30 août 2010

Le doute...


Le magazine littéraire de juillet-août publie un dossier sur le doute en littérature. Dans le très bel article frontispice, Laurent Numez place les pièces :
« Les vrais écrivains ne sont pas ceux qui disent ce qu'ils veulent, mais ceux qui n'y parviennent pas, et qui se battent avec la langue — entendons : avec un système plein de scories et d'approximations, usé par d'autres bouches. Certains échouent, et c'est alors la fuite de Rimbaud, le suicide de Pavese, la déchéance de Fitzgerald — le doute n'est pas le propre de la littérature française. Mais parfois aussi, une oeuvre surgit de ce désarroi, et c'est l'Illusion comique, L'Homme sans qualité, ou le Discours de la méthode. Telle est l'image qui hante ce dossier : d'un côté le silence, de l'autre l'écrivance, l'utilisation instrumentale et peu dangereuse des mots; l'écrivain serait ce funambule qui manque de tomber à chaque instant, mais qui avance tout de même, sur le fil de sa plume, au fil des pages, vers ce qu'il sait constituer l'au-delà du doute — la saveur sombre de l'écriture. » (Laurent Numez, Le Magazine littéraire, juillet-août, page 48)
Certaines phrases laissent bouche bée. Les mots suivent un tracé en arabesque qui s'enroule, se croise, redémarre, s'appuie puis se lance en spirale vers son ultime départ. Numez est justifié de parler de Musil. Entre tous les auteurs contemporains, s'il en est un qui ne cesse de hanter les pages de cet Ulric qui vit sa vie au gré des vides de sa vie. Jamais terminé, puisque la fin de l'un représente la fin de l'autre, l'écrivant. La longue marche ne se termine que dans la mort. Les fragments colligés ne changent en rien la certitude de l'illusion de la finalité. Mais n'est-ce pas précisément la passion de lire, et par extension d'écrire : prolonger aussi profondément, avec une persévérance maladive, le doute pour en finir. Comme Sisyphe.

Courrez chez votre libraire acheter cet exemplaire. Puis dégustez-le lentement. Donnez-vous la permission de douter...




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