23 septembre 2008

Quelques mots pour fêter l'automne...

Trois longues journées! Longues? Longues au cadran pas dans la tête. Elles passèrent relativement vite tout compte fait. Alors courtes parce que plaisantes; longues parce que peu de sommeil pour les enrober. Voilà l'automne, non? Longue à cause de ses nuits qui déteignent sur le jour, de ses nuages non plus passagers, mais ambiants, de son humidité froide givrée comme le boc du congélateur qui reçoit la bière, puis humide collant quand la soleil s'invite pour terminer le jour, le temps de faire monter la rosée vaporeuse quelques dizaines de pieds avant que son coucher ne la fasse retomber brutalement pour le brunante.

Cette année, changement de scénario. Un voyage "pédagogique" à Toronto et à Niagara Falls avec les étudiants en Tourisme et en Gestion hôtelière du collège m'a éloigné de ce scénario automnal grisâtre. Quatre professeurs et une cinquantaine d'étudiants à l'intérieur d'un autobus pour plus de 16 heures en tout représente un défi en soi. Il faut bien oublier certains privilèges comme le sommeil paisible et les pensées solitaires. Le rire et les discussions les remplacent avantageusement. Quelques heures ici, quelques arrêts là, certains événements s'ancrent plus profondément que d'autres.

Une pizza à 1 h 30 du matin avec une bière en cannette sur le bord du trottoir peuplé de quelques résidus étyliques des last calls. Facile de reculer dans le temps avec un tel scénario. On se fout pas mal du goût de la bouffe ou de la fraîcheur de la bière: des calories et du liquide! Ça suffit!

Un lever de soleil à l'aube parce que tu as dormi sur le pépéroni et que tu n'es pas dans ton lit.... Un se rase, l'autre s'étire, j'en profite pour regarder dehors et voilà le résultat: hallucination et carnaval! Les couleurs explosent. la ville ne dort pas, elle est soumise par le feu du jour. Ce n'est plus l'automne, c'est la fin du monde. Et juste entre la tour et la roue, la majesté qui s'imisce, avec une rapidité incroyable: en deux minutes le voilà sorti; le voilà qui brûle tout, jaunit tout, bleuira tantôt, à nouveau, d'un drabe normal notre azur quotidien. Je vivrais bien avec ces jets et ces strates. C'est, je ne sais pourquoi, Mars!


Puis, le jour amène le vin. On frôle la rivière Niagara pendant quelques minutes. Au pied de ses falaises, encastrées entre elle et lui, la rivière sauvage et le lac massif, des vignes; des milliers, des dizaines de milliers, des porteur de baies à vin. Entre les doigts leurs raisins sont des billes chaudes. Ils sont tendres sous la pression du pouce et de l'index; ils suent du sucre collant même sans crever leur peau tendue et ferme. Ils font penser à des bulles de bain qui collent; plus volumineux, des oeufs de saumon cueillis chez la mère qui vient de rendre la vie. Ce petit fruit est bien mystérieux. Parmi les plus vieux aliments comestibles, il pousse seul serré sur une collectivité. Il ira vers l'osmose délirante avec des centaines de milliers de ses congénères. Il mijotera quelques années, quelques mois, puis renaîtra pour s'accomplir sous une personnalité totalement transformée. Le papillon est végétal cette fois; la nymphe aussi!







Après le feu céleste, le feu bacchéen, le feu nautique. L'oeil est dérangé par l'immensité du phénomène. Et naturellement, il faut faire abstraction de tout l'appareillage imbécile avec lequel on l'accouple. La chute ne peut être qu'elle-même. D'où que l'on se place pour l'observer, elle fascine. Son ampleur est difficile à calibrer. Son empire est tellement gigantesque, qu'il englobe toute notre imagination.

Elle coule. Elle se brise. Elle ne se calme que plusieurs kilomètres plus loin. Elle est la relation publique des mers intérieures avec la civilisation: indomptable, insoumise, impalpable. Elle est une présence incontournable qui menace d'absence. Elle inocule chaque esprit de sa destruction.

J'aime mon automne cette année.

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Salut Pierre,

Alors, mon vieux, la machine est repartie pour de bon. Si je commence à vous lire presque chaque jour Gaétan et toi, il faudra que j'ajoute une heure de plus devant mon ordinateur.

Superbes photos, en passant.

Tu as bien raison de souligner que l'enseignement c'est d'abord la voix et l'oreille. Le clic est utile, bien sûr, mais la voix et l'oreille sont nécessaires.

Salutations,

Christian