24 novembre 2010

André Chénier et Angela Davis






Quelques mots pour présenter le poète de la révolution de 1789. Un républicain mort de la main des bourgeois qui volèrent la liberté au peuple français.

André Chénier
Poèmes
Une Fable
«Un jour le rat des champs»
Un jour le rat des champs, ami du rat de ville,
Invita son ami dans son rustique asile.
Il était économe et soigneux de son bien
Mais l'hospitalité, leur antique lien,
Fit les frais de ce jour, comme d'un jour de fête,
Tout fut prêt, lard, raisin, et fromage et noisette.
Il cherchait par le luxe et la variété
A vaincre les dégoûts d'un hôte rebuté,
Qui parcourant de l'œil sa table officieuse,
Jetait sur tout à peine une dent dédaigneuse.
Et lui, d'orge et de blé faisant tout son repas,
Laissait au citadin les mets plus délicats.
« Ami; dit celui-ci, veux-tu dans la misère,
« Vivre au dos escarpé de ce mont solitaire,
« Ou préférer le monde à tes tristes forêts ?
« Viens; crois-moi, suis mes pas ; la ville est ici près :
« Festins, fêtes, plaisirs y sont en abondance.
« L'heure s'écoule, ami ; tout fuit; la mort s'avance:
« Les grands ni les petits n'échappent à ses lois;
« Jouis, et te souviens qu'on ne vit qu'une fois. »
Le villageois écoute, accepte la partie :
On se lève, et d'aller. Tous deux de compagnie,
Nocturnes voyageurs, dans des sentiers obscurs,
Se glissent vers la ville et rampent sous les murs.
La nuit quittait les cieux, quand notre couple avide
Arrive en un palais opulent et splendide,
Et voit fumer encor dans des plats de vermeil
Des restes d'un souper le brillant appareil.
L'un s'écrie; et riant de sa frayeur naïve,
L'autre sur le duvet fait placer son convive,
S'empresse de servir, ordonner, disposer,
Va, vient, fait les honneurs , le priant d'excuser.
Le campagnard bénit sa nouvelle fortune;
Sa vie en ses déserts était âpre, importune.
La tristesse, l'ennui, le travail et la faim.
Ici, l'on y peut vivre. Et de rire. Et soudain
Des volets à grand bruit interrompent la fête.
On court, on vole, on fuit; nul coin, nulle retraite.
Les dogues réveillés les glacent par leur voix;
Toute la maison tremble au bruit de leurs abois.
Alors le campagnard, honteux de son délire
« Soyez heureux, dit-il ; adieu, je me retire,
« Et je vais dans mon trou rejoindre en sûreté
« Le sommeil, un peu d'orge, et la tranquillité. »

Le peuple a toujours ignoré ses alliés. La plupart du temps, il les traîne au poteau, laissant les historiens conclurent sur sa manie à sans cesse suivre la parade plutôt que de la faire. Mais pour initier le futur, il faut du courage... et de la clairvoyance.
« La révolution de 1830, c’est le règne des banquiers, de l’aristocratie financière. L’opposition à ce régime, c’est la bourgeoisie montante industrielle (la petite bourgeoisie et la classe paysanne étant complètement exclues du pouvoir politique). L’aristocratie financière utilise l’état comme un outil au service de sa classe. Ainsi, déficit et emprunt d’état favorisant cette classe sont monnaies courantes sous Louis-Philippe Ier. De plus la classe dominante exploite les dépenses publiques en procédant à la construction de chemin de fer. » (Karl Marx, La Lutte des classes en France)
Pourquoi l'histoire ne bouge-t-elle pas? Pourquoi la même rengaine ne nous offre-t-elle que systématiquement et perpétuellement le même scénario? Exploitation! Corruption! La connaissance du passé offre de multiples avantages pour jauger le présent et prévenir du futur; elle demeure toutefois une avenue souvent sombre pour la classe ouvrière. Et Chénier était à l'image de cette masse aux sautes d'humeur sauvages et sanglantes, mais éphémères, écoutant attentivement la nouvelle soumission genoux au sol et mains tendues.
« Nous devrions adopter un vigoureux multiculturalisme à teneur politique qui mette l’accent sur l’unité communautaire transraciale et sur la poursuite des luttes pour l’égalité et la justice. C’est-à-dire une unité communautaire transraciale non dans le but de créer un beau « bouquet de fleurs » ou un alléchant « bol de salade » - voilà certaines des représentations métaphoriques du multiculturalisme - mais comme moyen de combattre les inégalités structurelles et de lutter pour la justice. Ce type de multiculturalisme est doté de potentialités radicales. » (Angela Davis, Les goulags de la démocratie, p. 36)
Il y a donc espoir.

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