'amuse bien sûr. Je viens tout juste de corriger ma centaine de copies diagnostiques. Mes chers étudiants me racontaient leur récit plus touchants les uns que les autres. Je trouve un plaisir certain à les lire. À celui-ci qui me racontait la profonde affection et l'indicible fierté qu'il vouait à son père, je devais casser son élan pour un double «pp» ou un «ai pour un è». Celle-ci me traçait le courageux périple de sa mère, monoparentale mais d'un courage sans pareil; à celle-là, ce sont des «aus pour eaux», ou des sur citer pour susciter. Je dois faire un prof de moi; me rappeler que les fautes sont des poux qui grésillent, ma belle langue.

J'ai parfois l'impression que je mets mes jeunes au carême de l'expression; que je les censure en coupant leurs élans de créativité. Mais ce n'est qu'une impression; je dois bien leur donner un peu de discipline linguistique...

Ces jeunes que je côtoie ont un sens de la langue si déroutant. À travers leur SMS, leur clavardage et leur réseautage social, ils s'approprient ma langue littéraire, si belle, que j'aime à peaufiner, à orner, à reprendre, à manipuler comme la glaise le sculpteur. Ils ont un autre jeu : celui de faire un pont, le plus efficace, le plus direct, le plus clair, qui s'avère parfois le plus dangereux. Ils forgent un univers linguistique qui m'échappe et j'ai beau tenter de traverser le ravin pour entendre cette nouvelle voix, je ne l'entends qu'en sourdine. Le pont n'est plus pour moi; c'est mon pont de la rivière Kwai; je dois rester sur la berge à leur gesticuler.





22 août 2010

La lecture! Pour quoi? Pour qui?

La lecture évolue chaque jour. Son évolution moderne, depuis Gutenberg, monopolise. Dans quelques années, en espérant que le papier n'ait pas disparu, la page virtuelle s'affichera sans doute comme l'outil de base la plus populaire. Peu importe! L'homme primitif lisait les animaux, leurs traces, leurs comportements, leurs habitudes; il faisait de même avec ses congénères; il laissait ses aventures sur les murs de cavernes. Petit à petit, l'écriture s'est iconisée. Elle est devenue un code spécifique à des peuples; elle a conduit inévitablement à l'apprentissage, mais toujours à partir du besoin fondamental et instinctif de communiquer à l'aide d'un langage structuré de sorte qu'il pouvait autant identifier son locuteur que perpétuer la tradition de la tribu.

Dans la revue Sciences Humaines de août-septembre, un volumineux dossier sur la littérature nous amène à réfléchir sur cette faculté exclusivement humaine qu'est le langage parlé et écrit. Chomsky lance ses galets dans la mare des conventions :
« Le langage est une compétence innée, spécifique aux humains, qui permet le fonctionnement de la pensée [...] Dire que le langage est fait pour communiquer est aussi absurde que dire que l'oeil humain est fait pour regarder la télévision! »

Le langage est exclusivement humain; il est un jeu de l'esprit et, donc selon lui, du cerveau. Que l'on habille cette faculté de la forme, d'une langue, que l'on veut, c'est toujours et encore l'esprit humain qui joue à un niveau de communication artificielle et, dans une certaine mesure inutile. Le but n'est pas de communiquer, mais de célébrer ses facultés neuroniques cérébrales.

La littérature devient alors le fruit de ce don. Pourquoi écrire? Écrire pour les « quoi » qui encerclent notre vie de tous les jours et qui font se lever soit des spectres du passé, soit des fantasmes du futur, ou encore des ravins du présent. Lire va chercher des « qui » qui découplent notre personnalité.
« On peut aller plus loin encore, et affirmer que les émotions ressenties, les rêves formulés pendant la lecture ont un impact non seulement sur l’interprétation que nous faisons d’un roman, mais aussi dans notre propre existence. Le lecteur ne conforme pas nécessairement ses actes à ceux des personnages (aimer Sade, ce n’est pas devenir sadique, pas plus qu’étudier Machiavel ne rend machiavélique). Mais il peut transposer dans sa vie des humeurs, émois et formules empruntés au roman favori. La phrase du dandy Oscar Wilde, à propos d’un personnage de Balzac, est restée célèbre : “La mort de Lucien Rubempré est le plus grand drame de ma vie.” Marco Vargas Llosa, un auteur contemporain, confirme à sa manière : “Une poignée de personnages littéraires ont marqué ma vie de façon plus durable qu’une bonne partie des êtres en chair et en os que j’ai connus.” On sait aussi que le Werther de Goethe (1774) a poussé des adolescents au suicide ou que La Nouvelle Héloïse, de Jean-Jacques Rousseau (1761), a modifié l’équilibre affectif de plusieurs générations.
Que cherche-t-on alors dans cette expérience, qui peut s’avérer déstabilisante? Et que risque-t-on? C’est là que l’on en revient à la plurivocité fondamentale du genre romanesque : tout dépend du roman choisi. L’habileté des best-sellers consiste à nous présenter des personnages qui nous ressemblent. Leurs valeurs sont les nôtres, leurs passions nous parlent, précisément parce qu’elles sont stéréotypées. Ces romans encouragent ainsi le lecteur dans ses croyances et ses attentes. C’est un mécanisme bien connu de la psychologie sociale : parce que l’autre me ressemble, il me sécurise. Me voilà protégé et rassuré par le personnage de roman, que je chéris en retour. À l’inverse, certains romans plus ambitieux nous confrontent à une altérité radicale. C’est le cas, par exemple, de L’Idiot de Fedor Dostoïevski (1868), de Lolita de Vladimir Nabokov (1955) ou encore des Bienveillantes de Jonathan Littell. L’intérêt ne vient plus de ce que nous y reconnaissons de nous-mêmes, mais de ce que nous sommes susceptibles d’y apprendre de notre part d’ombre. Dans un cas, le lecteur cherche une confirmation de soi; dans l’autre, une confrontation à soi. Dans tous les cas, remarque V. Jouve, “l’autre du texte, qu’il s’agisse du narrateur ou d’un personnage, nous renvoie toujours, par réfraction, une image de nous-mêmes”. » (Pourquoi lit-on des romans?, Héloïse Lhétéré)
Je lis, donc... je pense. La création littéraire expose des jeux intimes d'individus assez braves et articulés pour élaborer un univers dans lequel, à leur invitation, nous plongeons pour poursuivre le jeu du miroir. Toute cette activité intellectuelle s'opère à plusieurs niveaux. Je donne des cours d'analyse littéraire à des étudiants du collégial. Mes lectures sont dès lors tordues; je ne peux plus lire « naïvement ». Chacune de mes intrusions dans un nouveau roman devient un périple plus fouillé; mon instinct a perdu la faculté de ne pas voir les outils que l'auteur a disposés pour m'ensorceler. Le jeu se situe à un autre niveau. Comme une de mes gardiennes me racontait dans ma petite jeunesse alors que je regardais un grand livre dans son salon: mon travail de bibliothécaire me force à lire des tas de livres pour en juger le contenu avant de les rendre à leur rayon; j'ai toujours hâte de pouvoir lire lentement ces livres que je mets de côté pour mes loisirs. Quand mes étudiants me posent la question traditionnelle : mais pourquoi chercher à comprendre tous ces mécanismes? Est-ce que cela nous aide vraiment à mieux comprendre? Mes réponses demeurent scolaires : « Oui, vous comprenez mieux et plus complètement le propos du texte, l'intention de l'auteur. Au fond, je devrais leur dire : vous perdez votre naïveté en face du texte; vous êtes gagnant, car votre indépendance devant le message est accrue; vous ne tombez pas un trou noir dans lequel vous risquez de faire fausse route... Vous êtes aussi perdant dans la mesure où vous risquez d'y voir des outils et non pas un geste holistique. L'un vaut l'autre : deux lectures différentes. On peut visiter Rome sur le Mont Palatin, à l'intérieur de Saint-Pierre, sur la Via Antica ou sur l'un des très nombreux bistros improvisés sur les places cachées au bout des ruelles de quartier.

Je vous laisse avec ces mots de Tzvetan Todorov, qui résume tout de si belle façon :
 «La littérature est la première des sciences humaines; pendant de longs siècles, elle était aussi la seule. Son objet, ce sont les comportements humains, les motivations psychiques, les interactions entre les hommes. Et elle reste toujours une source inépuisable de connaissances sur l’homme. Marx et Engels disaient que la meilleure représentation du XIXe siècle se trouvait non chez les premiers sociologues, mais chez Balzac qui révélait la vérité sur le monde qui l’entourait. Aujourd’hui encore, si une jeune personne me demande à quoi ressemblait la vie sous la dictature soviétique, je lui dirais : “Lis Vie et destin de Vassili Grossman!” Or c’est un roman, non un ouvrage de sciences humaines. Stendhal, de son côté, affirmait qu’il n’y a de “vérité un peu détaillée” sur le genre humain que dans les romans. Cette “vérité détaillée” reste par excellence le propre de la littérature. Sauf, bien sûr, quand la littérature est “en péril”, c’est-à-dire quand elle se limite à n’être plus qu’un jeu avec ses conventions, ou à décrire de façon extrêmement restreinte l’expérience personnelle de l’auteur. Dans ces cas-là, la littérature perd son statut privilégié dans la quête de connaissance du monde; sinon, elle reste une source inépuisable et irremplaçable. En anglais existe un terme qui désigne bien ce processus spécifique de connaissance : c’est “insight”, qui évoque la pénétration, la compréhension de l’intérieur de l’objet étudié. C’est ce que tâchent de faire les bons écrivains. Les sciences humaines actuelles restent redevables de la littérature. Les récits sur Œdipe ou sur Antigone ont une telle force qu’ils continuent d’inspirer leur pratique. Bien entendu, les visions du monde portées par la littérature ne forment pas des propositions logiquement construites, susceptibles d’être vérifiées et testées. Il faut donc les interpréter pour pouvoir dire : “Voilà ce que Shakespeare nous apprend du comportement de l’être humain dans telle ou telle circonstance.” La littérature a besoin d’intermédiaires. Cela rend plus difficile l’utilisation des connaissances auxquelles elle accède. Mais nous les saisissons intuitivement, nous savons les sentir. C’est d’ailleurs la grande raison qui nous pousse vers la lecture. S’il n’y avait pas cette perspective d’une meilleure connaissance du monde, pourquoi nous fatiguerions-nous à lire les aventures de gens que nous ne connaissons pas, pire, qui n’existent pas.»” (Propos recueillis par Héloïse Lhérété et Catherine Halpern)








21 août 2010

Paul Sauvé mort ou vivant!


90 jours au pouvoir. Trop dur. Mort et enterré!
« Paul Sauvé veut bien faire comprendre à ses concitoyens que le Québec se situe à un tournant de son évolution. La Belle province se trouve en fait à la croisée des chemins vers une ère de modernisation de ses institutions et de son administration. Les historiens qualifieront plus tard de “Révolution des 100 jours” ce trop bref passage à la tête de l'État. Certains même y verront une forme de prélude au grand remue-ménage de la Révolution tranquille des années 1960. Son action s'inspire effectivement de l'“idéologie du rattrapage” qui pavera la voie à l'ère des réformes de la Révolution tranquille. Paul Sauvé, le plus progressiste des conservateurs, semble s'être donné pour objectif de faire entrer le Québec de plain-pied dans l'ère de la modernité. »
Au nombre des mesures mises de l'avant au cours de ses 112 jours de règne, signalons le coup de barre donné dans le dossier des relations avec le monde des médias, le règlement si longtemps espéré de la question des subsides fédéraux aux universités, la reconnaissance du droit d'association et l'ouverture aux mouvements de syndicalisation, le renforcement des acquis de la Fonction publique, instrument indépendant de l'appareil de l'État. Paul Sauvé crée également un poste de chef de l'information afin de mieux faire valoir auprès la population le bien-fondé des nouvelles orientations de son gouvernement.
Il sait déléguer et faire confiance à son cabinet. Ses ministres auxquels il laisse plus de latitude conservent la responsabilité de leurs décisions. Il relance les discussions sur la frontière du Labrador, déclare l'urgence de réévaluer le système d'éducation. Nous le voyons prendre part aux négociations fédérales-provinciales sur le partage des impôts et la fiscalité. Sur le plan des infrastructures, il inaugure l'autoroute des Laurentides et annonce la construction de trois centrales hydroélectriques sur la rivière Manicouagan. 
Son décès subit le 2 janvier 1960 déconcerte les milieux politiques, attristés devant la disparition d'une des plus brillantes figures de sa génération. Selon Georges-Émile Lapalme, sans ce départ prématuré, Paul Sauvé aurait sans doute eu la volonté et l'intelligence politiques de procéder à la plupart des grandes réformes qui transformeront bientôt de fond en comble notre paysage socioculturel québécois au cours de la Révolution tranquille. » (Un homme politique tourné vers l'avenir, Paul Sauvé)
Je suis profondément nostalgique. Je vais organiser une séance de spiritisme et faire revenir Sauvé pour quelques heures pour lui demander conseil. Je vais aussi lui demander comment il se fait qu'un homme dont on rêvait la mort dans plusieurs milieux intellectuels eût pu permettre à un homme aussi progressiste de prendre en charge des réformes aussi fondamentales que les allocations sociales aux plus pauvres et les écoles techniques de formation continue et professionnelle dirigées par des laïcs : Paul Sauvé. C'est un aréna maintenant. Pauvre homme. Après 112 jours, il semble en avoir fait plus qu'en 8 huit ans pour la majorité des autres. Le plus tragique est qu'ils vous diront que les défis ne sont pas les mêmes; à cette époque historique, tout était à faire. Dieu, qu'ils sont stupides et ignorants. L'histoire est fabriquée par les vivants; c'est leur manque d'imagination et leur paralysie cérébrale qui est le problème. Le Plan Nord par exemple; en voilà une idée fantastique. Mais il en faut du cran et de l'intelligence pour le pousser. Il en faut du courage pour pousser de l'avant un développement aussi gargantuesque pour de si petits estomacs. Les idées, les principes, la langue de bois, ce hachis ne nous mènent nulle part. La santé claudique; l'éducation s'édulcore; la société se désarticule. Mais on parle; on parle beaucoup, et on chiale, et on grève, et on menace, et on se pourlèche tellement son nombril qu'on en oublie que l'on vit en société.

Qui a initié les Pays d'en haut? Qui a ouvert l'Abitibi? Ça me fait penser à une réflexion, plutôt débile vous me passerez l'expression, d'un ami qui m'avait fait la remarque suivante : le gouvernement nous donne l'argent pour partir des projets, mais quand ils sont en marche les subventions cessent et il faut le rentabiliser par nous-mêmes. Si les enfants se disaient la même chose, ils ne quitteraient jamais la maison. Si je te donne une automobile, faut-il que je te paie la gazoline pour les trois prochaines années? Et la quatrième année, tu vas m'en vouloir pour te couper les vivres? Bon enfin, tous les goûts sont dans la nature!

Paul Sauvé, qui avait mis l'équipe entière de Duplessis sur la guillotine, avait adopté le slogan « Désormais ». Une coupure avec le passé, un clin d'oeil sur le futur, mais surtout un geste pour le présent.   Il n'a pas eu le temps de tout faire. Quelque temps après sa mort, la puissante Union nationale pique du nez; c'est Lesage et ses libéraux qui remportent les élections. Ils ne le diront pas trop fort, mais ils vont reprendre la feuille de charge de Sauvé et changer le Québec pour toujours. Où est ta statue mon Paul? Ça te va tellement mal un aréna; là où on patine. Tu devrais être un barrage, ou un aéroport.

20 août 2010

La mer de plastique


Les océanologues en parlent depuis plusieurs années. On a déjà décrit et photographié l'île déchet du Pacifique, cette fois les scientistes nous mettent en garde contre celle de l'Atlantique.
Nous ne cessons pas d'utiliser des matières non dégradables. Nous continuons à submerger notre planète de déchet toxique. Nous nous plaignons souvent de la prolifération des armes de destruction massive, des armes nucléaires; pourtant la pollution est bien pire que ces bombes. Et cessons de dire à tort et à travers que le réchauffement et la pollution en général représentent des bombes à retardement : nous y sommes.

Ces îles de détritus qui grandissent sur la mer, grosse comme des pays vont totalement modifier notre mode de vie; et nous venons de lui donner un magnifique coup de pouce avec le déversement du Golfe du Mexique. Ce pétrole brut va joliment s'amuser avec la faune et la flore marine. Beau paysage : deux immenses îles de déchet à l'Ouest et à l'Est; les deux pôles qui fondent en accélérer; le golfe plein de pétrole... Et quoi encore, les centaines de milliers de tonnes des déchets de la ville de New York qui sont déversés quotidiennement à l'aide de gigantesques chaluts au large de la côte de la Nouvelle-Angleterre. La petite planète bleue agonise. En observant cette carte à gauche, bien qu'elle soit à une très petite échelle, 2 000 km au demi-pouce, nous pouvons tous visualiser le danger de cette masse au fur et à mesure qu'elle se rapproche de la côte. C'est le maire Drapeau du Montréal de l'Expo universelle qui doit bien rire dans sa barbe; lui qui a bâti l'Île Notre-Dame pour son Expo 67 à coup de camion de la terre enlevée pour la construction de son Métro, il aurait peut-être suggéré qu'on aille le chercher en remorqueur.

La pollution est-elle hors de notre contrôle? La réponse est entre vos mains toutes les fois que vous utilisez du matériel qui survivra presque éternellement parce que la science aura réussi à stabiliser chimiquement un produit de consommation.



19 août 2010

Obama comme leure

Nommez un président noir pour étouffer la polarisation de la crise financière et replacer calmement l'américanisme englobant à travers le monde. C'est du moins l'opinion d'Emmanuel Todd, historien émérite interviewé par Pierre Laramée. Depuis son arrivée à la Maison Blanche, l’accent reste fixer sur sa notabilité : ses gestes, ses voyages, ses décisions, ses vacances... Comme J.F Kennedy, exception faite des Américains, tout le monde l'adore et célèbre cette icône de la déségrégation internationale... Et quel sourire... et quels pectoraux... Un véritable dieu du stade!

Pas au Sud : nous lisons dans les quotidiens américains d'aujourd'hui que de plus en plus d'Américains le croient musulman; nous pourrions nous demander si le naturel WASP de l'Amérique profonde ne reviendrait pas au galop avec la convalescence de leur économie. Mais tout n'est pas dit. Quel truc nous sortiront les bonzes démocrates pour relever son image et garder la majorité à la Chambre des représentants? Un autre coup fumant. Obama est fait pour être aimé.

J'écoutais hier un forum de jeunes adultes québécois qui parlaient de l'héritage de la Révolutionn tranquille; ils s'accordaient tous pour souhaiter un personnage charismatique comme le président américain pour leur redonner le goût de la politique. Le charisme... Jeu dangereux parfois. Une émission des archives de Radio-Canada sur Daniel Jonhson, le défunt premier ministre du Québec, notait qu'il représentait une anomalie dans la politique québécoise dans la mesure où il manquait tellement de ce charisme cher aux électeurs de la province. Une fois au pouvoir, tout le monde, les médias et les membres de la colline parlementaire, voire certains de ses propres ministres, le repoussaient dans le fond du garde-robe. Son fils Pierre-Marc, ex-premier-ministre lui-même, confiait à un journaliste que sa première réaction en apprenant la mort de son père avait été de dire :« «Bon, ils ont réussi à l'avoir ».

Les personnes qui manquent de charisme ne l'ont pas facile. Ceux qui en ont pourtant nous font courir des risques énormes. Ces personnes qui captent notre attention, qui deviennent rapidement nos héros, nos modèles, nos sauveurs, paralysent notre volonté. Leur pouvoir est énorme. Ou comme plusieurs politicologues le remarquent, les personnes derrière eux, ceux qui actionnent les vraies ficelles du pouvoir, manipulent notre héros qui devient dès lors un porteur de messages à la Crésus. Il ne suffit pas de chercher une personne sans saveur, il s'agit simplement de faire preuve de prudence. Nous devons scruter la réalité. Nous aimons à aimer, à croire, à suivre; l'absence actuelle de ce type de politicien dans les panoramas québécois et canadien doit nous rendre prudent. Le futur doit respecter les volontés, pas les camoufler sous la séduction.

18 août 2010

Le cynisme et Marilyn Monroe

Aujourd'hui, je célèbre mon anniversaire. Je me donne congé.

Je vous laisse toutefois deux cadeaux.

Un plutôt drôle:



Et un autre plutôt pathétique:



À demain...

17 août 2010

Woody Allen for ever!

Woody's memorabilia! I'm nostalgic...



... a gift someone?