15 juillet 2010

La lucidité est-elle un luxe?

Jacques Attali, l'économiste français mentionne :
« La lucidité n'est rien d'autre qu'une ivresse des puissants. »
Il rajoute :
« Selon leurs pères fondateurs, le capitalisme et la démocratie ne pouvaient fonctionner sans respecter des règles morales fondées sur la loyauté et la transparence. Ils sont devenus l’un et l’autre des procédures vides de valeurs, vides de sens. L’obsession de la liberté individuelle a en effet conduit à la tyrannie du caprice, et au droit absolu de changer d’avis à chaque instant, sur tous les sujets, y compris sur le respect des contrats; et donc, in fine, à l’apologie de la déloyauté. »
 En plaçant ces deux citations côte à côte, en se disant que la lucidité est la réflexion sur une décision à prendre face à un environnement fluide et donc changeant, ce serait les riches qui détruiraient notre civilisation grâce à leur habileté à posséder le loisir d'être lucide, les pauvres n'ayant pas les moyens de ne pas suivre l'esprit grégaire instinctif de l'humain.

D'où, je suis riche. Je bâtis une puissance sur la collectivité et la hiérarchie gouvernementale. Mon pouvoir décuple mes gains dans la mesure où les petits s'amenuisent jusqu'à perdre leur droit de représentativité. En effet, les gouvernements se soumettent désormais à mes caprices depuis que leur financement m'appartient. Les quelques bouchées de pain que je glisse dans leur appareil partisan me donnent un droit d'accès plénipotentiaire sur ceux que ce même appareil réussit à faire élire. Je me rappelle que l'on disait à l'époque que Robert Bourassa avait été choisi par le parti libéral après la recherche par une firme-conseil du meilleur candidat à présenter à la population. Aujourd'hui, la firme-conseil est accompagnée par les bonzes financiers. On a démontré dernièrement que les dons des particuliers étaient à la baisse; nous pouvons y voir un désintérêt, ou une impuissance ou inutilité à participer au grand cirque qu'est devenu la politique. Depuis l'arrivée de Obama, nous pourrions sans doute conclure la même chose. Le peuple a perdu le pouvoir : il consomme à outrance; il joue à outrance; il ne cherche plus à nager, il se noie à outrance...

Ce peuple n'a plus les moyens d'une lucidité. Il rêve de demains où il ne sera plus parce que ses aujourd'huis deviennent trop passifs. Shakespeare avait qualifié le monde de grand théâtre; il avait bien raison; sauf, que nous en sommes rendus aux grandes tragédies grecques avec plein d'Électres sanglantes, d'Oedipes sans domicile et d'Amphytrions trop politisés.

Dan Perjovschi

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