27 novembre 2010

Quelque part entre le fantasme et la réalité...


Certains l'aiment chaud, d'autre froid. Leur lunch? Leurs fantasmes! Le dernier né de Châteauneuf n'offre que du cru. En Tartare, dont on ignore la provenance, mais dont on finit par se délecter malgré nos craintes, malgré nos scrupules, dans l'intimité de notre lecture...
« Il venait d'aboutir dans le fond d'un cercueil, emmailloté dans des bandes de haillons, semblable à une momie profanée. Coincée à ses côtés, une autre momie, en état de décomposition avancée, le dévisageait du creux de ses orbites, l'air cynique. Malgré que la face fût fort ravagée, Saint-Amant reconnut aussitôt les traits... de son père. Et le macchabée de lui lancer :

— Enfant de chienne! T'as sali la famille! »
(Michel Châteauneuf, La Société des pères meurtriers, page 91)
Il faudrait écrire ça avec un caractère différent. Le Fu Man Chu de Charlebois est probablement allé dans le même trip que ce père en quête du meurtre de son fils délinquant. Au moins, Charlebois avait la chance de pouvoir le chanter le band en renfort. Châteauneuf nous le décrit avec force vocabulaire à un rythme enlevé : 171 pages sectionnées en vingt-quatre morceaux. Un cliff hanger sanglant et trippant à souhait. A-t-on réussi à tuer le fils? Quelques membres du SPM réussissent. Mais la vraie question n'est-elle pas : les pères ont-ils réussi à tuer leur père?


Après la Balade des tordus, les pères meurtriers nous ramènent dans la chair sanguinolente des fantasmes les plus noirs. Le plus fascinant est que ces cauchemars vampiriques s'incrustent presque familièrement dans notre vécu, comme une série de gestes qu'on aime lire parce qu'on n'a jamais osé ni les perpétrer, loin de là, ni même les imaginer dans une quelconque réalité; pourtant, que Châteauneuf les place devant nos yeux, qu'il nous mette entre les mains des pages qui contiennent ces visions, et nous devenons des voyeurs attentifs et avides comme à un match de boxe où les pugilistes se frappent leur plaie ouverte à l'arcade sourcilière, tachent leurs gants, souillent le tarmac; nous nous délectons de chaque goutte.
« Saint-Amant avait disposé sur son bureau les photos obscènes de sa fille Judith. Sur l'écran du téléviseur, la mère, Kathleen, était en train de sucer Christian, ébats filmés à l'époque de leur première année de fréquentation. Il regardait à la fois les photos et le document vidéo, ne sachant pas trop, en se masturbant, si, dans le processus fantasmatique, il jouissait dans la bouche de sa première épouse ou dans celle de sa fille. » (page 133)
 Et tout est bien qui finit bien. Une vraie american ending dont même Woody Allen serait fier. Juste un peu plus corsée... Comme le demandait une gente dame à l'auteur XXX : Avez-vous des enfants monsieur Châteauneuf? Et lui de répondre : Non madame, je n'en ai plus!... Typique de cet auteur sans plume qui gratte le texte avec un couteau dont on ignore si le rouge tient plus d'une plaie ou de menstrues.

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