18 août 2009

hommage à Jacques Rouillard

Beau cadeau que tu me fais là Jacques! En plein le jour de ma fête...

Notre dernière conversation remonte au restaurant St-Hubert alors que j'étais tiraillé par mes jeunes filles et que tu mangeais ton poulet en galante compagnie. Fin mai, je crois bien. Je t'avais brossé le tableau de ma condition cardiaque. Le dernier. Le dernier de nos nombreux dialogues souvent au laboratoire des professeurs ou à la bibliothèque dont tu préférais les larges baies vitrées au béton du sous-sol où tu n'avais pas encore de bureau: chargé de cours oblige!

Souvent, tu lisais La Terre de chez nous attablé sagement parmi les étudiants. Ou tu corrigeais une des nombreuses copies des rapports de laboratoire ou des contrôles de tes étudiants. Tu souriais toujours. On avait des bons mots, des jeux de mots ou des vieux maux; ça faisait du bien de sortir ces rages, ces rancoeurs, ses blessures.

Mon cadeau, c'est que tu en as fini d'attendre. Un poste; un bureau; un bonheur en béton; une solution... magique. Tu ne seras plus là où tu t'asseyais; tu seras désormais partout. Ce soir, alors que je te place sur mon blogue, peut-être simplement pour avoir quelque chose de concret sur lequel graver mon souvenir, je t'entends rire : mieux qu'avant, car ce n'est plus au collège que je l'entendrai, mais dans ma tête.

Amuse-toi bien là-haut. Ils ont sans aucun doute les meilleures archives sur la nutrition et la collection complète de cette Terre de chez nous!


17 août 2009

Lee Gowan : The Last Cowboy




Page 234:

WOOD PANELLING. The sink overflows with dishes. Pizza boxes piled beside rows of empty beer, and whiskey bottles on the lime-green linoleum counter. The smell - of the dishes and garbage that's been left too long - is only slightly disinfected by the smell of cigarette smoke and alcohol. Perhaps there is the smell of another disinfectant as well: a row of bleached animal skulls is arranged on a shelf lkge knickknacks. The cowboy explained to me how he'd stripped them down to the pure white with some sort of acid. They are a powerful white indeed. Badger, deer, eagle, sparrow, gopher, cow, horse, dog. Morbid but beautiful. Certainly sculptural. They dominate the room, presiding over it all with their empty eyes. I can't help thinking of Dad. I take photos, having been let loose to document the lair in any way I choose while the cowboy has gone to "do his ablutions."
Gowan sends his men deep into primitive life. Even those living - what a big word - existing would be better, in cities are raw. Their suit don't fit; they're polyester, shiny and uncomfortable. Les femmes: plus à l'aise; plus volontaires. Pas surprenant qu'elles dirigent, conduisent et prennent des décisions. Mais, à la fin, tout ce beau monde ne trouvera la paix que dans la mort: du rêve ou de la vie... Ou de l'inatteignable: Ai, woman fooled by a big time movie producer, is looking for a deadend road! She finds it and turns back to life; her one day companion still walks the prairie dealing with his lost opportunities et les affres de sa terre d'origine.



15 août 2009

Attendre la nuit.


Le Soleil se couche dans l'orgie de couleurs. Ma Terre bascule dans le noir. Aveugle au bruit du trafic sur le pont à ma fenêtre. La chaleur de la journée poussa chaque minute dans la tension. Les gestes de la quotidienneté s'enflent dans cette torpeur. Les filles se chamaillent; elles se taquinent; elles se poussent, se frappent; elles crient puis pleurent; quelques secondes, cinq à peine, elle se regardent et partent à rire. Pas une sonate même de Rachmaninov, une fugue de Bach, une marche de Strauss. L'air conditionné est au bout; le manque de fréon est frustrant. La température se stabilise trop rapidement aux alentours de 25 °. Les lumières rouges, les arrêts, les autres, les maudits autres colons qui ne savent pas conduire. On arrive; un peu de réparation sur le pont : 70 km/heure : je mets le régulateur de vitesse et faites-moi chier! Suis! Peut pas dépasser : une seule voie. FIN. J'accélère au plus vite pour continuer à taper sur chose en arrière. 100 atteint; on se calme; les filles gardent le rythme. L'enfer. Il fait si chaud. La sueur me coule sur le front, sur les tempes; j'ai les mains moites. Elles rient. Bon Dieu! Elles recommencent à crier : Non, NON, c'est à moi, Ahhhh! Pas fine! MÉCHANTE!! 100. On ouvre un peu pour respirer. La voie d'évitement arrive. On va prendre l'embranchement pour la 55 sud. On va prendre la sortie juste avant le pont. On se stationne, ouvre la porte et ouvre la porte coulissante de la fourgonnette pour sortir les deux tyrans. Dans la maison se sera plus frais.

Les deux se retrouvent dans la piscine. J'ouvre le réfrigérateur : le Clamato, une bière, un bock du congélateur. Il n'en reste que la moitié après la première gorgée. Je suis debout à la fenêtre de la cuisine et les regarde se débattre : dépenser leur énergie pour un sommeil hâtif... Faut pas rêver!

Mais là, je suis au lit. Elles dorment après câlins et bizous. J'écris quelques mots la fenêtre ouverte. La brise souffle doucement. Je suis seul. Les draps sont propres, je viens de les laver. Bon, bon. Ça valait le coup. Jusqu'à six heures demain matin! C'est justement ce qu'il me reste : 6 heures!


14 août 2009

Qui fait du journalisme? Moi?



Écrire pour se faire plaisir devient un passe-temps. L'écriture reprend son rôle primitif : communiquer brutalement; directement; sans vergogne. Dire.

Un grand merci à Assouline pour avoir mis en ligne cette référence. Chris Anderson fait un constat troublant de la situation médiatique actuelle. Les journalistes et leur patron en sont les premiers responsables : ils voulaient jouer les vedettes et les richards; élever leur rôle au niveau d'une religion, d'une dictature de la parole dont ils tenaient seuls les rênes.

L'empire chancelle. Peut-être retrouverons-nous la réflexion sur papier que l'on a un jour connu.

J'écris.

13 août 2009

The Horseman's Graves, Jacqueline Baker



Un cadeau. Un emballage rude. Des rubans effilochés par le vent qui charrie le sable des prairies. L'histoire de Baker nous met la poussière et les tumble weeds dans les yeux. Des pionniers sauvages et rustres coulés dans le roc absent de la sécheresse semi-désertique d'une Saskatchewan aussi vile que fière, aussi mystérieuse que vierge; qui pourtant absorbe tous les vices, et les vicissitudes, que l'humanité place dans son chemin.

Personne n'est beau; tout le monde s'accroche, mais nous accroche aussi à leur environnement maudit. Mais qu'ils ont choisi comme des centaines de milliers d'oubliés ont choisi, juste au sud, des prairies tout aussi inhospitalières. Les cowboys et les vipères courent le même bétail :

Ronnie shifted on the pew beside his mother and coughed and felt too warm, and his mother frowned over at him, but he could not sit still, the air was too close - why would someone not open a window? - and so he rose, and saying, "Excuse me, pardon, excuse me, please," he squeexed down to the end of the pew and into the aisle and toward the door, while Father Rieger frowned down at him, saying, "And so on this Easter Sunday morning, we must all ask ourselves" - his voice following Ronnie out the door and into the bright morning - "Is it life everlasting which I seek, or only the tomb erternal?"

Seulement la vie, révérend, malgré cette nature infâme qui ne cherche qu'à détruire l'oeuvre en émergence. Pas nouveau, de tous les temps, la littérature canadienne à relever ce noeud gordien de la survivance. Point bien intéressant d'ailleurs : si la survie, version francophone passe dans le Québec par la religion, la culture et la langue, c'est un luxe que les pionniers de l'Ouest n'ont pas. Tu marches ou tu crèves versus tu plies et tu t'assimiles.


11 août 2009

Le droit de lire au soleil

Je suis invalidé. Un cardiologue l'a décrété le printemps dernier. J'ai devant les yeux un écureuil noir; il ramasse les graines de tournesol échappées de la mangeoire. Une mangeoire de trois : les deux autres offrant aux chardonnerets, aux mésanges et aux moineaux divers mélanges de graminées. Quelques tourterelles tristes accompagnent l'écureuil de temps à autre. Le gazon sent bon; le soleil reste accroché; mes fleurs sourient en accompagnement du jeune marronnier de quinze ans qui atteint maintenant une quinzaine de pieds de hauteur et presque qu'autant d'envergure. Est-ce cela que Rabbit fuit?... De village en village. Une image pastorale trop accrochée au mouton et pas assez à la montagne?...

Updike le laisse deviner. Rabbit rêve et se sauve pour ne pas se réveiller. Il court l'Amérique. Comme Kerouac. Le monde, comme Hemingway. Antoine Compagnon posait déjà la question (14 mars) au sujet de la vie et de la fiction : quelle est la marge de différence entre les deux univers? Alors Updike cherchait-il donc à se sortir de sa vie. Baker, U and I, juge ironiquement l'homme derrière le personnage. Je viens de lire un article sur l'Enfer de la bibliothèque nationale de France où sont conservées les oeuvres trop crues pour les tablettes populaires. L'auteur américain ne fera jamais ces sous-sols reclus, mais il ne brasse pas moins son carrosse, bonjour Emma Bovary, par l'entremise de monsieur Angstrom. Je lirai donc, tranquillement bercé par un poli « R » ma lecture insouciante mais captive sous un soleil d'emprunt qui est soudainement proscrit à tous mes confrères et consoeur. Le coeur a ses raisons. Le sexe aussi!

7 août 2009

Debout!

Et si je me levais...


Menaud est mort debout: tombé dans un trou de neige. Des héros qui soulèvent le drapeau américain sur le mont Suribachi, trois étaient amérindiens; ils crevèrent comme des chiens dans les ruelles de l'Amérique...

Fichier:USMC War Memorial Night.jpg


Je suis fier de quoi au juste?

20 mars 2009

I will survive

As crazy as always...





And for ever!

15 mars 2009

Ballade pour Dimanche

Allez! Dimanche.

On ferme les yeux.

On se berce.


Voilà...

Maintenant, tu vas prendre une marche!

14 mars 2009

Fiction

J'écoute un cours de littérature sur le podcast du Collège de France. Proust en est la vedette. Antoine Compagnon y parle entre autres de Blanchot, critique et auteur français à la plume sévère et riche tant dans sa fiction que dans son regard sur l'autre. Ils sont d'accord, tous les deux, pour affirmer que la fiction ne peut se détacher totalement de la réalité: toute création littéraire demeure le reflet d'une vie. Assouline, incidemment, touchait ce dilemme en étudiant la dernière oeuvre de Carrère (Classe de neige); il le fait régulièrement sur plusieurs auteurs et leur vie. Les deux univers se touchent nécessairement, mais la fiction n'existe que dans la distance que l'auteur place entre lui et ses personnages.

L'autobiographie devient dès lors un phénomène intéressant. Nous pourrions aussi parler de la «story life», terme qui naquit aux États-Unis dans les années 60 qui est devenu un genre littéraire en propre et qui romance à souhait le véridique pour y laisser planer toute l'invraisemblance que veut bien y placer l'auteur. Incidemment, le livre de Nicholson Baker, U and I, pastiche updikien du, alors, jeune auteur avec son héros chemine le long du même sentier. On y entre avec méfiance; on reconnaît le milésime littéraire du créateur du célèbre Rabbit et du grand succès cinématographique Witches of Eastwick dont l'origine est un autre de ses romans; puis, peu à peu, la structure styllistique cahoteuse typique du grand romancier devient plus originale: nous en arrivons au cliffhanger narratif où le jeune disciple ne laisse que des ombres. Updike, lui-même, d'ailleurs n'est pas sans rappeler certaines tournures de Dos Passos: la vie américaine riche de sexe, de chaleur, de profusion et de leur vie... quotidienne.

La fiction est un jeu. Que le meilleur gagne et devienne la racine du prochain. On ne parle pas de plagiat; on parle de culture.


12 mars 2009

Au fil des ondes ~


J'aime bien ce caractère d'imprimerie : vague; bouche indécise; sourire évocateur. Ondulée. Très féminin. Très doux. Très accueillant. Plein d'indécision; ou encore de charme; ou de valse en tango.

Je me souviens d'un voyage à Montréal, la grande et belle! À l'époque, l'Ouest et Eaton apprenait le français; la petite Italie nous avait donné Fiori: définitivement UNE! J'y avais assisté à la pièce Ondine de Giraudoux au Rideau vert. 1972...

Le souvenir n'a plus rien à voir avec la réalité. Trente-sept ans plus tard... Les fauteuils en velours commercial avec des dossiers en violon et des sièges à ressort. La scène fume: légèreté; vide sauf un navire à la voile bleue; un couple qui se parle doucement en costume de conte de fées. Ils parlent doucement. J'entends une berceuse. Sa voix enchante; ses paroles bercent. Ondine et son chevalier comblent la noirceur qui enveloppe. Pas besoin d'entracte, surtout pas : il ne faut pas briser le rêve. Ondine de Giraudoux demeure en moi. Intéressant de réaliser aujourd'hui que je suis allé vers elle autant qu'elle s'est présentée à moi. N'est-ce pas là la richesse, l'importance, la NÉCESSITÉ de la culture, de la littérature. ~

Qui va vers la culture aujourd'hui? Une infime minorité. Qui croit encore à la gratuité de la culture aujourd'hui? La gratuité : le fait de profiter d'une oeuvre pour le simple plaisir de découvrir ou de se sentir humain : quelques-uns; rares. Ondine se noie. Elle parle à travers les obligations scolaires; celles sociales des voisins gonflables en complet trois-pièces; celles financières de se faire voir; celles morales de ce support factice qui amène les pharisiens et leur chaux.

Ondine, en 72, m'avait coûté un billet d'autobus pour Montréal et un billet pour le fauteuil. Personne n'achète plus de billet d'autobus; on ne peut plus prendre le train, on a fermé la gare; Je pilote mon auto: plus commode! Mais le rêve est brisé.

Dans mon enseignement, la littérature règne: son histoire, son contenu, sa valeur, sa profondeur; son humanité et sa gratuité. Mais rares sont ceux qui marchent avec moi. N'est-il pas plus facile de tromper Ondine; de lui conter romance, de la distraire de son essence en nommant bêtement ses attraits sans l'aimer pour ses méandres. Sans mon enseignement, je crèverais; sans la survie de l'espoir de capter un esprit ou de séduire un être, oui, je crèverais sûrement. Alors, année après année, je reviens au navire et prie Ondine de me renouveler sa confiance. Si elle en vient à s'imaginer que je m'éloigne d'elle, j'aurai perdu mon pari. Ainsi, à l'orée de la vie, l'euphémisme poli s'étiole sur l'hyperbole créatrice. Convaincre de la gratuité littéraire! Apprivoiser la culture! Vivre.

Et les Ondines d'on ne sait où... ~ #

Je retourne à ma culture! Je retourne lire...


28 février 2009

Pas de deux


En harmonie. On oublie le négatif. Le pas des deux; la danse duo. La ronde trio. L'enfance rêveuse!

Fatima, Artimis ou Sybille. Clélie, Freyja, Cybelle et Nessa. Nous ne parvenons jamais à définir notre moi... ni celui des autres. Mes filles appartiennnent à la destinée. Nous appartenons à la destinée. Dans ce monde hallucinant (lat. hallucinatio: errer; quae Epicurus hallucinatus est (Cir); les rêveries d'Épicure) des fantômes démiurges, nous soudons des halos (gr. halos: cercle lumineux; hêlos: clou ) sur nos vies. Voile ou karma, la confession au prêtre nous permettait de traduire phantasmes et regrets. Le grille et l'encens s'esquivant, l'esprit erre. Je me réfugie dans les livres pour ouvrir les horizons. Quand ils ne suffisent plus, j'ai recours à ma descendance pour maintenir l'ouverture. Lorsque le porte du confessional refuse de me donner accès à la nef, alors je m'élève chez elles.

Ah! Les femmes de ma vie! Mes livres d'aventure aux mille et une péripéties.



26 février 2009

J'ai été programmé


Plus on vieillit, plus on recule.

Les grands-parents ont disparu de l'écran radar de plusieurs enfants aujourd'hui. À qui la faute? Aux parents qui préfèrent le soccer et les spectacles infantilisants de leur progéniture, et aux vieux eux-mêmes, monstres niais de paresse et de Sud à tout prix. Alors les enfants poussent dans le jeu organisé; ils sont laissés seuls le plus vite possible pour que le couple, conjointement ou séparément, puisse revamper leur moral; ils survivent le secondaire; ils surfent le collège. Une minorité bien sûr, car la plupart se sont arrêtés en cours de route.

J'ignore dans quelle mesure mon enfance fut en ligne avec la majorité ou marginale. À l'époque, les sondages ne faisaient pas les manchettes. J'ai dans mes souvenirs beaucoup de mon grand-père marternel. Mais ma mère qui semblait vénérer ce père, avait développé un culte autour de lui, alors on peut toujours douter. Toujours est-il que ce grand-père s'occupait de nous, nous racontait des histoires, nous montrait les araignées qui tissait les toiles et tout le bazar charmant qui fait rêver: le vieux idéal quoi! Après avoir tenté sa chance à plusieurs commerces, il était maintenant bedeau. J'imagine qu'il avait réussi à gruger tout ce que ma grand-mère avait reçu de son père, un bon bourgeois confortable. J'ai donc passé un certain temps avec lui au centre-ville; un autre bout de temps avec des cousins tapageurs en campagne; puis un long séjour à l'orée du bois dans un nouveau secteur résidentiel dans un cottage relativement cossu. Ce sont les années qui m'ont fait je crois bien. Les souvenirs s'entremêlent; p'tit bonheur, p'tit malheur. Pour utiliser une comparaison moderne: formatage de mon disque dur; motherboard; ram rom; bits and pieces...

Quelle est ma marge aujourd'hui? Pas sûr! J'ai remformaté à plusieurs reprises; mais, comme tout bon technicien vous le dira, les données ne disparaissent jamais totalement. Funny! Les disques durs de nos ordinateurs fonctionnent de façon étonnamment similaires à notre cerveau humain. T'as beau nettoyer, il en reste toujours.

J'ai été programmé pour faire le bien.... HaHaaahahahahhh! Quelle joke! Beware...

25 février 2009

Communiquer



Mille et une facettes. Une longue robe à paillettes multicolores à col roulé, à manches longues, avec une longue traîne qui ramasse toutes sortes de matériel hétéroclite pour le transformer en événement. Image falsifiée. Image mirage. Image, mensonge, manipulation.

Je dis beaucoup ; beaucoup trop. Je parle comme je respire ; je devrais écrire plus et parler moins... La plupart du temps, je parle pour respirer plutôt. Est-ce que je communique? Non, je ne crois pas parce que peu de gens entendent. Oh! Ils écoutent ; mais n'entendent absolument rien.

Je fais présentement partie d'un chantier sur la communication à mon collège. On cherche comment nous pourrions améliorer les communications. Hum ! On a engrangé un peu plus de quatre heures déjà en discussion, en remarque, en proposition. La chaloupe tient l'eau. L'atmosphère est sereine. Le contenu ? Non pas encore. Confidentialité. Et c'est bon comme cela. On finit le travail ; on soumet les recommandations ; on attend ; le ballon revient... et la balloune crève !

On crémera un peu plus épais ou on apportera des correctifs.

Une chose est certaine, je n'ai pas l'impression de perdre mon temps. Bien malheureux de voir le peu d'enthousiasme qu'a suscité cette initiative. Ce fait est symptomatique : il y a des problèmes dans mon collège parce que le crémage est trop épais et la vérité perdue. Quand on investit dans l'image, on s'éloigne nécessairement de la réalité. Quand on dépense pour la galerie, on doit souvent couper dans la stucture. Il y a un quartier dans la ville de St-Louis qui faisait pitié dans les années 70. Mais il fallait le savoir parce que lorsque vous déambuliez sur les rues vous n'aperceviez que des façades de pierres et de briques imposantes et opulentes sous des arbres immenses où les écureuils et les oiseaux chanteurs s'excitaient dans des concerts harmoniques. Il fallait savoir. Savoir qu'à l'intérieur de ces murs cossus, il n'y avait que ruine. Les riches bourgeois avaient délaissé leur manoir citadin pour des villas banlieusardes ; ils avaient quitté le centre-ville. Le quartier gardait son charme, mais avait perdu sa substance. C'est mon collège. Dans les années 90, des yuppies sont revenus dans le quartier. Ils ont acheté à rabais ; ils ont rénové ; installé leurs mille caprices dans les multiples chambres... parfois un ou deux enfants : ils ont donné la vie. Bon ! Ils ont rebranché le frigo, d'accord. Les murs de pierres et de briques ont trouvé des mignons; les arbres sont devenus creux; les écureuils, obèses; les merles, enroués.

24 février 2009

Bien assis dans ma ségrégation


Dans la presse du Québec, un peu partout, ces derniers jours, on obnubile sur le taxage à l'école. Des témoignages fusent de blessés présents et passés; d'autres, plusieurs sans doute, lisent tout ça en se demandant quand viendra leur tour.

On ne peut rien contre la vertu...

Si on cherche un peu, je crois bien que la très grande majorité des humains sur terre ont subi une forme de taxage ou une autre. On n'a qu'à penser à toutes les versions que peut prendre cette forme d'abus d'un individu sur un autre. Une brève liste:
1- l'aîné sur le cadet
2- l'ami sur son préféré
3- le conjoint sur son réciproque
4- le professeur sur son élève
5- le battu sur un plus faible
6- le cultivé sur l'inculte
7- le riche sur le pauvre
8- le pauvre sur le riche
9- le patron sur l'employé
10- le syndicat sur le syndiqué (et vice versa)
11- le syndiqué sur le non-syndiqué
12- l'homme sur l'animal
13- le parent sur l'enfant (et vice versa)

On s'arrête? C'est assez! Compris? La valse des Je me sens différent ne finit plus. On va peut-être parlé de dyslexie comportementale pour ceux qui ne sont pas compris. Il faut bien commencer à comprendre que la vie est ce qu'elle est et que les individus qui la composent sont ce qu'ils sont. On peut passer sa vie à se plaindre ou à agir. Quelle est la solution pour les marginaux? Quelle est-elle pour les hyper-grégaires?

Les solitaires promènent souvent l'image de subversifs; les gueulards aussi même si parfois leurs mandibules se gonflent plus d'air que de sens. Les populaires passent pour des manipulateurs. Ils publient leur malheur comme d'autres remplissent leur placard. Il y a les squelettes de laboratoire avec lesquels tout le monde joue et ceux des cimetières qui valsent les vents d'automne.

À ma deuxième année d'enseignement, dans un groupe de secondaire deux, un jeune aux alllures fragiles, plutôt gêné et retiré, n'ayant à son actif qu'un ou deux autres élèves comme compagnon quotidien, avait sauté une coche lors d'un exposé oral; pas sauter un coche sur un coup de sang. Non! On sentait de la préméditation dans son geste. Il avait lancé brutalement de sa petite voix qui sortait de son petit corps un avertissement final au bully du groupe; un gros et grand campagnard, serein (trop à son goût sans doute) et goguenard; une espèce de Hells avant la lettre, plutôt sympathique pour les professeurs; c'est vrai, en général, les prof les aiment bien ces bons vivants; je me demande bien pourquoi. Enfin, appelons-le François pour les besoins de l'histoire, lance une craie dans le direction de Robert, fictif vous l'aurez compris, qui la reçoit avec un air d'incompréhension mêlé de rire et surprise. François assortit son lancer d'invectives verbales qui l'encourage à cesser toute remarque portant sur lui dans le but de faire rire. J'ignore ce qu'est devenu Robert; peut-être est-il retourné dans sa campagne à faire vibrer des trente sous dans son dépanneur. Mais François, lui, est partie prenante d'une entreprise florissante qui brasse des dizaines de millions. Leçon? Aucune. L'un a eu le courage de se positionner; l'autre la bonhomie de l'accepter.

Les souffre-douleurs ne sont pas sympathiques. Les agresseurs n'ont plus. Mais, dans une certaine mesure les uns existent grâce aux autres. Les cercles vicieux ne révolutionnent pas sur des abstractions. Il y a ceux qui agacent et ceux qui détruisent; et ces deux verbes vont dans les deux sens: tu agaces par ton attitude ou tu agaces pour provoquer; tu détruis par ton action ou tu détruis par ta passivité.

Notre société est malade. Des citoyens ont gâché le respect de l'autorité en ridiculisant aussi bien les personnes en titre que les institutions. Nos enfants poussent dans des détritus nauséabonds de la destruction du respect hiérarchique qui constitue l'organigramme du respect essentiel qui fait qu'une société est viable. Sans recours, l'individu, jeune ou vieux, faible ou puissant, devient lui-même l'étalon de l'autorité sociale alors qu'il ne s'agit que de sa propre autorité individuelle. Peu importe son crime, peu importe la personne objet de sa hargne, il est innocent, car la société ne lui renvoie que l'image de son propre salut et non plus celle du salut de sa société. Curieusement, notre civilisation rejoint le primitif dans cette caverne où seul le plus musclé et le meilleur à la chasse, ou le plus grégaire et le plus populaire survivra.

19 février 2009

Le jeu


Écrire. Je viens d'apprendre qu'un de mes collègues avait pressenti le futur. Inutile de savoir à quel sujet, qui il est ou comment cela s'est traduit et comment il m'en a fait la preuve; c'est un fait: neuf mois avant l'événement, il voyait la réalité à travers sa fiction. Fascinant!

La prescience. Savoir avant une réalité qui devrait exister selon un certain nombre d'indices précurseurs. Non, on ne parle pas ici d'une prédiction. Pas comme une joute sportive ou une course hippique où on calculerait les probabilités. Pas de statistique ici, que la connaissance intime, même si parfois totalement inconsciente, d'un événement qui se concrétisera. Une prophétie?

Pourquoi pas? Qu'est-ce qu'un prophète? L'oracle de Delphes.... Madame Soleil... Le Tarot... Pas de religion en cause, bien qu'un tel phénomène rapproche traditionnellement du pouvoir mystérieux du divin qui gère la destinée.

Je joue à pré-savoir. Comme le sable de la grève, qui accueille tout et efface tout; sauf le souvenir d'avoir déjà reçu une trace, un château, un mot d'amour. Un rire d'enfant adulte qui n'a que quatre ans dans son corps et déjà vingt dans sa tête. Tout est dans la perspective. Voyons un peu.

Un point sur le feuille. Un trait oblique qui monte de gauche à droite; un autre trait à la base à quarante-cinq degré; un troisième trait qui rejoint le deux autres de sorte que le point de départ se retrouve au centre de ce triangle. Chaque sommet est le départ de trois autres lignes qui rejoignent le point central. Qu'est-ce que j'obtiens un cratère ou un pic? Question de perspective. Il manque des éléments comme du remplissage de couleur, des précisions sur la situation exacte du point dans cet arrangement de lignes, mais la perspective est là; elle existe. Ce que je vois n'est qu'une interprétation, mais elle demeure une réalité en devenir. 

Si on se projète assez loin, on finira par vivre son avenir. Si on vit par procuration, on risque de devenir esclave de ses propres visions. Ne pas en avoir est fatal; vivre en fonction d'elles, donne des vertiges. Où est l'azimut? Où sont les lignes? Où sont les points d'ombre? Quelle est la perspective?

Écrire sur le sable, confier au vent: gestes à portée infinie; mots et paroles plus indélébiles pour l'être qui les gravures au burin.


18 février 2009

Quelle laideur bienfaisante!

Dieu que c'est laid dehors. Hier, le gris omniprésent; aujourd'hui la gadoue; demain le jab mixte mou-liquide-nauséabond. Le sous-sol suintant et sombre des éphémérides météorologiques.

Bof! Je suis ravi. Littéralement ravi! Ce moment maussade augure le printemps. Enfin! Finalement! Depuis le mi-novembre que nous végétons dans ce mausoléun frigide. 

Il neige. Reparti pour une quinzaine de centimètres. Presque une neige des sucres. Je marche dehors et je respire mieux. L'air est plus humide; le soleil brille plus intensément; les flaques d'eau courent les cratères miniatures. Elle disparaîtra rapidement celle-là. Au quatorze jours de météomédia, la ligne verte joue au slinky: en haut bébé, en bas bébé...

En route vers le travail, tôt le matin, presque seul sur la route, on se croirait dans un film noir et blanc: Pleasantville merde! C'est presque fini. Les couleurs s'en viennent. Et la chaleur; et les feuilles... et les vacances!!!

17 février 2009

Défaite victorieuse...


Trois-Rivières célébrera la défaite que les troupes françaisses infligèrent aux Américains, tout frais tout beaux, nouvellement indépendanst grâce à leur pustch contre les britanniques. Si on invitait les gouverneurs de la Nouvelle Angleterre ou quelques maires frontaliers pour la célébration historique, ils riraient grassement: Hey! Sure, I'll be there. For once that you succeded in pushing us back...

Ce dont on se vante moins à propos du 8 juin 1776, c'est que cette Bataille des Trois-Rivières oppose les insurgés des Treize colonies aux troupes du roi d'Angleterre. Autrement dit, cette victoire britannique contre les américains, on va la célébrer. Alors pourquoi le plat des plaine d'Abraham? Parce que les Anglais qui défont les Français, ça fait plus mal que des canadiens à la solde des Anglais à qui on ordonne de chasser ceux qui viennent de se libérer.


D'autre part, dans l'Est, on remue ciel et terre pour que Grand Pré devienne un site commémoratif de l'Unesco à cause de la déportation des Acadiens (http://www.radio-canada.ca/regions/atlantique/2009/02/16/004-NE-grand-pre-unesco_n.shtml) : Le Grand Dérangement. Ils étaient où les canadiens à la solde des britanniques quand ces francos qui refusaient de prêter serment à la royauté britannique ont été déportés comme des pourceaux aux quatre coins de l'Amérique? À la messe, à écouter monsieur le curé qui les encourageait à respecter le captain qu'il recevaint à souper les samedi soir.

Vive les québécois! Gros Jean comme devant...


16 février 2009

Allez chante un peu le refrain...

Dans ma tête, c'est d'abord un film magnifique.

C'est maintenant un incontournable:


And give peace a chance....

De l'esprit des lois

Le mot est de Montesquieu: le grand essayiste français.

Il a joué à l'écrivain en romançant dans les Lettres persannes la vie de deux étrangers observant la France du XVIIIième; ce regard lui coûta; il fut mis au banc de la société.

Son Esprits des lois, masse livresque, veut faire un tour de l'esprit, tel qu'il le dit bien, et non pas de la lettre.  L'approche est inversée: la loi ne s'applique pas, elle se justifie. Elle perd son exécutif pour se centrer sur son législatif. L'obéissance à une prescription n'existe pas tant par le risque de la pénalité qu'entraîne le manque à s'y conformer, que par l'évidence de la nécessité de sa présence: manipuler son voisin naïf est légal; le voler, illégal.

«Dans quel gouvernement faut-il des censeurs? Il en faut dans une république, où le principe du gouvernement est la vertu; mais encore les négligences, les fautes, ne certaine tiédeur dans l'amour de la patrie. des exemples dangereux. des semences de corruption; ce qui ne choque point les lois, mais les élude; ce qui ne les détruit pas, mais les affaiblit: tout cela doit être corrigé par les censeurs.» (livre I  V  XIX)
Nous vivons dans une monarchie constitutionnelle par procuration. Nous vivons dans une république par procuration. Notre esprit des lois est biscornue. Nous respections l'organigramme de la couronne britannique, mais sans y accorder assez de crédibilité pour en respecter les fondements. On peut réaliser toute l'importance que la reine revêtit pour Blair! Ici, Harper devrait se fier à Michaëlle Jean... Pas vraiment! Au Sud, on se veut le miroir de cette république impériale, mais en oubliant des paramètres fondamentaux: un leader élu au suffrage universelle et deux chambres électives aussi d'une puissance despotique. Et les lois dans tout cela...
Nos lois ne peuvent nous représenter sainement puisque nous ne sommes pas une population fixe avec une mission claire. Nous obéissons dans le plus grand désintérêt parce que notre pays est une continuelle réflexion des autres. Montesquieu vante sans ambages la monarchie; la république prend le deuxième juste devant le despote. Selon lui, la monarchie exige l'honneur et cultive l'ambition, alors que la république vénère le vertu et l'égalité et doit nécessairement être soutenu par des religions pour soutenir les inévitables inégalités. Et nous...

Nous avons des morceaux de l'un et de l'autre. Nous avons le manipulateur et le voleur. L'ambitieux sans scrupule et le dévot par décret.

15 février 2009

Censure

Le dernier «hors série» du Point porte sur la censure. J'écris avec réticence; à la lecture de l'éditorial d'introduction de la revue, nous réalisons que, non seulement plusieurs oeuvres firent l'objet de rejet par leur société pour diverses raisons, mais qu'un grand nombre d'oeuvres contemporaines devraient faire l'objet de censure: pas une censure officielle; une censure de bon sens. On pense entre autres à la multitude de bêtises publiées sur le Web... Hum!

De quoi réfléchir. À côté des feux de joie de Hitler, ceux des communistes russes, nous trouvons les rejets des révisionnistes et de négationnistes; et Salman Rushdie condamné et mis à prix par l'ayatollah puis par le monde musulman de la terre entière ? Et tous les plus grands philosophes grecques bannis par les colonels dans les années 70? Le censure est encore bien parmi nous. À celui qui n'a jamais censuré, à jeter la première allumette. Les plus volubiles défendront habilement leur décision; les moins pourvus, se retrancheront derrière des violences plus primaires, mais le résultat sera le même: le livre, l'oeuvre, la création, fera face à la destruction. Pourquoi?

Quelle est la raison fondamentale de la censure? L'ignorance. Oui, sans doute. La même chose que la haine et l'insécurité. On cherche à taire le rival. On cherche à éliminer la concurrence pour créer le monopole. Une fois en possession du monopole, on tue le marginal en réflexion pour ne pas ré-ouvrir un débat fermé par le despote. C'est le goulag idéologique après le goulag géographique. L'un est encore plus cruel parce que l'autre a au moins le courage de l'identifier et de le répudier. L'un est plus sournois: il se nourrit de la destruction du moi, du lui en l'occurrence, pour respecter l'image de la tolérance. La censure occidentale et la censure orientale; Fox News et Tiananmen Square.

Je me tais... pour ce soir!

14 février 2009

Le jeu de l'idole

Les réalités s'additionnent. Je reçois quotidiennement un nombre relativement impressionnant de publication international: en français, en anglais, en espagnol. J'en regarde les titres; j'en lis quelques articles; j'en observe les photos. Les multiples facettes de notre planète me fascinent. J'aimerais lire six ou sept langues supplémentaires pour pénétrer d'autres territoires plus intimement. Lire un incident par un observateur extérieur si efficace et honnête soit-il, n'est jamais que le témoignage d'un inconnu. Quel est le témoignage du résident? On dira que l'observateur externe pourra être plus impartial; il pourra être aussi plus ignorant. Qui est le plus compétent à donner une fidèle interprétation de l'impact de l'arrivée d'Obama à la présidence américaine: un blanc du Gardian; un cuivré du El Tiempo; un hallé du Times; une harvardienne du Newsweek; ou un noir de l'Alabama? En cela, il faut admirer le travail d'un Foglia qui les met en scène. Tout ce beau monde qui se gargarise de théorie et qui s'émeut de coup du siècle, de révolution sociale, de changement de garde, ne sont que des lombrics qui se tortillent sur des trottoirs chauds au soleil. Les intellos embourbés dans leurs confortables  pantoufles banlieursardes, "I have a dream". Ils en ont pleuré je crois bien. La démocratie regagnait tous ses galons. Enfin, nous avions trouver le pur, le vrai: l'icône de l'américanité dans toute sa splendeur. In God, we trust!

J'aimerais bien y croire. Mais je doute. J'attends, parce que les événements du monde pèsent beaucoup plus que les siens, que les leurs.

Nous verrons.

5 novembre 2008

Dernier droit (4)

Cardiologiste! 250, 000 $ par année pour faire boucherie. La dernière fois que j'ai fait du coeur de boeuf, il est resté dans les assiettes: caoutchouté. Au soin intensif, personne ne court; tout le monde remplit son rapport, classe des pillules, regarde la scédule pour la prochaine fin de semaine. Chiale...

J'ignore le nombre d'heures depuis la mer. De jours? Hum! Détaché vivant, viande rouge fraîche demandant sac de conservation. Ça sent bon: un peu vanillé parmi du camphre. Je voudrais pouvoir me border comme quand j'étais jeune dans la chambre en haute... je monte à la chambre; vers la gauche quelques pieds dans le corridor tiède; je croise le cadre de porte; le froid fouette mon corps recouvert d'un vieux pyjama en flanelle au motif lugubre. Il fait froid dans la chambre: problème de chauffage; économie de bout de chandelle! À la droite, mon lit; l'ancien lit d'Ernest, le grand-père, apparemment. Un lit de fer étroit qui grinche; mon lit; mon matelas; me douillette en coton rugueux carotté rouge et vert et fourré de quelque matériel louche qui sent. Je dégage l'oreiller; je plis parfaitement le drap blanc par-dessus la douillettee; je ramène les côtés en dessous du matelas, des deux côtés en séquence, fébrile de pénétrer dans mon cocon; les couvertures sont si serrées que le matelas en est incurvé. Je me glisse à l'intérieur... mon cocon! Et j'attends la sorcière. La quoi? On s'en reparle plus tard.

Les yeux me ferment. Pas de tonus musculaire! Le cerveau s'éteint.


Le pire et le meilleur


Barrack Obama est président des États-Unis.

Il succède à George W. Bush.

Ce pays juste au sud de chez nous, cette puissance impériale, en décadence selon plusieurs, vient de se donner un Christ. Il a même demandé à son public de l'aider à porter la croix vers le sommet de la montagne. Toutefois, au sommet de la montagne, ce n'est pas la crucifixion, c'est le nirvana.

J'envie tous les américains ce soir: ils ont un chef. Il les a fait pleurer d'affection; crier de joie; sauter d'impatience; écarquiller les yeux comme un nouveau né; rire avec un serrement dans la gorge. Je me souviens du dernier de chez nous qui m'a fait pleurer: René Lévesque! Lui, on lui a fait monter la montagne aussi, mais rendu en haut on l'a crucifié...

J'ai tellement le goût de déménager.

4 novembre 2008

Cultlure de l'immédiat


La semaine dernière, je rentrai dans la librairie Morin de Trois-Rivières pour acheter un livre. C'était l'anniversaire de naissance de ma fille qui demeure à Toronto et qui est une avide lectrice... et amatrice de film!

Ayant terminé le très beau « Sollicitudes » de Beaulieu et Atwood sur la littérature canadienne, j'avais le goût de lui acheter un Ducharme, un Beaulieu, un Aquin. Je me dirige vers la section littéraire du Québec; je cherche; je cherche; rien! RIEN! Aucun de ces auteurs ne se trouvait sur les tablettes. Parle d'un tablettage de filière treize! J'ai alors jeté mon dévolu sur les publications françaises; bien sûr elles pullulent. Et pas que les p'tits nouveaux au nombril humide comme les nombreuses publications romanesques des deux dernières années de la section Québec; mais non, du Moyen Âge jusqu'au XXIe siècle chez Folio, Livre de Poche, Flammarion, Points, Idées, La Pléiade et j'en passe... Et à bon prix encore. Je retourne dans la section P'tite Patrie : j'ai mal vu; recommençons! Je viens de voir, timbre rare, un ou deux Ducharme chez Folio et Aquin chez aussi, erreur de commande sans doute! Plusieurs Atwood, Richler, Lawrence, Munroe, Ondatje et d'autres avec l'imprimatur des grandes collections de France. Alors, c'est sûr, je trouverai quelques Boucher de Boucherville, Larkin, Lacombe, Rivard, Girard, Harvey, Germain, Godbout mon dieu, Carrier peut-être, enfin du Tremblay? Oui, oui, en voici un entre et parmi des tonnes d'insipidités subventionnées pour faire aller les presses, masturber les intellos et garnir les concours de l'UNEQ.

Je suis sorti avec un Ducharme de Folio et un Claudel (le jeune) en Livre de Poche.

En 1972, quand nous avons débuté, moi et une quinzaine d'hurluberlus, notre Bac spécialisé en littérature québécoise, on lisait la plupart des oeuvres romanesques et poétiques en photocopies pirate parce que les familles ne voulaient donner les droits de reproduction à un imprimeur. Quelle bande de minables pleutres! Le théâtre, Germain, Gauvreau entre autres ont totalement disparu de la sphère littéraire, publié dans des maisons d'édition aussi disparues. On leur préfère des Américains, des classiques ou des Européens ninjas... On n'écrit plus, on met en scène! Or donc, on avait la mission de mettre la littérature sur la carte. On était si fier de se montrer avec ces documents brochés à la vite, ou boudinés fragile, de trimbaler cet enfant qu'on voulait tellement élever vers la stratosphère des univers culturels. Je me souviens avoir lu Une de perdue, deux de retrouvés de Boucherville, dans la Revue canadienne à la bibliothèque municipale les soirs d'hiver, chapitre par chapitre sur ce vieux papier, comme on déshabille une fille la première fois.

Mais la balloune a pété. Aujourd'hui, il faut les commander pour les étudiants pour voir les arbres de notre passé littéraire apparaître sur les tablettes... S'ils sont réédités bien sûr! Que dis-je « passé ». Les arbres d'hier, même pas avant hier. On peut bien reprocher aux jeunes de ne pas avoir de perspective historique. J'ai pas soixante ans et j'ai déjà vu naître et mourir des auteurs, de puissants auteurs! J'ai pas soixante ans et j'ai vu naître et mourir ma culture...

Tant pis.

3 novembre 2008

Futilités


Demain la Terre arrêtera de tourner. Les Américains nommeront leur président.


La série mondiale: les Phillies de Philadelphie ont gagné battant Tampa Bay Rays.


Le Superbowl l'automne dernier? Les Giants de New York juste par trois points sur les Patriots de New England (Boston).


J'en bave. J'aime tellement parler de leurs exploits, de leur forces, de leurs faiblesses. Je suis à la lettre les indices de leur bourse. Je ris de leur choix. Ils n'ont pas de culture. Ils sont corrompus et impériaux.


Je suis à leur remorque. Je regarde leurs films. Je conduis leurs autos... ou les japonaises... ou les coréennes.


Je vis en procuration en attendant d'avoir le courage d'être quelqu'un.


Le cirque est en place. Les animaux attendent au sous-sol. Les gladiateurs grouillent dans leurs cages. Les spectateurs mangent et boivent dans les gradins. Les notables copulent sur les balcons. L'empereur boit. Le soleil!


Les satius, assis en périphérie, à l'écoute du prochain commandement, savoure la fierté de son maître.


L'empereur est mort! Vive l'empereur!

31 octobre 2008

Comment détruire la société!

Il suffit de la confier à des incompétents. Et aujourd'hui, nous y sommes! Oh! Je ne parle pas de la grande échelle hiérarchique où on se perd dans les théories et les titres ronflants. Je ne parle pas de nos politiciens, de nos dirigeants spirituels, des puissants de ce monde. Non! Je parle de moi. Je suis le grand destructeur de la société.


Je pense à Obama. Je reste froid face à ce personnage rongé par l'ambition. Oh! Horreur! J'ai trouvé McCain sympatique au Saturday Night Live. Noir ou blanc? Les démocrates, en panne sèche de candidat charismatique, court-circuité par l'ex-première-dame Clinton-je suis-corrompue-à-l'os, a jeté son dévolu sur une étude de marché qui définissait la couleur d'un preacher s'avérait le seul compétiteur valable pour remplacer le preacher blanc. Pauvre McCain, soldat de plomb, Top Gun de la plèbe, riche par alliance, qui ignore le nombre de ses maisons... de son épouse : cela dit assez l'importance qu'il accorde à ce détail. Et si on demandait à Barrack le total de ses placements...!?


Je pense à l'attention médiatique universelle sur l'élection présidentielle. Fugace! Une marée d'humains à la recherche d'une cause. Je pense que tout cela est vain : une horde de minus en orbite du soleil tentant de placer leur ombre pitoyable en relation avec l'Astre. Les Américains décideront et nous vivrons avec leur décision... une fois de plus... en bon conquis!


Je pense à la futilité de parler. Au manque de courage d'agir. Il vaut mieux faire le spectacle que marcher à l'affront. Mercredi matin, nous pleurerons notre dépendance, peu importe le résultat, car notre société se sera prouvée une fois de plus que notre colonialisme n'est pas seulement dans notre âme, il siège dans notre génétique.


Je pense à la destruction... Non! Je pense à mon prochain congé pour me baigner avec Bob de l'Ohio qui vit en Floride grâce à son ingénierie dans une multinationale pour discuter des vraies affaires : la culture générale d'un Américain intelligent!

28 octobre 2008

Instruments de torture


Ainsi va la vie. On meurt. On finit toujours par mourir. Et la plus belle mort est définitivement la dernière; la vraie; la tombe; la cendre; la disparition définitive!

La vie est fourbue de zombies : êtres plus ou moins moches, pourrissant mentalement et physiquement : tu périras par là où tu as péché : la gorge, le coeur, le cerveau, le cul...

En 81, une marche dans une nuit noire, avec un jeune étudiant à Argenta, Dylan. On n'avance que par l'instinct de reconnaître la route de terre et le son de nos bottes. Nous parlons de la vie. de la sienne et de la mienne; je suis en quelque sorte son tuteur; il termine sa douzième année; il vient de Upper New York près des Finger Lakes. Je crois encore aujourd'hui qu'il était très intelligent, mais surtout courageux : il est devenu prospecteur et s'aventure dans la jungle amazonienne. En arrivant à destination, quelque deux kilomètres plus loin, nous avons soudainement assisté au lever de la Lune : il faut avoir vécu en montagne pour avoir un sens de ce moment. La Lune peu à peu rayonne sur le faîte de la montagne, puis graduellement se dévoile et enfin la délaisse pour briller dans le ciel noir. Il fait clair. La forêt environnante, le sentier, les falaises s'enveloppent de poudre phosphorescente. Debout, en silence, happés par la féerie.

Ces moments de vie vont et viennent. Non! Pas vraiment! Il faut les chercher et les mériter. Il faut non pas accueillir l'aventure, mais trouver, prendre, le courage d'y pénétrer. La plupart des cons qui végètent à reporter à demain en attendant gaspillent leur temps et celui des autres. Ils torturent leur vie pour atteindre des instruments de silices. Je n'ai pas d'épaule pour les larves.


18 octobre 2008

Dernier droit (3)

Attention! Sur la civière à droite! Laisse le défibrillateur à gauche à la tête. Le cardio à droite, la pression ici, le régulateur, le dextrose là, la tente, appelle le neuro au cas. Vite Christ! Vous autres au rapport au poste.
Branche à l'encéphalogramme et au manomètre. Va me chercher de l'amphétamine et du Valium.
— Ah! Monsieur le docteur, il vient d'arriver des Îles par hélicoptère. Arrêt complet de toutes les fonctions moteur. Le pouls est normal, considérant. Le cerveau, on sait pas encore. On le branche?
— C'est Robert Plante.
— Qui? Lui? Comment...
— Robert Plante. Le conjoint de Diane.
—?!?!?
Manquait plus que lui... Le subir tout mon secondaire... École privée. À l'orée de la révolution tranquille. Le p'tit blond parfait de la banlieue cossue stationnant sa puissante moto de performance sous les yeux de tous. Assez curieusement, son regard rencontrait régulièrement le mien. Quartiers différents, histoire familiale aux antipodes, fréquentations irréconciliables, loisirs inabordables, l'univers de l'un représentait l'Olympe de l'autre.

Les leurres de la jeunesse. On avait été, tous les deux, témoins de la fornication d'un chien et de sa chienne, deux animaux sales d'environ trente centimètres de haut, maigres à frémir, laids à chier. Devant la porte d'entrée du séminaire, parmi les autres animaux à peine mieux dressés qui s'engouffraient dans l'humide sous-sol aux cases de tôle, ils tentaient, en hurlant, de se détacher. La nature ayant pourvu le Mâle canin d'un pénis avec des arêtes de retenu pour assurer non seulement une pénétration, mais un emprisonnement cadenassé de l'appareil dans le vagin de la Chienne, les deux goinfres se retrouvaient titubant maladroitement essayant de fuir la foule criarde. Cris bizarres : mélange de peur, d'urgence, de désespoir; de lui et d'elle, aigus à souhait, dents sorties, se tortillant comme des damnés aux enfers.... selon les gravures de l'Encyclopédie de la Jeunesse du moins... Lui et moi regardions un peu gênés, hébétés, alternativement l'emprise sexuelle et nos regards à la fois surpris, amusés et curieux! C'est la seule fois où nous assistions au même spectacle sauf la fois où, arrivant à la maison de Diane pour un samedi de petting, je les avais observés dans son salon en état de préparation avancée.

- Allez Éric! Sors-moi de là.

Un sage à entendre


Bof! J'arrête à la porte. Je cogne sur le cadre car la porte est ouverte. J'entre, demande une minute sachant bien, et lui aussi, qu'on en a pour plus. Je m'assieds, pousse un long soupir de dépis et pose ma question. Quelle est-elle? On s'en balance. Quand je viens le voir, c'est simplement pour entendre un peu de salubrité humaine, ce qui est rare!

Il est un repère. Pas une bouée. Pas un guide. Juste un cerveau qui parle bien, et juste. Je m'en sers de temps à autres pour défragmenter mon disque. Les individus indépendants ne court pas les rues; chez nous, oasis parmi mille mirages. À l'entrée, comme le casse-tête chinois, les blocs de bois, sphériques, cubiques, coniques ou élicoïdales s'étalent pêle-mêle sur le plancher. Je les jette là presque comme un défi que je nous donne. Vas-y! Essaie donc un peu de voir un ordre là-d'dans! Un certain nombre de phrases entrecoupées de quelques uns de mes grongnements s'écoulent. Je regarde plus que je n'écoute; ici les paroles comptent moins que leur association. Curieux à dire, peut-être plus encore à comprendre, c'est la logique qui est fascinante à élucider dans le propos, pas sa signification. Un peu comme l'ordre (pas dans le sens de classifier, mais dans le sens de commander): il sécurise; il clarifie. Le faible plie; le fort affronte. Les tergiversations parlent de bois; les décisions parlent. Lui, sa logique ordonne; elle n'est pas inquisitoire; elle se contente d'être déchiffrable, évolutive et solidaire. Déchiffrable, elle est limpide dans sa démonstration. Évolutive, elle monte graduellement ou descend inéluctablement vers le finalité à atteindre. Solidaire, elle n'est pas infaillible, mais englobante de tout l'univers concerné par l'objet de discussion.

Quelques minutes après mon arrivée, les pièces reposent toujours sur le plancher, mais ils font du sens. Je les ramasse; sors; hoche un peu de la tête; déambule calmement vers mon bureau: bon intermède.

16 octobre 2008

MoMA - Pollock

I have a dream! But who has an answer for me? The bridge crosses a river no longer existing. It dried up. It was damed! The water holds, stuck up for production. People on both sides now walk across dry foot. Plants and trees have started to grow up there where mice, crows and rats commutes from downton to suburb.


Je suis Pollock. J'ai bu. Une immense toile assiège mes yeux. Mes mains sont fébriles. Mon cerveau fige. Peu à peu, je suis envahi par une épilepsie cérébrale. Dans le gris, mes neurones s'énervent, se choquent. Elles se rebellent. Elles électocutent ma paroi crânienne. Le sang s'échauffe. Le pression monte. Tout mon corps commence à trembler. Je vais peindre bientôt. Je vais mouiller mes mains, mes doigts; mes ongles égratigneront le canevas entre la pression crevassante et la déchirure.



Outside in. Old words with no meannig. Remember Bill when we wanted to decontruct the words to build poetry instead of writing it. Join the sound to the feeling instead of the traditional highway of the words. Too late. You don't write and neither do I...


Pollock promena son américanité toute sa vie dans sa carcasse de blanc. L'indien du Wyoming lui colla tous les jours à la peau. Au fond de la bouteille, il trouva les gestes de son "addiction".

J'aime Pollock.
Pour Ève...

9 octobre 2008

Ne jamais baisser les bras!

Je ne connais jamais le présent du prochain coin de rue... de la prochaine station...


Il y a des rats que j'ai vus hier soir galoppant sur une croûte d'immondices brunâtres. De jeunes rats fouillant la crasse pour survivre dans leur bonheur communal et souterrain, leur longue et effilée queue noire cliquetant contre l'acier de la voie ferrée.

Même au détriment du hasard et des pires tragédies...

Ne jamais baisser les bras!

Jamais, même dans la pire noirceur.
Il y a toujours un trou dans le tunnel... quelque part!

8 octobre 2008

Fébrilité!

Frétillement! Agitation! Trépidation! Effervescence! Émoi...

Cinq cents milliards de petits martiens Et moi, et moi, et moi
Comme un con de parisien
J'attends mon chèque de fin de mois
J'y pense et puis j'oublie
C'est la vie, c'est la vie

Selon Jacques Dutronc.

Mon chèque de paie, il ne vient pas depuis assez longtemps pour me faire oublier les années de vaches maigres. Je pensais hier à un certain nombre de personnes qui ne connaîtront jamais ce calme de l'esprit. J'avais quarante ans passés lorsqu'un employeur me mentionna que « tu sais, c'est plutôt symbolique cette permanence ». Il ne réalisait pas jusqu'à quel point elle me soulageait cette satanée symbolique.

Les poètes du grand siècle pouvaient bien se gargariser avec leur retraite familiale. Je lisais justement aujourd'hui le destin de Baudelaire qui dépensa frivolement une grande partie de l'héritage de son père avant qu'il ne soit ralenti par sa famille avant qu'il ne dilapide tout le reste. Alors seulement, il se mit à l'écriture sérieusement... Pour embellir une maigre pension. Je ne connais pas de poètes riches; tout au plus certains romanciers qui vivent et certains essayistes et dramaturges qui complètent un pécule intéressant en complétant par d'autres médias. Nous ne sommes pas aux États-Unis! Là-bas, ils ne sont pas rares ceux qui font fortune, mais ils ne sont pas légion non plus. Chez nous, la littérature payante, elle s'enseigne, elle ne se publie pas.

Les millions de martiens sont outre frontière. Les quelques héros meurent après quelques années et sont rarement ressuscités. J'ai lu dernièrement que c'est Raymond Queneau qui aurait permis à Réjean Ducharme d'entrer chez Gallimard par la porte d'en avant. Aquin ne s'était pas encore suicidé dans la cour des Soeurs de l'Assomption à Montréal. C'était l'époque où le Refus global se mariait avec l'universalité et où des poètes, Miron, Grandbois, Lapointe, canevassaient sur un Riopel ou un Mousseau. Effervescence! Disparue! Éteinte! Sous une grande tente de kermesse où de petits écriveurs de parade se lancent et nagent jusqu'à la prochaine strophe. Il n'y a pas de vie sur Mars. Il n'y a pas de Martiens! Ils ont foutu l'camp!

J'ai reçu mon chèque aujourd'hui. Je vais tenter de croire en mon indépendance intellectuelle. Je vais déplacer mon cavalier vers la tour pour assiéger le destin. Échec au roi! Bouffer par la reine! Échec et mat par le fou... Je vais relire Stendhal. Et Robertson Davies. Je me dois bien une trilogie.

7 octobre 2008

Le soleil


Une journée ensoleillé, en plein milieu d'octobre... J'ai la chance de pouvoir travailler de mon bureau à la maison et voici ce que je vois à gauche puis à droite. Je bois une bière avant d'aller chercher ma p'tite dernière à la garderie. Je veux quand même prendre ma retraite le plutôt possible, mais ma vie roule tout de même assez bien.


Dernier droit (2)


Une sirène brise le silence. On aura téléphoné. Les gens s'affairent autour de cadavre vivant. Catalepsie. La marée a à peine eu le temps de se rendre aux genoux. Tant pis pour la peur! On l'a glissé sur la civière avec l'attention requise. Un cadavre. Il ballotte sous les sangles.

— Comment faire pour faire signe à ces gens?

— On le branche?

— Je ne vois pas pourquoi; pouls normal; pupilles dilatées, mais bon...

— Soluté?

— Oui, vas-y. On va l'hydrater...

C'est le départ vers l'hôpital. Diane est assise; les yeux rouges. Elle n'a pas pleuré. Elle est hébétée, abasourdie.

— Qu'est-ce qui arrive à mes vacances? Pourquoi aux Îles? L'air frais, le calme, la mer...

Soixante ans! Bel anniversaire! Troisième semaine de retraite après une vie de fou à gravir les échelons méthodiquement, avec abnégation et ambition. Des responsabilités envahissantes, mais des défis surmontables.

— J'étais tellement plus en contrôle au bureau.

Une fille, deux garçons : Natacha, Patrick, Frédéric : trente, vingt-huit, vingt-six. Réglés à l'horloge. Coordonnatrice de section, directrice de secteur, superviseure pour l'Est du pays. Quand Fréderic est entré à la maternelle, ce fut Forest Hill la cossue avec la direction nationale. Cinq pieds onze, tailleur haute couture, verres d'appoint et mallette marquée.

— Merde, Robert, qu'est-ce qui se passe?

Il l'avait croisée aux HÉC. Elle l'avait remarqué. Un intello un peu perdu en commerce international. Plus philosophe que comptable, il se promenait d'un cours à l'autre avec des A et des B. Toujours en broussailles, sentant la veille et soufflant l'oignon. Gentil, sans naïveté : un futur prof pourvu que le coup de pouce pour le doc y soit.

Le soleil avait complété l'arc. Le froid et le frimas étaient revenus sur l'île. Le médecin du village avait recommandé le Centre hospitalier régional à Campelton. L'hélicoptère pendant deux heures. Robert s'en est allé en ville. Diane est restée seule. Elle n'a jamais apprécié l'hélico : trop bruyant... et les vibrations! Bof!

— Je dois aller chercher les choses à l'Auberge de toute façon. Allez-y! Il semble stable. Je vous rejoindrai dès que possible. Voici mon numéro de portable : 674-188-5151. Je l'ai toujours avec moi.

Les ambulanciers se sont regardés en esquissant une moue.

— Bon, c'est bon! On dira de vous tenir au courant.

Un bruit d'enfer enlève le cadavre.

— Foutu bourbier! Je suis Johnny got his gun. Lui avait tous ses membres à la Première Guerre mondiale; il ne lui restait qu'une seule articulation : le cou. Le morse deviendra sa seule voie de communication. Mais moi? Je suis mort...


(à suivre)

3 octobre 2008

Dernier droit

Un homme et son épouse marchent sur la plage des Îles de la Madeleine. Ils se rappellent leur voyage de camping voilà plusieurs années, avant les enfants et le traintrain de la vie professionnelle. Ils ne se tiennent pas la main, tout de même pas une publicité de Liberté 55, mais ils ont une belle connivence. Elle a le vent dans les cheveux. Doucement, ses rides, ses lèvres plus minces, ses cheveux plus empaillés se marient aux vagues. L'air salin plisse ses yeux; il s'imagine à l'aventure : premier matelot à débarquer sur l'île pour la posséder. La plage est longue et blonde, ponctuée de lichens et de rocaille sablée; des coquillages, tout fracassés, jonchent la ligne d'eau. Le ciel promène quelques nuages. Le soleil pointe à 45 degrés sur l'Atlantique.

— Bon déjeuner!

— Juste ce qu'il faut.

— T'as pensé à Natacha?

— Ouais! Un peu...

— J'espère que tout va.... s'arranger.

— À son âge! Faut l'espérer. Arrête... Reste ici....

— Pas facile de faire le vide.

— T'as vu la nageoire là-bas!

— Où?

— Là, à gauche.

— J'vois pas.

— Ben oui, là, juste là, suis mon doigt...

— Vraiment, je n'vois rien...

—...

— Robert! Robert...

Robert est muet. Sa bouche a cessé d'obéir. Il fronce les sourcils. Des mots dans sa bouche refoulent dans sa gorge. Il fronce les sourcils plusieurs fois devant Jocelyne qui se demande à quoi il joue.

— Robert.

Il continue. Puis, il secoue son bras gauche. Son bras droit. Il sent un peu d'engourdissement; c'est le froid. Non...

Robert tombe à la renverse. Pas de convulsion, pas de mouvement, pas de plainte.... Dans son cerveau, ça tourne à mille milles à l'heure. Je m'en vais. Communiquer avec l'extérieur à tout prix. Ne criez pas si fort. J'entends! Le vague... Bougez; donnez un signe. Pas pouvoir transmettre quoi que ce soit. La lumière est trop forte; peut pas fermer mes paupières. Le vent... je sens le vent. Ma peau est sensible. Je forme des mots; je crie en moi; je bouge de toutes mes forces. Regardez-moi quelqu'un!

Seul. Plus personne. Le silence sauf la mer qui bruisse et le vent qui cille. Pas un ACV, je n'ai pas mal à la tête; mon coeur bat normalement. Bon, je ne suis pas médecin, mais pas un ACV comme j'en ai entendu parler. Qu'est-ce que c'est cet arrêt total? Est-ce que j'ai uriné? Est-ce que mon pantalon est mouillé? Je crois toujours avoir ce contrôle. Mais, oui oui, mon pantalon est humide. Le sable! C'est le sable qui est trempé qui humecte mon pantalon. Ouf! Cette fonction-là, je ne veux pas la perdre. Le bruit des vagues a changé. Il est plus fort; le vent se lève et augmente le volume des vagues. Ma cheville est très froide. Je sens mon pied qui bouge. C'est moi qui actionne mon pied? Je pourrais bouger l'autre aussi alors! Non, seulement le droit. Bizarre. Ça continue. Mon pied droit vit. Mon mollet vit aussi.... Ah merde! C'est mouillé, c'est vraiment mouillé! C'est la foutue marée. Elle monte la vache. Et moi alors.... Hé! quelqu'un! Je crie sans m'entendre. Hé! Diane? Où es-tu?
(à suivre)

2 octobre 2008

Le principe Oreo




Il n'est guère surprenant qu'un Noir aboutisse finalement à la course à la présidence des États-Unis. Enfin noir comme il y a les beurres et les blancs et les rouges ; les seuls vrais sont les jaunes et, si les insectes hériteront de la Terre, les jaunes ramasseront la civilisation. Les couleurs ne représentent plus que le périmètre social de leur origines biologiques. Nous avons un bagage génétique ; nous avons un bagage générationnel; nous n'avons plus de couleur... et nous aimons à renier les locales!
Hier soir, au débat francophone des chefs canadiens en route vers l'élection du 14 octobre, on a vu attablé à une grande table ovoïde cinq pantins colorés au teint du jour sous la direction d'un non moins clownesque d'un animateur tout aussi peinturluré recevant une réflexion éclatante sur la figure d'un réflecteur luminescent dont la position n'était pas la trouvaille du siècle.

Alors nous obsevâmes cinq noirs pâles, tels cinq spermatozoïdes avides et ambitieux, freluquant allègrement pour traverser la coquille où nichait sur un azur de plexiglace la rouge feuille d'érable, ovule précieux, objet de convoitise. Et on viendra dire que je manque d'imagination...

Et le principe Oreo, vous connaissez ? Il s'agit d'une expression qui définit, aux États-Unis, un Noir riche qui vit comme un Blanc : noir à l'extérieur, blanc à l'intérieur. Dans le prochain débat vice-présidentiel, nous aurons un homme et une femme : parfaits candidats, typique image d'une certaine stupidité naïve propre à tout vice-président; qui, "in the world" veut se battre pour être second sauf un ambitieux plutôt niais ou un gaffeur insécure? Par la suite, la table sera mise pour le vrai débat, celui que tout le monde attend : Obama et McCain. Le Noir contre le Blanc ; mais leur couleur épidermique sera très similaire. On pourra reconnaître le noir par sa physionomie et le blanc de même. Les couleurs se marieront ; bon, je sais, on n'ira pas dans l'étude de la pigmentation, je connais les variations épidermiques et soucutanées des deux peaux négroïde et caucasienne; ici, je parle de couleur. Pour la première fois de leur histoire, les Américains voteront en partie pour une couleur, inexistante, et en partie pour une idéologie tout aussi inexistante. Mais, tout de même, le 4 novembre, ils voteront pour la différence la plus marquante de leur jeune démocratie.

C'est la même chose de ce côté-ci de la frontière. Ils sont tous pareils ; ils disent et se dédisent ; se lancent de la boue plus ou moins poliment et s'essuie délicatement du bout des lèvres. Une fois l'exercice terminé, ils nous regardent tout charme en cherchant dans nos votes la récompense de leur performance. Je ne nie pas leur pouvoir, le réel et le potentiel, mais un pays, comme ces immenses réservoirs flottants que sont les cargos pétroliers, représente une masse beaucoup lourde, avec beaucoup trop de poids mort, pour effectuer rapidement une bifurcation importante. Je n'ai rien vu hier soir pour m'encourager à changer mon vote. Mon vote sera un message sur le futur dans mon pays. J'exercerai mon droit en mon âme et conscience en soupesant plusieurs facteurs : le parti, le chef, le candidat. Avec ce trio, je réfléchirai au futur à court, à moyen et à long terme. Finalement, je reconsidérerai mes convictions personnelles. Au bureau de vote, je placerai mon X intelligemment. Le débat d'hier n'aura, quant à moi, que prouvé l'importance du cirque médiatique que sont devenues les élections canadiennes. Il est de plus en plus difficile d'en apercevoir le bien-fondé, parce que la fabrication d'image prédomine de façon inexorable sur la substance. J'ai connu assez personnellement assez de politiciens provinciaux, fédéraux, et même à l'extérieur du pays, jusqu'en Pologne, pour être convaincu que, s'ils portent un soin vigilant à leur apparence, ils font aussi partie, les vrais, d'une catégorie tout à fait particulière d'individus à l'intérieur desquels on retrouve bien sûr une grande ambition, mais aussi des qualités humaines qui vont au-delà du simple aspect de la fonction publique. Le courage de faire de la politique à son plus haut niveau, celui de la représentation du peuple, relève vraiment de la mission peu importe l'avenue choisie pour dérouler le futur. Aujourd'hui, on a tué cette humanité par nos exigences de rectitude non pas politique, mais médiatique ; la preuve étant que dès qu'un candidat devient naturel et candide, un terrible tollé s'empare du personnage public en l'affligeant des pires calomnies.

La politique, c'est dur. Il faudrait sans doute, la ramener vers son premier mandat, celui de définir notre conduite nationale, et cesser de cancaner sur des dossiers dont on ne connaît à peu près rien et dont personne n'a pris la peine de vérifier l'exactitude, laissant ce soin à des médias qui vivent de ce type déficient et vicieux de dérapages dont ils sont la source, qu'ils cultivent allègrement... et qui fait vendre du papier. Faire confiance aux médias, c'est vouloir croire à l'innocence de sa conjointe aperçu sortant d'une hôtel avec un mec quand elle nous affirme: Tu n'es pas cocu chéri! Quel être un peu intelligent peut encore accorder quelque crédibilité fodamentale à ces articles, dépêches, dossiers et autres écritures, très souvent guère plus élevés que les commentaires du citoyens moyens. Se fier aux médias qui recueillent nos politiciens et les manipulent avec la complicité de ces spécialistes de l'image qui font leur choux gras des artifices, prouve la profonde noirceur informationnelle dans laquelle nous sommes tombés. Nous ne discutons plus sur des textes sources mais sur deux répliques.

Le débat d'hier nous fit voir un spectacle d'Oreo ; de qui est-ce la faute ? Éduquons-nous!