3 octobre 2010

Automne



Les feuilles du boisé à l'arrière de la maison jaunissent soudainement. Depuis quelques semaines déjà, elles fatiguaient; elles brunissaient légèrement; séchaient tristement. Les bourrasques les plus violentes ne les arrachaient pas. Le marronnier sur la gauche ratatinait et défaisait ses grandes mains. Puis, un matin, suivant une nuit noire et ouverte sur le courant d'air arctique, elles virèrent à l'or.


Le regard vers le boisé était métamorphosé. Cette beauté participe à l'éphémère. Cela ne durera que quelques jours. La prochaine brise les détachera; elles iront gésir sur le sol, là où j'irai me traîner les bottes pour entendre leur froissement typique.


 L'automne

Salut ! bois couronnés d'un reste de verdure !
Feuillages jaunissants sur les gazons épars !
Salut, derniers beaux jours ! Le deuil de la nature
Convient à la douleur et plaît à mes regards !

Je suis d'un pas rêveur le sentier solitaire,
J'aime à revoir encore, pour la dernière fois,
Ce soleil pâlissant, dont la faible lumière
Perce à peine à mes pieds l'obscurité des bois !

Oui, dans ces jours d'automne où la nature expire,
A ses regards voilés, je trouve plus d'attraits,
C'est l'adieu d'un ami, c'est le dernier sourire
Des lèvres que la mort va fermer pour jamais !

Ainsi, prêt à quitter l'horizon de la vie,
Pleurant de mes longs jours l'espoir évanoui,
Je me retourne encore, et d'un regard d'envie
Je contemple ses biens dont je n'ai pas joui !

Terre, soleil, vallons, belle et douce nature,
Je vous dois une larme aux bords de mon tombeau ;
L'air est si parfumé ! la lumière est si pure !
Aux regards d'un mourant le soleil est si beau !

Je voudrais maintenant vider jusqu'à la lie
Ce calice mêlé de nectar et de fiel !
Au fond de cette coupe où je buvais la vie,
Peut-être restait-il une goutte de miel ?

Peut-être l'avenir me gardait-il encore
Un retour de bonheur dont l'espoir est perdu ?
Peut-être dans la foule, une âme que j'ignore
Aurait compris mon âme, et m'aurait répondu ? ...

La fleur tombe en livrant ses parfums au zéphire ;
A la vie, au soleil, ce sont là ses adieux ;
Moi, je meurs; et mon âme, au moment qu'elle expire,
S'exhale comme un son triste et mélodieux.

Alphonse de Lamartine

Mon boisé s'éteint. Chaque matin, je me dirige vers la fenêtre pour vérifier son état : de plus en plus d'écorce, comme un rebut d'échasses. Je hume le suc odorant du sol qui se prépare. Plus que quelques jours. Il passera de l'or au coton.


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