22 juin 2010

La plus belle pour aller mourir

En cherchant un endroit paisible, on trouve parfois des temps morts. Ils nous font creuser le présent et découvrir des instants que nous pensions perdus. Mais ils existent encore.

Alain, Gilles et moi dans la ruelle de la rue Haut-Boc à jouer aux matamores. Pour moi, ce n'était qu'un jeu; cela ne durait jamais plus qu'un après-midi; pour eux, c'était la vie. Tous les jours, pendant que je déambulais dans ma banlieue, ils vivaient plus qu'ils ne jouaient dans ce centre-ville sale et malsain. Je suis resté le peureux qui s'est bardé de diplôme, ils sont devenus ivrognes. Ils se sont détruits.

Ainsi va la vie. Sans pardon devant la faiblesse. Dans son livre superbe « Choisir la liberté », Fernando Savater affirme que ce ne sont ni les instincts ni notre patrimoine génétique, mais notre capacité à décider et à inventer des actions à même de transformer la réalité et de nous transformer qui décidera de notre destin. Il considère que notre société étouffe l'individu sous une masse de mesures déresponsabilisantes. Ce n'est plus l'individu qui creuse dans un endroit paisible, c'est l'état systémique qui creuse pour lui et lui offre les solutions; solutions qui consistent habituellement à établir des pathologies de toutes sortes en offrant le remède dont lui seul à la recette.

Mourons avec la certitude que nous creusons nous-mêmes.

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