25 septembre 2008

Des sourires


Je sors de classe. Je viens de soumettre mes étudiants de commercialisation de la mode, d'Intervention en loisirs, de Gestion hôtelière et d'Éducation spécialisée à deux contrôles sur le XVIe siècle : un sur l'histoire et un autre sur la littérature de ce siècle merveilleux. Le livre que j'utilise pour mon cours est l'oeuvre de Miclel Laurin. J'admire le livre, le connaître, j'admirerais sans doute le personnage aussi... La masse d'information à transmettre défie toujours le professeur; comment maintenir le rythme et l'intérêt? Pas évident! Toutefois, j'aime à faire mentir les détracteurs. Mes jeunes sont curieux; ils sont studieux; ils sont alertes; ils sont capables de mémoire et de raisonnement dans la mesure où la matière est bien cernée.

Depuis deux semaines, nous avons épluché cette Renaissance. Fouillis incroyable de découvertes scientifiques, technologiques, culturelles, philosophiques, littéraires, artistiques et religieuses. Des illuminés, il en faut bien, ont suivi la filière italienne des savants de Byzance qui ont fui Constantinople pour se réfugier à Rome. Continuant son cheminement vers le nord, vers la France entre autres, cette masse de connaissances des livres de l'Antiquité a fait apparaître un merveilleux raccourci vers de nouvelles connaissances. À la suite des trouvailles mécaniques du Moyen Âge, ces informations allaient donner un essor fabuleux à la toute jeune France. C'est sur ce chemin que j'ai entraîné mes étudiants. Et ils ont suivi. Pas gratuitement, bien sûr! Le bénévolat du savoir a disparu pour cette génération. Je paie et, d'autant plus que mon collège est privé, j'exige. Mais contrairement à la mythique approche client, je crois que les étudiants veulent avoir la certitude d'un gain; ils ne désirent pas nécessairement être seuls juges des savoirs, ils exigent une clarté des acquis et de ses vérifications. Mes étudiants avaient une excellente raison de demeurer attentifs : un contrôle vérifierait leur attention. Cette situation m'a toutefois permis de leur expliquer des dynamiques très contemporaines qui s'accrochaient aux siècles passés. Ils riaient avec moi de lire les incongruités de Rabelais; ils sourcillaient devant les gauloiseries de Marot ou les invitations très directes de Louise Labbé à ses amants.

Le plaisir d'apprendre n'a pas disparu chez les jeunes. C'est l'attitude qui a changé. Si la formation est devenue désormais un partenariat, elle est aussi devenue une avenue de rentabilité. Dans la société contemporaine, les rétractions sont devenues rapides; on privilégie d'ailleurs la rapidité à l'exactitude : erreur oui, doute non! L'inconfort se trouve devant l'inconnu. Les pourquoi trouvent leur source dans l'inutilité. Nous voyons parfois dans ce jugement d'inutilité un manque de curiosité; nous avons peut-être tort; il s'agit peut-être de recherche de pertinence. Si nous parvenons à ce niveau de relation où la pertinence rencontre les événements du passé, alors les sourires et les yeux s'allument. Tout n'est pas réglé avec l'établissement de ce rapport immédiaté - pertinence -histoire -culture, mais nous pouvons y voir percer une solution.

Tant que je pourrai faire rire mes étudiants avec mes histoires des siècles passés, tant qu'ils verront en moi un trait d'union entre les fantômes des grands esprits de la culture et leur quotidienneté, il y aura aussi un sourire sur mes lèvres à la sortie de ma classe.

À la sortie de leurs deux contrôles, ce matin et cet après-midi, ils sont sortis en souriant. Non, bon, pas tous! Mais une large majorité d’entre eux. Ils étaient fiers d’eux; fiers aussi sans doute d’avoir relevé le défi de deux questionnaires sur la Renaissance. J’ai presque terminé la correction; la moyenne est bien au-delà de 80 %. Ils ont raison d’être fiers! On a raison d’avoir du plaisir ensemble.

Pour les intéressés, je laisse ici les deux questionnaires en question.

Bonne lecture!

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XVIe historique
1) Nommez les deux villes où la Renaissance débute.
a) Paris
b) Rome
c) Madrid
d) Venise
e) Florence
2) Quel événement marque la fin de l'espoir d'hégémonie du monde chrétien?
a) La chute de Constantinople
b) La victoire des Croisés
c) La découverte des Amériques
3) Associez l'événement et le personnage et le pays d'origine:
a) Découverte de Cuba
b) Invention de l'imprimerie en Europe
c) Voyage à Cathay (Chine)
d) Voyage aux Indes
e) Conquête du Mexique
f) Prise de possession du territoire de la Nouvelle-Angleterre
i) Cortès
ii) Vasco de Gama
iii) Jean Cabot
iv) Christophe Colomb
v) Gutenberg
vi) Marco Polo
(1) Angleterre
(2) Italie
(3) Espagne
(4) Allemagne
(5) Portugal
4) Le XVIe siècle se démarque donc par une véritable boulimie du savoir. Complétez le texte à l'aide de la liste de mots:
L'homme de la _________________ veut faire reculer les _________________ de la connaissance et se libérer des ______________ et des servitudes du Moyen Âge, des ______ qui l'empêchaient d'être maître de son destin. Il croit même que l'homme parviendra éventuellement au _______________, d'où une volonté très marquée de __________, de classifier et de noter tout ce que l'Univers offre à observer et à ________. S'ensuit un explosion technique et scientifique – point de départ des sciences modernes – basée non plus sur le principe d'autorité mais sur l'___________. Outre les nouvelles techniques de ___________ qui rendent possibles les voyages de découverte, les progrès de l'___________ révolutionnent la diffusion du savoir, et la _____________ progresse à pas de géant: Léonard de Vinci étudie l'
_____________ sous tous ses angles; Gabriel Fallope découvre les __________ qui portent maintenant son nom; Girolamo Fracastoro se penche sur le _______ et émet l'hypothèse selon laquelle les maladies ________ se transmettent par l'intermédiaire de ____________ invisibles. En astronomie, Copernic, contredisant les enseignements de l'________, avance sa théorie de l'_____________: ce n'est pas la Terre qui occupe le centre de l'univers, mais le ________ autour duquel elle tourne. Le « __________ » exigeant que toute théorie soit conforme à celle du __________, l'hypothèse de Bernard Palissy, selon laquelle la présence de _________ d'animaux marins à des kilomètres du rivage indique le ___________ des océans, vaudra à son auteur d'être emprisonné à la ___________. L'Église soutient en effet que tous ces fossiles sont en fait des ___________ jugés indignes par _______ au moment du Déluge et abandonnés à leur triste sort.
a) Navigation
b) Bastille
c) savoir absolu
d) micro-organismes
e) fossiles
f) superstitions
g) Soleil
h) typhus
i) Renaissance
j) trompes
k) Déluge
l) anatomie
m) animaux
n) imprimerie
o) analyser
p) contagieuses
q) limites
r) héliocentrisme
s) frayeurs
t) bon sens
u) médecine
v) Dieu
w) répertorier
x) déplacement
y) expérimentation
z) Église
5) Entre le début du XVIe siècle et la fin du XVIIe siècle, combien de personnes, surtout des femmes, ont été accusées de sorcellerie et brûlées vives?
a) 10 000
b) 8 000
c) 30 000
d) 40 000
6) Quel est l'ancêtre de la chimie moderne; cette pseudoscience voulait entre autres fabriquer de l'or à l'aide de la pierre philosophale.
a) La magie noire
b) Le spiritisme
c) L'alchimie
d) La chimie
7) La mise à feu et à sang des deux civilisations Aztèque et Maya par les espagnols entraîne une autre abomination humaine; quelle est-elle?
a) La famine
b) L'esclavage
c) La corruption religieuse
d) La destruction de la forêt amazonienne
8) Durant le XVIe siècle, la noblesse d'argent supplante la noblesse de sang.
a) Vrai
b) Faux
9) La concentration des pouvoirs autour du roi entraîne inexorablement vers quelle forme d'autorité?
a) L'absolutisme royal
b) La démocratie
c) L'anarchie
10) Quel pays s'engage le premier dans le mouvement de la Renaissance grâce à plusieurs savants byzantins qui vont s'y installer?
a) La France
b) L'Italie
c) L'Espagne
d) L'Angleterre
11) Les Médicis, les Sforza et les Este sont des familles fabuleusement riches qui s'entourent des plus célèbres créateurs artistiques de l'époque. Quel est le secteur d'activité de ces grandes familles bourgeoises?
a) L'industrie culturelle
b) L'industrie manufacturière
c) Les chantiers navals
d) Le système bancaire
12) Quel est le nom de la philosophie mise de l'avant par l'homme de la Renaissance grâce à laquelle on redécouvre le sens du plaisir, le besoin de jouir et de faire appel à chacun de ses sens?
a) Le stoïcisme
b) Le carpe diem
c) L'ergo sum
d) L'habeas corpus
13) Qui sont les responsables de l'affaire des placards?
a) Les protestants
b) Les catholiques
c) Les sorcières
d) Les nobles
14) De 1562 à 1598, quelle tuerie innommable remplit les cimetières et déchire les familles?
a) La guerre de Cent Ans
b) La guerre de Sécession
c) La bataille de Trafalgar
d) Les guerres de Religion
15) À la Renaissance, deux conceptions de la langue française s'affrontent: l'approche de l'orthographe et l'approche de la prononciation. Laquelle a gagné?
a) L'orthographe
b) La prononciation
16) Associez l'auteur, l'œuvre et son pays d'origine:
a) Shakespeare
b) Don Quichotte
c) Dante
i) Roméo et Juliette
ii) La Divine Comédie
iii) Cervantès
(1) Espagne
(2) Italie
(3) Angleterre

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Le XVIe littéraire
1. Quel système de subvention aux arts François I a-t-il instauré?
a. Le mécénat
b. Le Conseil des Arts
c. Le manifeste de la culture
2. Ce nouveau genre littéraire est héritier du développement et de l’engouement pour la philosophie.
a. Le théâtre
b. La poésie
c. L’essai
d. Le roman d’aventure
3. Le théâtre français n’a pas vraiment de personnalité propre. Quel mouvement demeure très populaire entre autres grâce à des personnages typés comme Polichinelle et Arlequin?
a. Le vaudeville
b. La commedia dell’arte
c. La comédie humaine
d. La farce médiévale
4. Quel est le nom de la première école littéraire?
a. Le Carpe diem
b. Les romantiques
c. La Pléiade
d. Le surréalisme
5. Quelle est le titre du livre qui représente le manifeste de ce courant littéraire?
a. Défense de la liberté d’expression
b. Candide
c. Gargantua
d. Défense et Illustration de la langue française
6. Identifiez les cinq principes consignés dans le manifeste de Joachim du Bellay :
a. Les poètes doivent s’établir à Rome pour mieux décrire les Trésors de l’Antiquité.
b. On souligne l’aspect élitiste de la poésie.
c. Le poète ne doit pas hésiter à imiter les anciens.
d. Les philosophes sont encouragés à écrire en latin.
e. On abandonne les genres littéraires associés au Moyen Âge au profit du sonnet qui devient la forme poétique dominante.
f. L’alexandrin renaît et la poésie recourt de plus en plus aux figures de style pour bien se distinguer de la prose.
g. Il faut convaincre le roi de cesser d’aider les artistes.
h. Le Pléiade s’engage à défendre la langue française contre l’influence des textes anciens et la résurgence du latin.
7. Quelle phrase ne cadre pas avec l’auteure Louise Labbé?
a. Installée à Marseille, elle prend soin de sa famille et écrit secrètement des vers pour son amant.
b. Belle et forte de caractère, passionnée d’escrime et d’équitation, elle n’hésite pas à se mettre en scène pour exprimer les élans de sa passion.
c. Sur le ton de la confidence, elle recrée des épisodes de sa vie amoureuse où l’homme aimé est toujours subordonné à l’amour qu’elle lui porte.
d. Cette représentation d’un homme objet lui attirera les malveillances de certains poètes masculins.
e. Dans des sonnets d’une grande sensualité, teintée parfois d’érotisme, elle dit l’allégresse de ses amours.
8. Quel poète de la Renaissance est souvent menacé en raison de ses mœurs et suspecté d’hérésie?
a. Clément de la Rose
b. Rabelais
c. Rutebeuf
d. Marot
e. Chrétien de Troyes
9. Qui a écrit le poème le Beau Voyage qui commence par le célèbre vers suivant : « Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage »?
a. Ronsard
b. Du Bellay
c. Villon
d. Marot
e. De Pizan
10. Qui a écrit ce vers du poème À Hélène… : « Quand vous serez bien vieille, au soir à la chandelle »?
a. Ronsard
b. Baudelaire
c. Verlaine
d. Nelligan
11. Marguerite de Navarre, sœur de François I et épouse du roi de Navarre, est devenue célèbre grâce à son livre :
a. Le Décameron
b. L’Heptaméron
c. Le quinquaméron
d. L’Octaméron
12. François Rabelais, reconnu comme un des plus grands médecins du royaume, fut moine, professeur d’anatomie et grand voyageur. Quels sont les trois personnages qui l’ont rendu célèbre?
a. Gargantua
b. Candide
c. Grandgousier
d. Pantagruel
e. Grandmaison
f. Renard
g. Arlequin
13. Quelle phrase définit le mieux l’Essai?
a. Le véhicule de la raison et du cœur.
b. Le véhicule des lois et de l’étiquette.
c. Le véhicule de la pensée humaniste.
d. Le véhicule du romanesque.
e. Le véhicule des arts.
14. Qui est le plus grand essayiste du XVIe siècle?
a. Montaigne
b. Villon
c. Rousseau
d. Voltaire
e. Montesquieu


23 septembre 2008

Quelques mots pour fêter l'automne...

Trois longues journées! Longues? Longues au cadran pas dans la tête. Elles passèrent relativement vite tout compte fait. Alors courtes parce que plaisantes; longues parce que peu de sommeil pour les enrober. Voilà l'automne, non? Longue à cause de ses nuits qui déteignent sur le jour, de ses nuages non plus passagers, mais ambiants, de son humidité froide givrée comme le boc du congélateur qui reçoit la bière, puis humide collant quand la soleil s'invite pour terminer le jour, le temps de faire monter la rosée vaporeuse quelques dizaines de pieds avant que son coucher ne la fasse retomber brutalement pour le brunante.

Cette année, changement de scénario. Un voyage "pédagogique" à Toronto et à Niagara Falls avec les étudiants en Tourisme et en Gestion hôtelière du collège m'a éloigné de ce scénario automnal grisâtre. Quatre professeurs et une cinquantaine d'étudiants à l'intérieur d'un autobus pour plus de 16 heures en tout représente un défi en soi. Il faut bien oublier certains privilèges comme le sommeil paisible et les pensées solitaires. Le rire et les discussions les remplacent avantageusement. Quelques heures ici, quelques arrêts là, certains événements s'ancrent plus profondément que d'autres.

Une pizza à 1 h 30 du matin avec une bière en cannette sur le bord du trottoir peuplé de quelques résidus étyliques des last calls. Facile de reculer dans le temps avec un tel scénario. On se fout pas mal du goût de la bouffe ou de la fraîcheur de la bière: des calories et du liquide! Ça suffit!

Un lever de soleil à l'aube parce que tu as dormi sur le pépéroni et que tu n'es pas dans ton lit.... Un se rase, l'autre s'étire, j'en profite pour regarder dehors et voilà le résultat: hallucination et carnaval! Les couleurs explosent. la ville ne dort pas, elle est soumise par le feu du jour. Ce n'est plus l'automne, c'est la fin du monde. Et juste entre la tour et la roue, la majesté qui s'imisce, avec une rapidité incroyable: en deux minutes le voilà sorti; le voilà qui brûle tout, jaunit tout, bleuira tantôt, à nouveau, d'un drabe normal notre azur quotidien. Je vivrais bien avec ces jets et ces strates. C'est, je ne sais pourquoi, Mars!


Puis, le jour amène le vin. On frôle la rivière Niagara pendant quelques minutes. Au pied de ses falaises, encastrées entre elle et lui, la rivière sauvage et le lac massif, des vignes; des milliers, des dizaines de milliers, des porteur de baies à vin. Entre les doigts leurs raisins sont des billes chaudes. Ils sont tendres sous la pression du pouce et de l'index; ils suent du sucre collant même sans crever leur peau tendue et ferme. Ils font penser à des bulles de bain qui collent; plus volumineux, des oeufs de saumon cueillis chez la mère qui vient de rendre la vie. Ce petit fruit est bien mystérieux. Parmi les plus vieux aliments comestibles, il pousse seul serré sur une collectivité. Il ira vers l'osmose délirante avec des centaines de milliers de ses congénères. Il mijotera quelques années, quelques mois, puis renaîtra pour s'accomplir sous une personnalité totalement transformée. Le papillon est végétal cette fois; la nymphe aussi!







Après le feu céleste, le feu bacchéen, le feu nautique. L'oeil est dérangé par l'immensité du phénomène. Et naturellement, il faut faire abstraction de tout l'appareillage imbécile avec lequel on l'accouple. La chute ne peut être qu'elle-même. D'où que l'on se place pour l'observer, elle fascine. Son ampleur est difficile à calibrer. Son empire est tellement gigantesque, qu'il englobe toute notre imagination.

Elle coule. Elle se brise. Elle ne se calme que plusieurs kilomètres plus loin. Elle est la relation publique des mers intérieures avec la civilisation: indomptable, insoumise, impalpable. Elle est une présence incontournable qui menace d'absence. Elle inocule chaque esprit de sa destruction.

J'aime mon automne cette année.

17 septembre 2008

L'enseignement sans écran

L'enseignement ne rivalise avec aucune autre profession : elle règne en maître absolu et... éclairé! La publicité au poteau! La réalité à l'affiche! L'acte d'enseigner demeure le geste humanisant le plus posé de par le monde. Jour après jour, tout le long des mois année après année, des professeurs de tous les niveaux travaillent d'arrache-pied à faire comprendre le monde et ses merveilles. De mille façons, à des milliers de cerveaux différents quelque part et semblable dans leur intimité biologique. Aucune profession ne détient de pouvoir comparable et personne n'a le droit de mettre en doute la volonté des artisans qui ont le courage de retourner à la lutte contre l'ignorance.

Les journalistes, appuyés par certains professeurs et des sondages au financement tordu et aux interprétations sensationnalistes, ne cessent de pourfendre les qualités et compétences de nos étudiants. C'est la mode! Rien n'est bon... La santé fout le camp; les politiciens sont véreux; l'économie défaille; les familles s'émiettent; les assistés sociaux végètent... La liste pourrait s'allonger. Je vais danser à un autre archet, car selon moi, ces malaises dont les médias font des choux gras ne valent pas plus que la valeur de récupération du papier sur lesquels ils sont imprimés.

Mon abandon des instruments informatiques cette année, rend encore plus évident cette relation humaine essentielle au progrès humain. Il faut chercher toujours à l'améliorer; il faut aussi cesser d'en critiquer aléatoirement les résultats de façon étroite.

Mon opinion ne compte pas statistiquement. J'en suis bien aise! Elle n'en reflète pas moins ma réalité. Elle est donc, à défaut d'être représentative, véridique.

Cette session d'automne 2008 : quatre groupes; 112 étudiants; deux du secteur professionnel et un de Science nature; un dernier mixte secteur professionnel et préuniversitaire. Nous entamons présentement la cinquième semaine. Comme je le mentionnais dans l'article précédent, je n'utilise plus l'informatique, je rencontre mes étudiants quatre heures par semaine par groupe en vue de l'atteinte de la compétence finale du cours de français 601-101: la rédaction d'une analyse littéraire de 700 mots.

Je divisais, les années précédentes, les quatre en deux blocs : deux heures en classe traditionnelle et deux heures dans le laboratoire informatique. Les heures en classe servaient habituellement à la présentation de la théorie littéraire sur l'analyse littéraire et à des ateliers; j'utilisais le laboratoire pour du travail en ligne sur l'histoire littéraire et les extraits de diverses époques. Cette session-ci, tout se fait en classe.

Ce retour au magistral confirme mon glissement depuis dix ans vers une presque obsession des instruments d'enseignement. Je me souviens d'une conversation à un congrès sur les technologies de l'information avec un futur ingénieur pédagogique. Je découvrais que l'atteinte des compétences dont me parlait mon directeur des Études, celle-là même qui m'obligeait à revoir de fond en comble mes méthodes de transmission du savoir, s'appuyait sur une science exacte dans le secteur de l'ingénierie. Moi, le roi des cancres en cartésianisme, je me mis à scruter avec ce futur maître du savoir savoir les fondements de cette grotte. Je m'aperçus rapidement que si les stalactites pullulaient, les stalagmites peinaient; en effet, les théories fusaient de partout, humectaient la moindre crevasse, dégouttaient sur tout en bas sans réserve, sans discrimination; si la projection de son application se vendait assez bien chez les programmeurs, rien n'existait pour le travailleur en classe. Ce fut, toutefois, un encouragement extraordinaire pour poursuivre le chemin que je traçais pour mon enseignement littéraire. J'y entrevoyais mille et une avenues fertiles pour mes activités de formation. Dix ans plus tard, après avoir entendu les sirènes, combattu le Minotaure, traversé le Charron, je n'ai jamais pu séduire Pénélope. Elle jouait allègrement à Warcraft en ligne avec les Olympiens.

Je revins donc tout penaud dans mon petit Lyré. En classe, devant de bonnes vingtaines d'individus, je ressasse les notions historiques et littéraires des siècles passés. Je joue à la vedette. Mon public captif ne se trouve pas en communication grâce à un écran. Le contact est direct et immédiat; pour reprendre la terminologie informatique, nous sommes en synchrone; nous sommes aussi in vivo. À la fin de mes cours, je me souris souvent intérieurement. J'ai aimé ma performance. Je crois qu'ils ont appris quelque chose; ils ont posé des questions; nous avons communiqué à l'aide de la bonne vieille méthode : la voix et les oreilles. On n’a pas construit Rome en quelques jours, mais tout y mène. Reviendrai-je un jour au virtuel? J'y suis toujours, vous en êtes la preuve. Pour mon enseignement? Je crois qu'il reste du chemin à faire avant trouver la solution idéale entre la personne et la machine. Je ne retournerai sûrement pas sur le même sentier. La solution est ailleurs. Le virtuel n'est pas fait pour les notions traditionnelles. Il faut l'utiliser pour des acquisitions différentes, concurrentes, réactionnelles. On verra...

16 septembre 2008

Le luxe relativisé


Il fait soleil. Ce matin, je me suis arrêté au Parc portuaire pour prendre quelques photos. Un luxe : mardi matin, sur un des bancs, un vieillard assis au soleil; un plus jeune promenant son chien. Presque personne! Et moi avec mon appareil photo à faire quelques clichés sans prétention. Je n'ai pas de cours le mardi; j'en profite pour corriger et préparer des cours et lire.

Au début de la session d'automne, j'ai totalement délaissé l'informatique, mon compagnon, plutôt drogue, que j'utilisais de plus en plus systématiquement depuis dix ans. Je me sens en vacances. Ne plus travailler dans le sous-sol avec le ronronnement des trente ordinateurs me soulage déjà; ne plus avoir à répondre à des dizaines de courriels de mes étudiants me libère; ne plus me préoccuper de suivre le cheminement individuellement de chacun me redonne mes soirées; toutes les mises en ligne de tous les documents et la programmation de tous les contrôles et examens en plus de leur mise en ligne, la cerise sur le gâteau. D'esclave, je deviens maître de mon horaire. Quelques photos sur le quai un mardi matin, hum! Une promenade au Luxembourg sous la bise de fin septembre. Quel luxe!

Je rêve de gagner une somme mirobolante à la loterie. Je place mes richesses imaginaires. Je jalouse les bourgeois qui déroulent leurs vacances en devises étrangères et en îles du Pacifique. Je n'ai pas accès à ce genre de luxe. J'y aspire, je n'en fais pas une affaire de survie. L'argent que je gagne ne me suffit pas; j'en veux plus pour profiter plus; toutefois, je ne veux pas plus de responsabilités, ni plus de temps consacré au travail — consacré, terme intéressant faisant penser à la sacralisation de la vie qui passe. Si j'avais une fortune, j'écrirais plus et je me promènerais plus souvent; et, bien sûr, je voyagerais plus souvent. Ma vie n'est pas mal pour autant. J'en ai déjà plus que beaucoup, plus que plusieurs, pas plus que j'en voudrais...

Mes voyages m'amèneraient aux confins de mon imagination. Trois-Rivières fut le berceau de plusieurs explorateurs intrépides. Mon préféré est Radisson; à cheval entre le nomadisme et la finance. Très beau personnage Radisson. Il ne s'est pas rendu aux Rocheuses comme son concitoyen Lavérendrye, mais le sud des Grands Lacs n'avait plus de secrets pour lui. Je relirais On the road de Kerouac et L'Oeuvre au noir de Yourcenar. Le premier pour un itinéraire et le deuxième pour le rêve. Puis je mettrais Ivanhoe et Les trois mousquetaires, pour le héros et pour la quête. Mais dans ma besace, dans la poche de façade, une version usée en Livre de Poche de L'Homme sans qualité de Musil pour les longues nuits en solitaire dans les campements de fortune. Dieu que la lecture est bonne!

Je suis riche! Je suis en vacances puisque j'aime ma profession; j'aime la vie parce que j'aime ma conjointe; j'aime mon futur dans le regard de mes enfants. Ma vie n'est pas faite que d'espoir, il y a plein de tout de suite.

J'imagine Radisson à la fin de sa journée. Aussi difficile qu'elle ait pu être, il dormait bien. Sur la rocaille ou le lit de sapinage, dans une caverne ou un tipi, toujours entouré de son canot et de son ravitaillement, la nuit l'envahissait jusqu'à l'aurore. Son lendemain ne se révélait jamais avant l'heure. Pourtant, le doute ne faisait pas partie de ses questionnements : quelle direction? quel rapide? quel portage? quelle bourgade? quel animal? quel gain? Pas de peut-être! En avant, en aval ou en amont, vers le lointain ou vers la maison, en avant, toujours, à se prouver face à cette nature où il trouvait une formidable compréhension mutuelle.


Il fait soleil. Ce matin, je me suis arrêté au Parc portuaire pour prendre quelques photos. Un luxe: mardi matin, sur un des bancs, un vieillards assis au soleil; un plus jeune promenant son chien. Presque personne! Et moi avec mon appareil photo à faire quelques clichés sans prétention. Je n'ai pas de cours le mardi; j'en profite pour corriger et préparer des cours et lire.


Au début de la session d'automne, j'ai totalement délaissé l'informatique, mon compagnon, plutôt drogue, que j'utilisais de plus en plus systématiquement depuis dix ans. Je me sens en vacances. Ne plus travailler dans le sous-sol avec le ronronnement des trente ordinateurs me soulage déjà; ne plus avoir à répondre à des dizaines de courriels de mes étudiants me libère; ne plus me préoccuper de suivre le cheminement individuellement de chacun me redonne mes soirées; toutes les mises en ligne de tous les documents et la programmation de tous les contrôles et examens en plus de leur mise en ligne, la cerise sur le gâteau. D'esclave, je deviens maître de mon horaire. Quelques photos sur le quai un mardi matin, hum! Une promenade au Luxembourg sous la bise de fin septembre. Quel luxe!

Je rêve de gagner une somme mirobolante à la loterie. Je place mes richesses imaginaires. Je jalouse les bourgeois qui déroulent leurs vacances en devises étrangères et en îles du Pacifique. Je n'ai pas accès à ce genre de luxe. J'y aspire, je n'en fais pas une affaire de suvie. L'argent que je gagne ne me suffit pas; j'en veux plus pour profiter plus; toutefois, je ne veux pas plus de responsabilité, ni plus de temps consacré au travail - consacré, terme intéressant faisant penser à la sacralisation de la vie qui passe. Si j'avais une fortune, j'écrirais plus et je me promènerais plus souvent; et, bien sûr, je voyagerais plus souvent. Ma vie n'est pas mal pour autant. J'en ai déjà plus que beaucoup, plus que plusieurs, pas plus que j'en voudrais....


Mes voyages m'amèneraient aux confins de mon imagination. Trois-Rivières fut le berceau de plusieurs explorateurs intépides. Mon préfére est Radisson; à cheval entre le nomadisme et la finance. Très beau personnage Radisson. Il ne s'est pas rendu aux Rocheuses comme son concitoyen Lavérendrye, mais le Sud des Grands Lacs n'avaient plus de secret pour lui. Je relirais On the road de Kerouac et L'Oeuvre au noir de Yourcenar. Le premier pour un itinéraire et le deuxième pour le rêve. Puis je mettrais Ivanhoe et Les trois mousquetaires, pour le héros et pour la quête. Mais dans ma besasse, dans la poche de façade, une version usée en Livre de Poche de L'Homme sans qualité de Musil pour les longues nuits en solitaire dans les campement de fortune. Dieu que la lecture est bonne!

Je suis riche! Je suis en vacances puisque j'aime ma profession; j'aime la vie parce que j'aime ma conjointe; j'aime mon futur dans le regard de mes enfants. Ma vie n'est pas faite que d'espoir, il y a plein de tout de suite.

J'imagine Radisson à la fin de sa journée. Aussi difficile qu'elle ait pu être, il dormait bien. Sur la rocaille ou le lit de sapinage, dans une caverne ou un tipi, toujours entouré de son canot et de son ravitaillement, la nuit l'envahissait jusqu'à l'aurore. Son lendemain ne se révélait jamais avant l'heure. Pourtant, le doute ne faisait pas partie de ses questionnements: quelle direction? quel rapide? quel portage? quelle bourgade? quel animal? quel gain? Pas de peut-être! En avant, en aval ou en amont, vers le lointain ou vers la maison, en avant, toujours, à se prouver face à cette nature où il trouvait une formidable compréhension mutuelle.
Prendre le large n'est pas nécessairement une question d'espace ou de moyen. ne s'agit-il pas simplement de trouver le courage de prendre le temps à notre disposition pour vivre. Le luxe n'est pas une cage dorée. C'est s'offrir l'horizon pour admirer le miroitement de notre futur.

15 septembre 2008

La solidarité

Les premières pages de nos quotidiens ces jours-ci débordent de thèmes électoraux. À leurs côtés, nous trouvons quelques autres nouvelles qui, de plus ou moins prêt, y sont reliées. De nos jours, tout est politique. Notre société est devenue l'esclave de l'État. Encore ce midi où trois ex-politiciens ergotaient sur le futur lointain encore du Centre hospitalier universitaire de Montréal comparant sa situation à celui du Centre universitaire de santé McGill, lui, à quelques jours de sa première levée de terre, nous ne pouvions entendre que Premier ministre par ci, ministre par là, alliés de l'opposition en dessous, choix du ministre par dessus... Taratata! On n'en finit plus. C'est maladif. Ah! C'est sûr, les anglos, ils se serrent les coudes quand ils veulent quelque chose, pas comme nous: des mariolles dans une comedia de'll arte!

Les anglos sont bicaméraux : ils aiment leur reine pour le symbole d'une puissance inatteignable et impériale; ils ont inventé la démocratie, tué leur roi, pour le remplacer et le placer en chapelle ardente sous le feu d'un parlement. Ils sont bizarres ces engins. Mais ils s'enfargent rarement dans les fleurs du tapis. Ils fabriquent, font de l'argent, partagent peu et donnent beaucoup... Allez comprendre! McGill est un des plus grands propriétaires immobiliers du Canada... grâce à qui? À des anciens qui leur lèguent continuellement des immeubles ou des droits en usufruits. Ils sont solidaires ces brits.

Les germanos carburent à la spirale. C'est ce que m'avait mentionné Margaret Krall, une Allemande d'environ 35 ans à l'époque, qui avait épousé le riche propriétaire de la maison où elle était femme de ménage; imaginez, elle avait 24 ans au mariage et lui 64. Pour elle et sa famille, sauvées in extremis du razzia de Hitler, traversant les Alpes à dos d'âne pour aboutir en France d'où ils s’embarquèrent pour l'Amérique, le riche, ça signifiait le salut. Alors, elle a pris la vie comme on achète un char usagé qu'on ne pourrait jamais se procurer neuf. Et bien sûr, quand il est mort, sa vie a commencé. Alors la spirale, c'est qu'il n'y a jamais vraiment ni commencement ni fin. Peu importe le moment où tu décides d'embarquer dans le cycle, ce n'est qu'à ce moment-là que tu peux faire, créer, bâtir quelque chose. Madame de Staël n'a pas dit autre chose dans De l'Allemagne, oeuvre majestueuse sur le romantisme. Wagner monte et monte, descend encore et encore; il envoûte comme les anneaux du serpent... sans queue ni tête. Hitler n'est rien d'autre que cette image d'un slinky qui descend, qui s'affaisse et qui attend paisiblement qu'une autre poussée vienne repartir le bal. Le mur : cette séparation, qui comme le foetus a créé deux puissances. Sa chute, qui a fait renaître l'empire en devenir qui gravit silencieusement toutes les sphères du pouvoir international dans un stoïcisme mystérieux.

Les francos? Ils pleurent de voir leur roi déguisé, leur président faire trop people. Ils se trompent : Sarkozy, c'est Louis XVI, et Carla, Marie-Antoinette. La révolution? Non non! Ils sont trop nounours et endormis. Ils sont comme nous, les cousins francos de l'Amérique : en attente de l'État pour qu'il les prenne un peu plus en charge. Déçu par les socialistes de ne pas les avoir bordés, ils tuent le compagnonnage et cherchent à droite comment refaire la monarchie démocratique qui les déculpabiliserait et les protégerait. Sarkozy les rend malades, mais ils l'aiment. Ils ne font plus rien. Comme me mentionnait mon prof de socio au collège dans le temps, les Français vivent avec Napoléon dans la tête depuis qu'ils l'ont perdu. Si je pouvais voyager dans le temps, j'irais faire un tour dans le gouvernement de Vichy. Je chercherais à me faire repérer par les résistants, avec un peu de chance je croiserais Malraux, et quelques autres poilus. Ils ont tous dû fuir dans les campagnes à siroter leur cassis. On n’a rien à leur envier : les francos d'ici rongent du liège au lieu de moucheter de la poudre.

Alors, continuons à nous chicaner, à se fendre mutuellement, à n'aller nulle part. On devrait jouer au roi du silence. Les gueulards des médias sentent le poisson. À force de fouiller les poubelles, j'espère qu'ils attraperont quelque virus mortel. Si la solidarité pouvait prendre racine, ils pourraient tenter de lui donner un peu de terre au lieu de continuellement lancer du sable et de la vase. Un consensus se bâtit, ce n'est pas un phénomène de génération spontanée. Les anglos se serrent les coudes? Ils ont peut-être tout simplement compris que l'évolution ce n'est pas seulement la division cellulaire; c'est aussi la parthénogenèse.

Et les germanos? Le rapport? Sont comme les vendeurs de diamants : ils possèdent ce que tu désires le plus, et quand tu peux l'avoir, c'est encore eux qui ramassent le total... ;-))

Bonne vie!

14 septembre 2008

La chaude pisse automnale


Quelle grossièreté!




Pourtant, alors que je regarde par ma fenêtre les véhicules de tout acabit déambulés sur le pont dans cette ouate chaude et humide de mi-septembre, je ne peux que penser qu'à l'urine (ouf! voilà un terme plus approprié) qui, immanquablement, vous frise sur les mains quand vous devez remplir votre petit codet du laboratoire. Et encore, je me réjouis, et vous en choeur messieurs, imaginez si vous étiez une femme. Une amie dont le conjoint possède une boutique de chasse et pêche me montrait, à cet effet, l'autre jour, un appareil, sorte d'entonnoir à l'alllure étonnamment fallique, pour permettre à la gente chasseresse féminne de pisser vers l'avant sans dégât. Dieu! Ce qu'on peut trouver dans une boutique chasse et pêche de nos jours. Pour la amateurs cherchez cette appareil juste à côté des lampes de poche...

Donc, dans l'attente de Ike le terrible balayeur des côtes texannes, je pompe de ma porte-patio cet air aux allures de sueurs sportives. Été bizarre, automne similaire. Peut-être devrais-je recycler plus de rebus, je mériterais plus de soleil.

Les RV commencent à glisser vers le Sud. Petit, moyen ou gros, à selette ou non, un deuxième morceau de famille en remorque, ils vrombissent dans un nuage de pluie. La grande migration est entamée. Qu'est-ce que je foue ici?

Rien ne vient à qui sait trop attendre. C'est l'histoire de bien des peuples. Les proverbes usent nos cerveaux plutôt que nos semelles. Ce côté de la réflexion est plutôt vicieux. Souvent, je dis à ma conjointe que ce serait bien de s'assoir devant un bon feu de foyer et comme nous n'en avons pas, cette phrase nous permet de hocher la tête d'abnégation devant le malheur. La pluie tombe: on attend le soleil. On ne fait rien: on attend le bonheur.

J'envie parfois les images de ne jamais refléter que ce qu'elles sont. À deux dimensions, c'est plus simple. Dès la troisième, on ajoute la profondeur; et alors là, quand on s'embarque à miroiter la quatrième... Foutu! On s'embarque pour la gloire, celle de l'impossible quadrature du cercle.

J'aime encore mieux essayer d'être heureux....


12 septembre 2008

L'héliocentrisme


Le roi Louis XIV adopta le surnom de Soleil: tout le monde tourne autour de moi. Il signa le Décret de fondation de l'Académie française : texte rédigé à la demande de Richelieu. Bien bon monde ces gaillards!

La clique des aristocrates aux talons pointus typiques, Versailles les dorlotait gentiment et en grandes pompes. Comme disait Beaumarchais par la bouche de Figaro au sujet de ces courtisans : « Recevoir, prendre et demander, voilà le secret en trois mots ». C'était le Leche avant le mot — et l'association. Qui dit grossesse ne dit pas grossièreté, mais qui dit bon parler n'implique pas nécessairement préciosité. Molière en fit la preuve. Un oeuf cuit résiste mieux que celui qui sort de la poule. Toutefois, c'est l'intérieur qui, après la gestation, craque lui-même la coque. On y vient...?

Le plus embêtant dans les niveaux de langue, ce sont les stéréotypes qu'ils promènent. Et les préjugés bien sûr! Si je parle gras, je suis gaillard, de gauche, sans aucun doute franc et digne de confiance; si je parle pointu, j'hérite parfois de l'homosexualité, souvent de la tromperie, du snobisme, du factice et du maquillage. Langue de bois versus langue du bois. Et là, je ne décrirai pas tous les étages de notre idiome, nous n'en finirions plus. Je suis contre les préjugés. Et les stéréotypes. La langue française est ce qu'elle est. Il faut vivre avec son histoire. Et son évolution. Qu'on l'écrive de la façon que l'on voudra, la norme bouge, mais très lentement. On a vu la levée de boucliers à l'automne dernier quand l'Académie a donné sa bénédiction à quelques centaines de simplifications lexicales et grammaticales. Ces dernières changent le français. Les pontifes ont dû y venir, car la pratique force l'évolution. Encore chanceux qu'elle change notre langue : cela illustre sa vitalité.

Alors, va pour l'identification de parler avec son personnage. Mais non à la marée de la langue familière. Jamais je ne pourrai négocier la richesse du vocabulaire, sa précision et sa profondeur contre des raccourcis aussi veules qu'imprécis. Quant à la syntaxe, nous devons y porter un soin tout à fait particulier. Si les Celtes n'ont pu cultiver leurs dialectes, c'est en grande partie parce qu'ils ne pouvaient l'appuyer sur une écriture originale basée sur leurs paroles. Le verbe a besoin de l'écrit pour se perpétuer; l'écrit peut facilement se passer du parler, la preuve étant la survie (je n'ai pas dit la popularité) du latin et du grec et autres langages du passé. Les linguistes s'accordent pour confirmer que la syntaxe est essentielle à la croissance d'une langue : vous perdez votre syntaxe, il ne reste que le vocabulaire à interchanger? Piouf! Voilà votre langue en maladie chronique!

Que Tremblay s'amuse avec le joual, bien! Mais je ne l'ai jamais entendu parler avec cet idiome. Et outre ces pièces de théâtre (que des paroles) et ses dialogues (dans sa prose), le reste est dans un français très correct.

Alors, Gaëtan le prolifique, le preux! Toi qui m'amènes dans les dédales de tes contes hypertrophiés et maléfiques, je veux lire ta voix et entendre celle de tes personnages.

Bravo et bon souffle écrivain émergeant!






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11 septembre 2008

À la bastille!


Je veux chanter. Je veux voyager dans le temps et devenir Gavroche. Je veux porter les armes à Waterloo, n'importe quel côté, juste pour vivre l'histoire... Parce que présentement on qualifie les élections américaines de « One in a life time» et que la nôtre ici est censée être déterminante pour le futur de notre pays. Quelle illusion! Faut vraiment se faire ramasser à la petite cuillère pour coller à de telles balivernes.

Nous aimons à nous leurrer des petits pièges et nous vantons d'en découvrir les détours. Petits hommes de petites histoires. Nous partageons Américains que nous sommes nos espoirs pathétiques et les observons à la loupe. Nous cherchons notre fierté à appartenir à une des plus formidables civilisations terrestres. Celle-là qui a pris une immense jungle et qui l'a domestiquée. Mieux et plus grand que même Gengis Khan ou Alexandre, dépassant de loin les exploits de tous les Césars réunis, nous sommeillons doucement devant nos écrans, messagers colorés de courtes-pointes folkloriques.

Je parlais de Cortès cette semaine; de Marco Polo aussi; de Gutemberg et de Cabot. Vous imaginez-vous la superficialité de nos doutes et de nos débats. Même nos coureurs de bois, héros découvreurs de notre vaste territoire, jouent les figurants. Ils auraient d'ailleurs tous foutu le camp devant ces politicailleries. Mais c'est tout ce qui nous reste. Jouer les découvreurs de sornettes domestiques.

Je ne nie pas l'intérêt de ces gestes. Ils gardent de toute évidence une signification certaine et une importance relative pertinente. Il serait, toutefois, tellement agréable de replacer ces questionnements, de les mettre en perspective et de leur accorder la place qu'ils méritent. Cessons de grossir impunément les petits riens pour se rendre intéressant.

10 septembre 2008

Simplement déchiré!



Cher Gaëtan Bouchard,

Je ne lis pas toute ta production par manque de temps. Par contre, j'en lis assez de phrases et assez régulièrement pour la goûter et y retourner pour une deuxième bollée. Je n'ai pas encore contacté la listériose ou autres bibittes microscopiques. Bon signe! Je te réponds à partir de mon blogue pour susciter un peu d'action. Tu connais ça n'est-ce pas? Faut dire qu'après plusieurs mois de silence, pas évident pour les lecteurs s'il y en avait. Bémol... Mais, bon...

J'aime ton style. Toutefois, comme le dit mon titre, je suis déchiré. Ma chemise est toujours intacte; mon moral aussi : je ne perds pas de sommeil sur ton écriture. Mais voilà : je suis professeur de français! Comment veux-tu que je cautionne tes rabelaiseries? En fait, nous sortons à peine du chapitre du Moyen Âge mes étudiants et moi. Tous ces alchimiques méandres plus ou moins barbares que je scrute depuis des années me fascinent. Les Goths des quatre coins des Caucases et des steppes ont détruit l'Antiquité romaine et, bien sûr, buté contre la musulmane pour la fameuse et combien intéressée conquête de la tombe du Christ à Jérusalem. Ça fait penser à Bush en Iraq; ça maintient un calme relatif à la maison et de l'argent plein la forge. Mais on a dû attendre longtemps avant de retrouver un semblant de littérature! Des lustres, avant de foutre une baffe aux cléricaux liseurs de bréviaire morons qui tenaient le peuple dans l'ignorance et couchaient avec les potentats. Alors, si je suce la substantielle moelle, je ne veux pas gruger mon os. J'aime bien ma civilisation finalement. Gutenberg est mon héros; Gates, ma passerelle! Gaëtan! Le françoé de douze cents avait encore des mailles dans l'oesophage et Rabelais quelques poussières dans le collimateur.

Cette semaine, je commence à aborder la Renaissance avec sa boulimie de connaissances. Chaque session, je me fascine moi-même quand, devant mes étudiants, je procède à ma description, ce catalogue ahurissant, de ces quelques années où on a voulu prendre le raccourci du connu antique pour gambader gaiement vers des découvertes qui bouleversèrent notre civilisation. Allô Montaigne, un café? Avec Marot? Hé! À la bonne citerne!

Je te le reconfirme : j'aime ta parlure. Mais je ne peux l'endosser totalement. Je sais pertinemment que ta culture est vaste; que ton courage est à toute épreuve. Mais j'aime moins que ta langue cherche son originalité dans la forme plus que dans le mot. Je te choque : désolé. Remarque que je t'envie cette rage lexicale qui fait un peu penser à ces hordes de peuples nomades qui envahirent l'Empire romain pour la détruire, bien sûr, mais aussi pour nettoyer une société salie à un point de non-retour. Gaëtan le nettoyeur! ;-)

Porte ton message! Je lui souhaite longue vie!

Amicalement!

Pic

9 septembre 2008

Isabelle Saulnier




Je n'ai jamais eu de longues conversations avec Isabelle. Que des bonjours et quelques bribes dans le stationnement ou un des corridors du collège oû on enseignait ensemble. Elle et ses congénères vivaient au sous-sol: Santé animale et ses cages, son laboratoire et sa salle d'opération, habitaient dans du béton, pour le meilleur et pour le pire.



Pour une raison ou une autre, la conversation dont je me souviens le mieux demeure celle où l'on avait parlé de Handball. Je ne sais trop comment nous étions arrivés à parler de ce sport, mais Isabelle le connaissait très bien. Elle avait même joué en Europe dans une ligue semi-professionnelle.

-C'est un sport extraordinaire.

-Oui, de la vitesse, de la force, les réflexes...

-Et cet instant, arrivant devant le but adverse, où tu te projettes dans les airs avec le ballon collé sur le corps... Arrêt du temps. Pendant quelques fractions de seconde, tout s'arrête. Tu as dépassé la ligne des buts, ton trois secondes s'achève, tu fixes le gardien mais tes yeux ont tout le filet dans la mire...

-Ouais! Dans les airs en suspension, et tu décides où tu vas lancer ton ballon pour compter. Comme un arrêt du temps, comme un temps où plus rien n'existe que toi et le gardien. Tu n'entends plus rien. Ton corps s'arque vers l'avant. tes pieds nagent dans le vide. Ton corps est trempé et tu sens l'eau soudainement dans un courant d'air sur ton front. Ta bouche s'ouvre très grande, et tu cries...

-Tu cries de rage, un cri primaire, et tu lèves ton bras bandé comme une catapulte, et le ballon explose vers le point que tu veux de toutes tes forces.

-Puis plus rien. Tout est fini. Ce n'est même pas important d'avoir réussi ou non. Tu as vécu ton moment et tu retournes dans ton territoire pour reprendre le jeu. Et tu espères jusque dans le tréfond de ton âme que tu vas reprendre le ballon pour recommencer.

-Ta vie pour sauter avec le ballon à nouveau pour essayer de vivre pour vrai.

La cancer ne t'a pas tué. Il t'a juste un peu éloigné du jeu...

Merci Isabelle Saulnier. T'étais une vraie.

Adieu.

Pierre

8 septembre 2008

Hommage à mes filles


Merci Miriam, Ève, Laurence et Emma!


Ce matin, regardant Laurence gravir les marches de l'autobus scolaire, Emma a éclaté en sanglots. Elle voulait suivre sa grande soeur à l'école.

— Encore quelques années, tu iras aussi entamer ton parcours d'apprentissage. Comme Miriam et Ève, voilà quelques années.

Difficile à décrire le bonheur de voir ses enfants se lancer des défis qui donnent des frissons; la grandeur de leurs ambitions, puis l'ampleur du risque, vous font passer des nuits blanches. Oh! Vous apprivoisez bien, lentement et sûrement, les étapes de leur vie. Toutefois, ils arrivent toujours à vous remettre sur le qui-vive : père un jour, père toujours. Miriam apprend à frayer dans une multinationale; Ève se taille un écrin dans la grande, l'immense, ville de Toronto. Laurence s'élance vers sa maternelle. Alors, ma petite Emma, calme-toi lorsque ta soeur s'éloigne. Tu y parviendras aussi à ce monde qui exigera le meilleur de toi. Tu auras tes bonheurs et tes malheurs; tes gloires et tes misères; tes succès et tes échecs. Je tenterai de t'accompagner; mais même quand je ne serai pas à tes côtés, je t'accompagnerai tout de même. Un compagnon de route comme grand-papa Ernest l'a été pour moi. Une bouée de sauvetage quand le vent est trop fort ou que la brume est trop épaisse. Aujourd'hui, c'est plutôt ta grand-mère Bibianne qui sert de guide quand les remparts risquent de céder. On va la voir souvent pour lui dire un mot. Alors moi aussi, je serai toujours quelque part à attendre tes messages. Ne t'inquiète pas, je t'entendrai, comme je crois avoir entendu tes soeurs malgré de grandes distances et de longues absences. Je te suivrai avec mes yeux, avec mon coeur. Et je tenterai de dormir paisiblement, inutile espoir, en faisant confiance au destin et à ta force. Je tenterai de rationaliser mon absence ou la distance qui pourra parfois nous éloigner l'un de l'autre.

Merci mes filles! Si les deux dernières ralentissent la gangrène des années, les deux aînées représentent le meilleur modèle que l'on puisse espérer.

Merci Miriam, Ève, Laurence et Emma!

6 septembre 2008

Le référent (Élection canadienne 001)

Référent : objet du monde auquel un signe fait référence, en tant qu'il est déjà perçu à travers un filtrage cognitif et culturel. Il se distingue donc de l'objet-en-soi (Saussure)Lisez ce texte, je vous rejoins au bas.


Le signe et le sens :La langue est un système de signes et un signe est une image acoustique ayant unsens — un signifié. Ainsi, un signe n'est pas visible : il n'est qu'audible. Il faut donc distinguer soigneusement la conception classique du signe de la conception de Saussure. Car celle-ci compare le mot avec un signe dans le sens propre de ce mot; c'est-à-dire que le signe est une chose visible (par exemple un drapeau) qui renvoie à ce qu'il veut dire. En latin, signum, comme en grec semeion ont une telle signification. D'où la différence visible entre le signe — chose visible — et ce que le signe veut dire. Dans ce sens, il n'y a pas de signelinguistique avant l’écriture. C'est le mot écrit qui dissocie le mot de ce qu'il veut dire et cette séparation peut ainsi rendre le mot écrit comparable au signe visible. Référent et mot écrit surgissent en un même geste et le mot devient un signe qui remplace quelque chose. La question est seulement en quel sens? Et la réponse est que ce rapport est modelé sur le mot qui semble avoir une relation immédiate à son référent et qui semble lui appartenir; c'est-à-dire le nom propre. De cette façon, le mot peut avoir une relation à son référent parce qu'il est le nom de ce référent; il est ce qu'il nomme proprement selon le modèle du nom propre. Signer, c'est écrire son nom qui est là sur la feuille en l'absence de son référent nommé. Ainsi s'institue le cercle de la philosophie entre le mot et la chose — ou plus généralement — entre le mot et le référent. À partir de ce cercle, c'est le référent et le problème du sens quideviennent importants et la discussion philosophique se concentre sur le statutdu référent et sur le lien entre les deux (choses, idée, signification, etc.). Ce qui est présupposé, c'est que le mot est un nom. Le nominalisme convient donc pour Platon aussi bien que pour Aristote, et il détermine aussi bien le naturalisme que le conventionnalisme comme les deux prises de position sur le rapport entre le mot et le référent. Dans la grammaire, ce cercle soutient la thèse, quant au parallélisme logico-grammatical, que la grammaire reflète la logique. Selon cette conception, la parole est portée par la pensée comme elle est analysée par l’écriture. Voilà pourquoi le cercle entre la parole et l’écriture fut rompu en même temps que la grammaire se dissocie de la logique. Pour Saussure, on vient de le voir, ceci implique de lier la parole à la langue et pas directement à la pensée. Mais c'est aussi dans le même geste qu'estdénoué le cercle mot-référent dans le sens qu'il ne fait pas une nouvelle théorie du référent, mais ce qui est plus fondamental, une nouvelle théorie du mot qui nous permet de dépasser la circularité entre le mot et le référent.
http://www9.georgetown.edu/faculty/spielmag/docs/semiotique/signe1.htm
(Guy Spielmann, Georgetown)

Ne vous inquiétez pas, je ne désire pas vous entraîner dans une séance de masturbation intellectuelle. Aussi jouissante puisse-t-elle être, j'aimerais simplement pointer l'actualité de cette discussion à l'orée de cette élection canadienne déclenchée le sept septembre par monsieur Harper et achevée le 14 octobre, le mardi suivant l'Action de Grâce. Parenthèse : trois semaines et des miettes avant la conclusion de l'Américaine.

Que viennent faire le référent et le signe sur cette piste démocratique?
Les campagnes électorales se composent en grande partie de paroles : les dites, les rapportées, les senties, les cajoleuses, les cruelles; bon, nous ne ferons pas le tour des qualificatifs. Toujours est-il que les mots auront le haut de pavé. La majorité des personnes qui utiliseront ces mots n'en connaîtront fort probablement pas toutes les définitions; j'imagine que leur connaissance lexicologique minime. Je ne parle pas bien sûr quantitativement, mais qualitativement. Les mots à leur disposition pour tourner autour de pot ne manqueront pas; mais la signification qu'ils voudront accoler à ces mots demeurera souvent obscure voir ignorée. Ces mots seront livrés en pâture à la population. Cette population, souvent représentée par des journalistes, les recevra en réverbération. Il faudra donc faire confiance à ces transmetteurs. Premier niveau d'interprétation. Ensuite, les lecteurs, plus souvent les auditeurs puisque nous ne lisons plus, dès la réception, commenceront le jeu du téléphone. Les mots s’y dilueront comme l'eau de mer dans le golfe Saint-Laurent, et vice versa. Où sera le sens des mots? Nous aurons sauté d'ignorance en ignorance.

Quand Saussure parle de cette dialectique entre le signe et sa source, le référent, la chose, le concept, nous tombons très rapidement dans une abstraction. Une belle et fascinante abstraction. Pour les électeurs, il s'agira d'une confrontation. Le politicien, le référent, tentera de convaincre la population, le signe, que sa liaison proposition-réalité est la meilleure. La population se divisera sur un certain nombre de lignes paramétrées sur leur vision de ces réalités offertes par les propositions. À la fin, une décision démocratique décidera de la relation la plus crédible, du moins la plus désirée. Dès lors, le référent, toujours le politicien, jouera sur un nouveau signe, une nouvelle interprétation de la réalité. Le besoin de soutien aura disparu pour un temps. Comme le consensus temporaire qui fit que Goupil servit à l'identification d'un animal, et que plus tard ce consensus pencha pour le nom renard.

Il faudra bientôt poursuivre cette discussion sur la pertinence et l'intégrité de cette relation.

À bientôt!

5 septembre 2008

Quelques instants


Juste avant de sortir dehors pour la fin de semaine, je regarde par la fenêtre: un ciel bleu avec quelques nuages très blancs, de la ouate sur une couette. quelques feuilles vibrent sur le côté gauche, une touche de fragilité et de mouvement. Le collège est plutôt paisible; la plupart de la population étudiante est partie; la grande majorité des habitués de l'aile des professeurs ont quitté aussi: seul et heureux. Je reprends mon souffle.

La sensation au sortir de la salle de cours me fascine encore. Parfois, je sors les yeux inquiets. La satisfaction n'y est pas. Il y a eu une bourde, une erreur quelconque. Quand ces choses-là arrivent le vendredi après-midi, le travail me suit toute la fin de semaine. Pas cette fois-ci! Ce vendredi-ci, le cours s'est bien terminé. Des sourires et des "bonnes fin de semaine", puis je verrouille la porte. Je déambule le corridor vers mon bureau. Je rentre, active mon écran endormi, vérifie mon courrier; je prends une longue respiration. Je suis en fin de semaine. J'aime mes étudiants.

Je lis un article sur la prochaine élection. On ira voter un peu avant les américains. C'est bien! Nous aurons peut-être un gouvernement majoritaire...

Je veux parler d'autre chose...

Je suis heureux de réécrire. Je ne dois plus arrêter. Je sais que je me parle; personne ne lit, mais le risque est là. Et, comme disait Lévesque, c'est un beau risque. Les textes que j'accumule me représentent bien. De tout; un peu de tout. Je mentionnais à mes étudiants cet après-midi que j'étais à la recherche de mon fils. Certains sont à la recherche de leur père, de leur mère; moi, c'est de mon fils. Je suis père: père de quatre filles merveilleuses que j'adore plus que tout. Et elles me le rendent bien. Je ne pourrais espérer avoir une paternité plus agréable. Elles me gâtent. Mais il demeure cet espace vacant dans ma tête: un fils. Je veux venger l'absence de mon père. Selon certains, elle n'est pas, ne peut être, physique puisqu'il était toujours à la maison. Alors elle devait être psychologique, ou morale, ou quelque chose, car je ne la vois nulle part dans mon enfance ou dans mon adolescence. Je ne vois que d'autres hommes. Ah oui! quelques souvenirs épars: le lavage de la vaisselle que je devais faire avec lui; le lavage du linge la samedi; sa crise de larmes à la messe de départ du cardinal Léger; ses sommes le midi; les chicanes avec ma mère. Bon, dans le genre. Je cherche peut-être un fils parce qu'il voulait être le mien ce grand enfant qui me chargeait continuellement de responsablilités diverses. En tout cas, je suis meileur père que lui.

Quelle discussion pour un vendredi! Allez va-t-en! Sors et va chercher Emma à la garderie!

Je souris un peu. Je me lève. Je mets mon sac à dos. Je déambule dans le corridor. Je suis déjà dans mon futur.

4 septembre 2008

Barbie goes to Washington! (Élection américaine 004)


Quel remue-ménage dans la grande famille politique mondiale. Après l'élection du très plébéien Sakorzy, et le noir au nom bronzé Obama, voici Sarah Palin, la campagnarde, la hockey mom!

Je lisais ce matin un éditorial enflammé au sujet de la barbie vice-présidente républicaine. La photo de l'auteur de l'article garnissait l'entête: feuille d'épinard fanée délaissée sur une Lyonnaise en fin de repas. Je n'arrive pas à me décider entre justesse et pruderie... Molière avait bien défini le concept dans ses Précieuses ridicules.

Honnêtement, madame Palin est vraiment agréable à regarder. Elle fait plaisir à entendre aussi : fraîche, souriante, lunettes sexuées et talons hauts, jupe très saillante, chemisier invitant, une dentition à faire mordre. Et les lèvres... Presque un fantasme. J'imagine mon ex-belle-mère du Midwest, les yeux bridés regardant en coin son mari paillard et repu pensant : ça y est, il vient de prendre sa décision, Mc Cain pour l'armée et Palin pour l'entrejambe. Elle se dit aussi : après tout ce que j'ai dû endurer comme merde, moi aussi c'est décidé, je l'aime bien cette poupée; elle ne semble même pas assez tordue pour mentir correctement. Lipstick and Bull terrier!

Le parti démocrate vient de faire la preuve qu'un ticket jeune noir Oreo et vieux blanc aristocrate peut survivre. Le parti républicain vient de le piétiner en illustrant un mariage entre le vieil Ulysse sur son trône bien revenu d’héroïque voyage et Pénélope la courtisane qui attise les courtiers. L'éditorialiste mentionne que la nouvelle candidate va mettre le monde entier en chemin vers Armageddon. A-t-elle pensé à la même chose au sujet de Bush? En tout cas, c'est un argument que les femmes républicaines et démocrates pourraient très bien lui mettre sur le nez. Jalousie, jalousie... Un journaliste du Washington Post l'a déjà mentionné : Quayle! Dole! Voire Jonhson... Cheney... Mais oui celui qui a tiré sur son compagnon dans un champ de tir par accident. Alors, pardonnez ma remarque, j'aime autant l'audace infantile que la niaiserie sénile.

Il semble que ce soit lorsqu'un candidat met en jeu notre petite sécurité tranquille que les raisons les plus stupides émergent. Les Américains se lanceront-ils soudainement sur le corps de cette basketballeuse sirène? Qui sait? Mais de grâce, cessez de valser vos petites valeurs. Vous êtes les premiers à lancer à tous vents que ces personnages n'ont que très peu d'impact finalement sur les événements, que c'est plutôt une énorme machine de lobbyistes et de mandarins qui forment le vrai pouvoir.

Faites de l'air!

3 septembre 2008

Une brique et un fanal


Dehors sous le soleil, deux images frappantes me viennent à l'esprit: la brique, synonyme de poids et d'ordre; le fanal, symbole de lumière et de mouvement.

Historiquement , le sens de brique joue avec plusieurs expressions: thick as a brick (bête et épais); la célèbre brique et son fanal (attente intempestive); moucher avec une brique (risquerait d'éteindre la chandelle); Couler une brique pour attirer le jade (résultat inattendu). Outre les trois petits cochons, la brique n'a pas nécessairement bonne presse. Pourtant, j'aime bien; j'avais monté, dans mon premier appartement, une bibliothèque en briques. Un ami aussi suivit cette mode; à son grand dam, elle lui est tombée en pleine nuit dans un fracas d'enfer. Mieux vaut se buter sur une brique (difficulté inattendue) que la recevoir sur la tête (Malheur!) Pauvre other brick in the wall! Faut pas s'en faire... Une brique est une brique est une brique... École après école, du mur à mur souvent jaune diarrhée; boîte à vieux, rouge sang; boîte à banlieue, gris sombre.

Bon. Oui! Vaut mieux le fanal pour l'aventure. Maigre comme lui ou allumé comme l'autre. Coleman sous pression sous la tente sous la pluie. Lumière, oh! Lumière! Je siffle ma fragilité. Pour la balade de crotin sur la Place du Marché, paclop... paclop... allez hue la grise, je balote mais jamais ne m'éteint! Il n'atteindra jamais la direction; quand même, pas un phare le fanal. Au moins, on me voit de tous les angles tout le temps: pas de temps en temps en coup de vent. Lui, il 'éclaire partout et donc nulle part; moi, je sonde, avec moins de portée, mais plus de fiabilité. Parfois le goût de s'aventurer dans l'escalier de la tour est trop fort. La tête en l'air, le souffle un peu plus court, monte, monte, hummm! encore un peu. Oups! le porteur t'a laissé sur la marche. Il est monté seul le chien! Que l'écho... Il va te reprendre en descendant pour que tu continues à éclairer en bas... avec la cloche à vache...

Le temps de rentrer arrive. La fin de la pause. La brique et le fanal reprennent le chemin. Au p'tit trot, tout le monde reprend le collier pour encore quelques heures. La cariole rentre au bercail du cheminement. Ne cherche-t-on pas que ce qui est ailleurs; que ce qu'on n'a pas encore trouvé? La brique soutiendra; dans sa bêtise, on trouve la sagesse quelque part. La nécessité d'être là et pas ailleurs. La pertinence de l'ancrage, du connu, de l'origine du parcours. Fil d'Ariane... Et la lumière qui pointe vers l'insondable, elle amène vers le danger, l'inconnu apprivoisable. Vers l'Odyssée!

Allez hue!

1 septembre 2008

La Fête du travail


Je pense donc je suis. Non! La société contemporaine dit plutôt: "je travaille donc je suis".

Il fait soleil. Une légère brise sud-est souffle à peine sur les feuilles qui usent leur vert sur un fond d'automne. Je ne travaille pas; c'est la fête du Travail. Je monte à Montréal reconduire ma fille à Trudeau. Je descends lentement sur la 40. Demain, je retourne au collège.

Sur la route, je refais ma vie. Je scrute les coutures; il y en a plusieurs. Certaines déchirures aussi qui agacent encore. Passez l'âge! Avancez! Vers demain... sourire... Trop tard: Alea jacta est!

J'aime beaucoup le film "Back to the future" avec Michael G Fox.Le nom est intéressant; assez paradoxal. Retourner vers un futur qui, ancré par la passé, n'est autre chose qu'un présent amélioré grâce à un peu de courage et beaucoup d'encouragement. Ainsi va la vie. On a beaucoup de secondes chances. Je regarde ma vie, et les occasions fusent. Le destin... bof! C'est comme les arbres: les anneaux s'accumulent, disparaissent, s'éloignent de la réalité, mais demeurent. Au parc de Vieilles Forges, en fin de semaine, avec trois de mes filles, Ève, Laurence et Emma, en descendant le sentier vers la fontaine du diable, de très vieux ifs tordus plantés dans une pente érodée exibaient leurs racines torturées. Au centre de l'une d'elles un jeune if, d'un diamètre d'à peine le dixième du tronc en décomposition qui le contenait; il voulait sans doute relancer l'espoir. Non! Issu d'un vieil anneau, on l'avait scié: Vert tendre sur brun pourri. Le passé ne s'efface pas; au mieux, il pourrit et s'effrite. Au pire, il hante et persécute.

Back to the future... En Irlande, furetant dans les ruines d'un vieux monastère abandonné au beau milieu d'un champ de blé sauvage et adossé à un petit cimetière cahoteux, j'avais lu des épitaphes des 7ième siècle au 12ième siècle; quelque part dans un coin, une toute jeune de la deuxième guerre mondiale. Il n'y avait rien de particulier sur l'enregistrement vidéo. Tout était normal: pas d'ombre blanche ou de torsion de couleur. Rien! Comme du passé; invisible. Sauf pour les pierres.

Avancez en arrière! Back to the future! Tiens, je voudrais bien me souvenir du futur.

28 août 2008

La magie (Élection américaine 003)

Le rêve? La réalité? La manipulation? Non! Rien de tout cela. La magie alors? Oui. Exactement.

Hier, alors que je regardais la convention démocrate à Denver, les alchimistes s'amusaient fermes. Le peuple voguait sur le rêve. Un rêve unique dans l'hisoire du monde, comme celui des plus grands empires, à l'intérieur desquels certains éclaircis engourdissent plutôt qu'elles ne réveillent. Mais qui n'aime pas prolonger le sommeil?...



Un noir candidat officiel à la présidence des États-Unis. Le seul fait de cet événement suffit à tirer les larmes de plusieurs combattants de la première, qui, assez incroyablement, ne remonte qu'aux débuts des années 60; hier à peine, les policiers blancs battaient à qui mieux mieux un humain à cause de sa couleur. Point. Certains mentionneront qu'Obama est plus blanc que blanc. Cet argument ne tient pas la route au niveau de l'image. Il est noir; son nom est noir; son accent est noir; sa famille est noire. Il suffit de remarquer les regards que portent les blancs sur lui pour confirmer: il est noir.



Sa présence est un tournant. Si son élection est incertaine, le parti démocrate, à l'encontre même de ses plus féroces partisans noirs, aura décidé en bout de ligne d'y aller pour l'histoire avant la tactique. L'homme le plus puissant au monde risque d'être ce noir qui, voilà quarante ans à peine, se serait fait battre par les autorités pour l'affirmation de sa race. Quel chemin ils ont parcouru ces gens de couleur. Et tout le monde, tant qu'à ça! Cela me bouleverse autant que lorsque j'ai vu pour la première fois de ma vie la reproduction artistique d'un célèbre pharaon et que j'ai remarqué qu'il avait la peau noire (enfin très cuivrée, et au moins aussi foncé qu'Obama).


Je suis heureux de vivre ce moment historique. Je suis anxieux de voir la suite.


27 août 2008

Polution...




La nature donne, l'homme prend.
Ite missa est






26 août 2008

La poudre aux yeux (Élection américaine 002)


Condolezza Rice! Powell! À croire que les républicains devenaient sympathiques aux Noirs. Ils aiment bien les oréos depuis quelques années. Mais ce que Bush a réussi à faire avec l'appui d'un certain nombre d'entre eux est superbe: remporté deux élections par la peau de dents. Faire comprendre à la clientèle traditionnellement blanche, conservatrice et relativement confortable matériellement parlant que les noirs, certains d'entre eux du moins, peuvent devenir des alliées, cela a du mérite.


Il fallait bien que les démocrates fassent quelque chose. Leur clientèle diminuait; il fallait aller récupérer ces immigants et ces noirs au plus vite. Le jeu risque de réussir. Les démocrates ressemblaient à un chien qui court après sa queue: que faire! On m'a bloqué le libéralisme; on m'a coupé de ma gauche, sauf oncle Teddy le joker. Il faut répondre: placer un noir plus en avant que personne n'a jamais osé faire: jusqu'en haut, à la présidence. Ils jouent leur peau. Denver va nous dire beaucoup sur la stratégie de communication que les stratèges démocrates assoiront pour les prochaines élections. Ils doivent jouxter les couleurs; pour la première fois de l'histoire, les blancs se voient devant une obligation partisane, bien plus qu'idéologique d'ailleurs, de voter en dessous d'eux: monter un noir au faîte. C'est un peu comme le premier noir quart arrière dans la NFL il y a quelques années à peine: première ligne les gros; demi-arrière les grosses jambes; volent volent volent et carracolent corneille demi-de coin ou ailier éloigné; un quart noir! Hum! Mon président NOIR?

Il serait renversant de voir revenir le parti républicain au pouvoir en novembre. S'il revient ce sera que le racisme est encore trop vivant et il faudra ressuciter un Luther King pour relancer les négos. Mais je crois qu'Obama sera élu. Il sera un aussi bon président que Rice est une bonne secrétaire aux affaires extérieures. Il prouvera que les États-Unis n'en sont pas à une couleur près de changer la politique. Une autre illusion de perdue! Et puis il y aura sous peu, dans huit ans, une femme qui défera un autre mythe. Quand la machine est plus grosse que l'homme, il faut plus qu'un superficialité pour l'enrayer.

25 août 2008

Élections américaines 001


Les élections américaines sont à nos portes. Il est difficile de démêler le vedettariat typique de la vie publique américaine et la réalité de chacun des participants. Évidemment, celle-ci a l'originalité de confronter deux personnes totalement différentes non seulement du point de vue politique mais aussi du point de vue humain. Alors, où l'américain ira-t-il?

Lors d'une conversation avec un riche floridien cet été, confortablement assis dans son RV de 1M et demi avec un Hummer en rémorque, la perspective de voir Barrack Obama remporter l'élection relevait du cauchemar. Toutefois si vous croisiez un autre américain d'une quarantaine d'années, travaillant à salaire, vous allez entendre soudre le chemin de croix de ce candidat démocrate contre les Pilates républicains. Durant les vacances de Noël, mes filles, qui sont allées passer les Fêtes chez leur grand-parents dans le Midwest, se sont faits spécifier: « pas de politique dans les veillées de famille! » Bien sûr, puisque les jeunes tendaient vers les démocrates, ceux-là d'ailleurs partagés entre elle et lui, et les plus âgés vers le chapelet des possibilités dans l'autre clan.

Depuis janvier, pas mal d'eau a coulé sous les ponts. Les données sont mieux définies. Les deux candidats à l'investiture sont identifiés. Un colistier est déjà choisi. On se dirige rapidement vers les conventions à Denver et à Mineapolis-St-Paul. Pourtant une énigme demeure: pourquoi les parties en présence ont-ils supporté si intensément ces deux candidats? Un tout jeune noir et un blanc très âgés. Car ne nous illusionnons pas! Ces deux candidats sont les choix des très hauts dirigeants des deux partis. On aura beau mentionner l'engouement des gens et l'impact des donations sur Internet et ci et ça, le système hiérarchique et la puissance des deux permanences démocrate et républicaine nient toute possibilité d'un choix populaire. Il y a des raisons plus fondamentales dans ces choix. Quelles pourraient-elles être?

Nous vous soumettrons ici un certain nombre de ces raisons au cours des prochaines semaines. Naturellement, tout cela est parfaitement hypothétique; nous pourrions même dire relavant de la science-fiction. Mais ne diriez-vous pas que Barrack Obama à la présidence des USA relève aussi de la science-fiction?

Amusons-nous un peu!

À bientôt pour le prochain épisode : pourquoi l’administration Bush a-t-elle élevé tant de noirs à l’apogée de la hiérarchie du pouvoir américain?

En retraite fermée!

À l'âge tendre de 9 ans, je rêvais de devenir Jésuite. En rétrospective, le cousin-missionnaire en Chine, digne franciscain en aube brune et en sandales, jouait sans doute du coude dans mon cerveau. Ma raison principale se résumait assez simplement à ceci: eux, ils peuvent lire et étudier toute leur vie dans leur monastère. Pour culitver cette ambition, je donnais quelques sous en classe à ma maîtresse pour acheter de p'tits chinois.

À l'âge honorable de 57 ans, je réalise que, même si j'en suis à ma deuxième épouse, qui m'ont orné de quatre charmantes filles dont une me dota voilà quelques mois d'une première petite-fille, c'est exactement ce que j'ai fait toute ma vie: lire et étudier... mais pas dans un monastère!

Comme dirait l'autre, "je ne regrette rien". Un seul regret? Celui de n'avoir partagé toutes ces pièces de mon énorme casse-tête avec quelques âmes soeurs; de là probablement le besoin du monastère. Remarquez que mon enseignement comble quelque peu ce besoin, ce plaisir; faute d'une longue table de moines mignards, je me régale de quelques dizaines de pubères hormonaux.

Ce matin, je rentre dans mon antichambre; je renoue le cordon; je recommence à sourire à mon écran; je reprends mon blog. Je reprends ma conversation avec l'insondable, le virtuel, le peut-être; pour laisser une trace!

Merci Bouchard!

1 février 2008

La toile de la démocratie

Sur le site de la revue des idées, nous retrouvons cet article fort intéressant sur les effets de la Toile sur nos démocraties. Au pluriel?! Oui, puisque nous vivons dans des démocraties bien différentes. En fait, nous dirions que nos démocraties vivront sans doute une nouvelle démocratie, cette fois plus unifiée pour ne pas dire plus unitaire: celle de la mondialisation des commentaires et des paricipations sur les quelques plateformes qui sont à notre disposition.

Bonne lecture!
Conclusion

"Internet, comme les autres outils médiatiques, a été marqué par les représentations que ses concepteurs pouvaient avoir de la communication sociale et politique. Ceux-ci furent autant des innovateurs sociaux que des innovateurs techniques. Ils sentirent et expérimentèrent ces nouvelles formes de relations sociales qu’on peut appeler «individualisme connecté » et qui caractérisent aussi bien la vie privée que la vie professionnelle [44]. Cette forme sociale apparaît aussi dans les nouveaux types d’engagement militant où l’individu choisit ses modes d’intervention, mais toujours en coordination avec les autres. Internet a donc une homologie forte avec de nouvelles formes de participation et de délibération démocratiques. Certes, tous les internautes, loin de là, ne sont pas des visiteurs des sites d’information et de débat politique, néanmoins de nouveaux dispositifs d’information sont apparus, de nouvelles formes de débats se mettent en place. Malgré sa nouveauté réelle, internet reproduit certaines caractéristiques des médias précédents. L’audience est fortement concentrée sur quelques sites de référence. Ceux-ci constituent donc ce terreau d’informations communes nécessaires à notre fonctionnement social. Internet est un réseau, une toile où les différentes informations sont reliées les unes aux autres. Cette géographie des liens hypertextes est moins ouverte qu’on ne pouvait le penser. Il y a donc un risque que le web ressemble plus à un archipel qu’à une toile unique. Mais cet éclatement des sources d’information se retrouve également dans d’autres médias. En définitive, internet n’a pas en lui-même d’effet négatif sur la délibération démocratique. Il s’est en partie moulé sur les caractéristiques de notre société, mais il offre aussi de réelles opportunités pour de nouvelles formes démocratiques, multiples et réticulaires, où le citoyen ne se contente pas d’élire ses représentants, mais où il peut débattre, surveiller et évaluer leurs actions."

par Patrice Flichy [14-01-2008]

31 janvier 2008

Mon ami Zola


Revoilà Zola dans ma vie. Pour le meilleur et pour le pire. Mes premières soirées avec le grand écrivain se déroulèrent dans l'autobus qui m'amenait et me ramenait régulièrement de Trois-Rivières à Saint-Jérôme où j'allais rejoindre ma jeune caissière. La Terre, Nana, l'Assomoir... page à page sous la lampe tubulaire, il m'accompagnait sur ce misérable trajet à travers un misérable paysage parmi une faune suante et nauséabonde.


"Mais, dans les grandes rues couvertes, la vie affluait. Le long des trottoirs, aux deux bords, des maraîchers étaient encore là, de petitscultivateurs, venus
des environs de Paris, étalant sur des paniersleur récolte de la veille au soir,
bottes de légumes, poignées defruits. Au milieu du va-et-vient incessant de la
foule, des voituresentraient sous les voûtes, en ralentissant le trot sonnant de
leurschevaux. Deux de ces voitures, laissées en travers, barraient la
rue.Florent, pour passer, dut s'appuyer contre un des sacs grisâtres,pareils à
des sacs de charbon, et dont l'énorme charge faisait plierles essieux; les sacs,
mouillés, avaient une odeur fraîche d'alguesmarines; un d'eux, crevé par un
bout, laissait couler un tas noir degrosses moules. À tous les pas, maintenant,
ils devaient s'arrêter. Lamarée arrivait, les camions se succédaient, charriant
les hautes cagesde bois pleines de bourriches, que les chemins de fer apportent
touteschargées de l'Océan. Et, pour se garer des camions de la marée de plusen
plus pressés et inquiétants, ils se jetaient sous les roues descamions du
beurre, des oeufs et des fromages, de grands chariotsjaunes, à quatre chevaux, à
lanternes de couleur; des forts enlevaientles caisses d'oeufs, les paniers de
fromages et de beurre, qu'ilsportaient dans le pavillon de la criée, où des
employés en casquetteécrivaient sur des calepins, à la lueur du gaz. Claude
était ravi dece tumulte; il s'oubliait à un effet de lumière, à un groupe
deblouses, au déchargement d'une voiture. Enfin, ils se dégagèrent.Comme ils
longeaient toujours la grande rue, ils marchèrent dans uneodeur exquise qui
traînait autour d'eux et semblait les suivre. Ilsétaient au milieu du marché des
fleurs coupées. Sur le carreau, àdroite et à gauche, des femmes assises avaient
devant elles descorbeilles carrées, pleines de bottes de roses, de violettes,
dedahlias, de marguerites. Les bottes s'assombrissaient, pareilles à destaches
de sang, pâlissaient doucement avec des gris argentés d'unegrande délicatesse.
Près d'une corbeille, une bougie allumée mettaitlà, sur tout le noir d'alentour,
une chanson aiguë de couleur, lespanachures vives des marguerites, le rouge
saignant des dahlias, lebleuissement des violettes, les chairs vivantes des
roses. Et rienn'était plus doux ni plus printanier que les tendresses de ce
parfumrencontrées sur un trottoir, au sortir des souffles âpres de la maréeet de
la senteur pestilentielle des beurres et des fromages."

Le Ventre de Paris, cette fois, qui digère l'histoire comme le dit si bien Guillemin qui signe l'édition Rencontre Lausanne.

Je ne devrais pas en cette session très chargée me laisser le luxe de cette lecture... Mais je ne peux pas vraiment résister. Retour en autobus...!

24 janvier 2008

La francofolie du Québec

Le plus décevant dans tout ce débat demeure le fait que les "parlants" français continuent de capituler. Malgré des législations, des restrictions, de la mauvaise presse, la langue anglaise progresse inexorablement; non, je devrais plutôt dire que le français régresse pathétiquement. De plus, il est bien naïf de croire qu'une éventuelle souveraineté, voire une recrudescence de la promotion du français législativement ou médiatiquement puisse y changer quoi que ce soit.
Une langue vit parce qu'on la parle, envers et contre tous. Une langue vit parce qu'on l'aime tellement qu'on la force systématiquement dans les oreilles de tous. Ma foi, les jeunes francos de Collège Glendon à Toronto ont plus de mérite à afficher leur beau français dans la ville reine que tous les heureux joualleux qui amochent quotidiennement notre "pourtant" si beau français à la grandeur du Québec.
J'aimerais bien que quelqu'un m'explique la progression fulgurante de l'espagnol partout aux États-Unis, même dans les lointains états du Nord-Ouest: Wyoming, Dakota, Idaho; la seconde langue présente sur les divers guichets destinés à la clientèle est l'espagnol. Voilà dix ans, c'était le français! Je sais, j'y étais. En Floride, tout est bilingue - à Miami-Sud, tout un quartier est unilingue; même dans les restaurants, il devient parfois plus difficile d'entendre un anglais un peu compréhensible. Une loi protège-t-il donc cette langue en péril? Mais non! Les hispanophones ont-ils alors une grammaire parfaite, un vocabulaire riche, une syntaxe respectueuse? J'en doute... Mais je ne suis pas en mesure de répondre à cette question, la qualité de mon espagnol ne me le permet pas. Finalement, je crois que c'est simplement parce qu'ils ont décidé de parler leur langue; que leur langue à eux, un méli-mélo de toutes sortes d'espagnols d'ailleurs provenant d'un peu partout dans le monde, ils en sont solidaires. Ils ne s'enfargent pas dans les fleurs du tapis; ils sont fiers de gueuler leur langue; le serveur, l'avocat, le professeur, le manoeuvre, les p'tits qui se chicanent dans la ruelle...
Alors pas de sympathie pour les pauvres québécois qui passent leur temps à parler des sondages, des enquêtes, des pronostics, de la démographie et autres bonbons subventionnaires. Pas de sympathie!

22 janvier 2008

Le théâtre populaire ou intellectuel?

Une texte intéressant sur le théâtre vient de paraître sur le site de la revue Idée: http://www.laviedesidees.fr/IMG/pdf/20080116_aristote.pdf

Cette critique du livre de Florence Dupont reprend une très vieille rengaine: celle qui raconte les nombreuses prises de bec entre les tenants du "porteur de message" et les artisans du "spectacle de divertissement".

Ce livre ne règle pas le dilemme, mais il apporte un éclairage nouveau. D'ailleurs, il faut regarder les nouveaux spectacles théâtraux, c'est du moins le nom qu'on leur donne, à New York, qui sont devenus des expériences multimédiatiques où les spectateurs demeurent debout durant tout le spectacle, pour calculer toute la pertinence de cette nouvelle entrée dans la dialectique de cette littérature qui n'a jamais pu nicher définitivement ni chez le populiste ni chez l'intello.

19 janvier 2008

Associations comportementales

Il me prend à rêver que je suis un éléphant. Bon, pas tellement physiquement, mais intérieurement; un id avec une énorme trompe et des sabot à confiturer des zèbres. Je rêve aussi de temps à autre à des reptiles qui se glissent ici et là.

Entre les deux espèces, on en voit venir une de très loin; pas l'autre! Les pachidermes sont condamnés à faire vrai et franc: pas le choix! Les reptiles vont loin sur leur ventre écaillé avant que quiconque puisse déceler là où ils s'en vont.