6 octobre 2010

Nommer le temps...



Patrick Boucheron, dont j'ai parlé il y a quelque temps pour son histoire du monde au XVe siècle, est réapparu dans mes lectures. La revue Histoire, dans un numéro spécial sur les Grandes découvertes en livraison Juillet-Août 2010, lui donne la pièce d'entrée. Comme à son habitude, il cherche à modifier la perspective habituelle; les découvertes tant vantées par l'Europe depuis le quinzième siècle en attrapent pour leur rhume. Nous apprenons en effet que cette vision «eurocentriste» - ce mot ne vous rappelle-t-il pas héliocentrisme? - ne reflète qu'une petite partie de la réalité. Ces grands voyages des Européens comportent finalement assez peu de mérite dans la mesure où ils reprenaient des circuits développés par les Asiatiques ou les Ottomans ou les Indiens bien avant eux: voilà pour l'Est et la pointe de l'Afrique. Pour l'Ouest et les Amériques, il s'agit d'accident de parcours dans lesquels les navigateurs accidentellement ou menés par le hasard aboutissaient sur de terres qu'ils tenaient, dans leur ignorance, pour ce qu'elles n'étaient pas. Encore une fois, Boucheron fait plier l'orgueil caucasien.

Ce numéro spécial vaut quelques heures dans votre bibliothèque favorite.

Je vous laisse avec cette phrase sur laquelle d'ailleurs je m'en vais méditer un peu: «Nommer le temps, c'est le politiser.» L'historien la lance en référence aux Grandes Découvertes, mais ouvre la porte à tous les exemples existants: la Belle Époque, la Directoire, le krach de 29, et plus près de nous, et voilà bien ce qui me rend songeur, le Rébellion des Patriotes, la Révolution tranquille, la crise d'Octobre...

Quel sens notre histoire accroche-t-elle à ces événements.

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